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dimanche 20 avril 2008

Compassion et sagesse


Un nouvel extrait du livre de Jack Kornfield "Dharma Vivant"


La base de l’enseignement du Bouddha peut se résumer en deux mots : compassion et sagesse.

Dans son aspect passif, la sagesse est cette vision intérieure qui pénètre la nature de l’existence et l’équilibre de l’esprit qu’apporte cette illumination. Compassion et tendresse sont les aspects actifs de la sagesse, l’expression d’une compréhension profonde du Dharma, des lois de la nature.

Les pratiques de méditation décrites dans ce livre mettent l’accent sur le développement de la vision intérieure, d’où émergera naturellement la compassion.

La plupart des maîtres axent leur enseignement sur la compréhension des caractéristiques du processus corps-esprit, sachant que l’expérimentation directe de l’impermanence, du déplaisir et du vide aura pour fruit l’amour et la compassion.

Lorsque l’on comprend et que l’on perçoit la souffrance dans sa propre vie, on a envie d’aider les autres êtres qui souffrent eux aussi. Le sentiment de libération qui naît alors de la révélation de la vacuité du monde donne l’envie de partager cette lumière et cet amour avec les autres.

L’amour universel se nourrit de l’absence totale d’égoïsme, et toute la pratique bouddhiste tend à l’éradication de la convoitise, de la haine et de l’erreur, qui sont les racines de l’égoïsme. La culture de l’attention, centrale au développement de la vision intérieure, revient à cultiver la tendresse et la tolérance puisqu’elle nous amène à laisser les choses exister telles qu’elles sont. Y voir clair sans juger, sans réagir, sans égoïsme, tel est le champ de la sagesse et de l’amour.

Les enseignements décrits dans ce livre parlent surtout du développement de la vision intérieure, mais la tradition bouddhiste nous parle de la méditation axée sur la vision intérieure et la tendresse comme de pratiques complémentaires.

Certains maîtres travaillent davantage sur la vision intérieure, d’autres sur la tendresse. Il peut s’avérer très utile de commencer par choisir des pensées et des états d’esprit de tendresse comme objets de méditation quotidienne.

Le chemin de la sagesse, s’il n’est pas équilibré par la compassion, peut devenir analytique et desséchant, et l’amour cultivé sans la sagesse peut être superficiel ou source d’erreur.

Les chemins de la vision intérieure et de la sagesse peuvent sembler séparés, mais on doit les réunir si l’on veut que la pratique soit complète. La compréhension juste était la base de la pratique du Bouddha, et il nous a enseigné tout ce qui venait par la suite : atteindre la libération pour le bien de tous les êtres. Tout ce qui peut aider à mettre fin à l’égoïsme : charité, bonnes actions, méditation sur la tendresse (toutes choses enseignées dans les temples bouddhistes) ou encore la voie de la libération menant à la plus grande sagesse, tout cela appartient de la voie du Bouddha.

Au fur et à mesure que nous progressons, nous comprenons qu’il n’est pas envisageable de ne pas libérer tous les êtres, car s’il en était ainsi, nous continuerions de vivre dans l’illusion d’un soi distinct des autres. Quand nous sommes parvenus à comprendre l’absence de dualité et le vide, la sagesse nous ramène à l’amour et à l’expression la plus lucide de la compassion.

Source : Jack Kornfield : Dharma Vivant p 40



LIRE d'autres extraits de ce livre (sur ce blog) :


Sur la Sagesse lire aussi sur ce blog:

lundi 25 février 2008

Pratiquer en fonction de sa personnalité



Questions et réponses avec Ajhan Juminien - Extraits de "Dharma vivant" de Jack Kornfield


Présentation :
Ajahn ( ou Achaan = enseignant) Juminien a commencé la pratique de la méditation à l'âge de 6 ans. Il a été ordonné moine dans la lignée du Bouddhisme Théravada à 20 ans. Il a enseigné en Thaïlande au monastère Wat Sukontawas.
Il fait appel à plusieurs méthodes de pratique et enseigne à ses élèves en fonction de leurs besoins et de leur personnalité ou de leur attachement antérieur.
Mais quelque soit la pratique, il ramène toujours son élève à la pratique de la vision intérieure.



Question : Vous dites qu’il y a de nombreuses manières efficaces de pratiquer. Que penser des maîtres qui affirment que leur méthode est la seule conforme à la voie du Bouddha, et que les autres pratiques ne conduisent pas à l’éveil ?


Réponse : L’ensemble de la pratique bouddhiste peut se résumer en une phrase : Ne t’attache à rien.

Il arrive que des gens, même très sages, s’attachent encore à la méthode qui leur a permis de progresser. Ils ne se sont pas encore totalement détachés de leur méthode, ou de leur maître.

Ils n’ont pas compris ce qu’il y a de commun à toutes nos pratiques. Ce ne sont pas pour autant de mauvais maîtres. Il faut s’efforcer de ne pas les juger et de ne pas idéaliser l’image du maître.

La sagesse n’est pas quelque chose à quoi on puisse s’accrocher, et elle ne peut émerger qu’en l’absence d’attachements.

Pour moi, j’ai eu de la chance. J’ai eu l’occasion de pratiquer avec plusieurs maîtres avant de commencer à enseigner.

De nombreuses pratiques sont efficaces. Ce qui importe est de mettre toute votre confiance et toute votre énergie dans la pratique. Vous jugerez vous-même alors des résultats.



Question : Faites-vous généralement commencer vos élèves par la méditation sur la vision intérieure ou par des exercices de concentration ?

Réponse : La plupart du temps, ils commencent par la pratique de la vision intérieure. Mais parfois, je commence par un exercice de concentration (jhana), notamment s’ils ont déjà pratiqué la méditation ou si leur esprit se concentre facilement.
Mais de toute façon, chacun doit tôt ou tard revenir à la pratique de la vision intérieure.

Il y a, dans les Ecritures en pâli, un discours dans lequel Bouddha, discutant avec des visiteurs laïcs, aborde ce sujet. Il montre plusieurs groupes de moines assis dans le bois autour de lui :

« Voyez comment les moines qui sont attirés par une grande sagesse sont assis autour de Sariputtra, le plus sage de mes disciples. Ceux qui cherchent à acquérir des pouvoirs sont réunis autour de mon grand disciple Maha Moggallana. Et ceux qui sont attirés par la discipline monastique sont regroupés autour d’Upali, le maître du Vinaya, tandis que ceux chez qui prédominent les tendances jhaniques sont… »

Nous voyons donc bien que depuis l’époque du Bouddha, les maîtres ont toujours permis à leur disciples de choisir leur pratique de méditation en fonction de leurs prédispositions.



Question : Pouvez-vous nous donner encore quelques conseils pour orienter notre pratique ?


Réponse : Votre pratique doit être orientée à l’opposé de vos écueils et de vos attachements.

Si vous cherchez sincèrement, vous les identifierez facilement.

Ainsi, si votre tempérament vous pousse à l’indifférence, vous devrez cultiver la tendresse.

Si le désir sexuel est pour vous un problème, vous axerez votre contemplation sur les aspects repoussants du corps jusqu’à ce que vous soyez capable de voir clairement sa vraie nature, et serez débarrassé de vos désirs.

Si vous êtes ignorant et troublé, cultivez l’introspection et la sensibilité en fonction de votre expérience, et soyez disposé à surmonter cette tendance.

Mais votre pratique doit être dévote et sincère, vous devez être mené par un désir incessant de connaître la vérité. Sinon, votre pratique stagnera et deviendra un simple rituel. Petit à petit, d’un moment à l’autre, vous devez suivre votre voie avec constance. Pratiquez sans crainte dans le sens de vos attachements, et cela jusqu’à la délivrance. C’est tout.



Question : Est-il utile de méditer sur la pensée, d’utiliser la pensée dans la méditation ?


Réponse : Lorsque nous commençons à pratiquer, nous commençons à entrevoir la nature de notre processus normal de pensée. Un flux sans fin d’idées, d’imaginations, de regrets, de projets, de jugements, de craintes, de désirs, de commentaires, de soucis…

Il peut être utile, en particulier au début de la méditation, de travailler avec la pensée, d’orienter l’esprit pensant vers notre pratique. Cela signifie que l’on cultive des pensées ayant trait au Dharma, comme la réflexion sur les quatre éléments.

Contemplez la manière dont tout ce que nous savons change de forme, le fait que notre monde n’est qu’un mouvement perpétuel d’éléments.

Nous pouvons aussi axer notre pensée sur la contemplation des trois caractéristiques dans toutes les situations de la vie quotidienne.

Nous pouvons penser à la vie et à la mort imminente pour comprendre notre expérience dans les termes du Dharma.

Tout cela revient à cultiver la compréhension juste.

A partir des livres et des enseignements, nous passons à notre propre pensée maîtrisée, et enfin à la méditation pour comprendre en profondeur et en silence notre propre esprit.



Question : Parler du Dharma présente-t-il un intérêt pour la pratique ?


Réponse : La sagesse peut sans nul doute venir à un esprit concentré et silencieux qui écoute dire le Dharma par des personnes sages.

Si vous devez absolument parler, la discussion sur le Dharma est certainement le meilleur thème à choisir. Mais la parole contribue parfois à la confusion. Ce n’est que dans un cœur silencieux que nous pouvons entendre le Dharma de manière spontanée et véridique, au fond de nous-mêmes et dans les paroles de ceux qui ont déjà atteint la connaissance.

Pour la plupart des gens, l’esprit est déjà beaucoup trop empli de mots et de pensées et la meilleure pratique consiste à cultiver la concentration et le silence.



Question : La vertu et la morale jouent-elles un rôle déterminant dans votre pratique ?


Réponse : Oui. Il y a trois grands niveaux de vertu.

-Le premier consiste à éviter les actes maladroits, à respecter les préceptes de bases.

- Le deuxième est la vertu consistant à maîtriser les six sens (y compris l’esprit), qui doivent être orientés sur la pratique et non sur les désirs.

- Le troisième niveau correspond à la véritable vertu intérieure, par-delà les règles et les préceptes – la vertu d’un esprit silencieux et purifié. La sagesse apparaît alors en conjonction avec les six sens et chaque moment de l’être devient conscient, par-delà l’égoïsme.

Nous devons tous commencer par pratiquer les deux premiers niveaux de la vertu, pour atteindre enfin la vertu intérieure. Elle naîtra de l’harmonie entre le corps et l’esprit, de l’abandon des désirs et de la compréhension profonde de la vacuité du monde.



Source : Dharma vivant » de Jack Kornfield
Remarque : Contrairement aux autres extraits de livre de ce blog, je n'ai pas eu besoin de le scanner, car déjà publié par Dhammapiti

  • LIRE d'autres extraits de livres de Jack Kornfield ( dharma vivant mais aussi Périls et Promesses de la Vie Spirituelle: ICI

samedi 2 février 2008

Etre relié à son coeur




Périls et Promesses de la Vie Spirituelle de Jack Kornfield


Extraits du Chapitre : Mettre Fin au conflit


Lorsque nous nous retirons du champ de bataille, selon les paroles de Tao te King, "nous voyons avec des yeux neufs qui ne sont plus voilés par le désir".


L'esprit qui n'est pas éveillé a tendance à entrer en conflit avec ce qui est

Pour suivre un chemin qui a du coeur, nous devons bien comprendre les mécanismes du conflit, à l'intérieur de nous-mêmes ; car les racines du conflit plongent dans l'ignorance. Si nous ne comprenons pas, nous serons facilement effrayés par les changements incessants de la vie, les pertes inévitables, les déceptions, l'insécurité que représentent notre vieillissement et notre mort.
L'incompréhension nous conduit à nous battre contre la vie, à fuir la douleur et à nous agripper à une sécurité et à des plaisirs, qui, de par leur nature, ne seront jamais pleinement satisfaisants.
Notre conflit avec la vie s'exprime dans toutes les dimensions de notre expérience.
Le maître Ajahn Chah décrivait ainsi cette lutte continuelle :

"Nous autres êtres humains, nous sommes constamment en lutte, en conflit pour échapper au fait d'être si limités - limités par tant de circonstances que nous ne pouvons contrôler. Mais au lieu d'y échapper, nous continuons à créer la souffrance ; nous sommes en conflit avec le bien, en conflit avec le mal, en conflit avec ce qui est trop petit, avec ce qui est trop grand, avec ce qui est trop court, ou trop long, vrai, ou faux ; vaillamment, nous poursuivons le combat".

La société contemporaine favorise notre tendance mentale à nier, ou à réprimer, la conscience que nous avons de la réalité. Conditionnés par notre société, qui incarne tout à fait ce refus de la réalité, nous nous protégeons de toute difficulté, de tout inconfort direct.


Nous voulons nous protéger du monde naturel

Pour nous protéger du monde naturel, nous avons créé la climatisation, des voitures chauffées et des vêtements qui nous protègent en toute saison. Pour échapper au spectre de la vieillesse et de l'infirmité, nous ne montrons dans nos publicités que des jeunes gens souriants tandis que nous reléguons nos vieux dans des maisons de repos ou de retraite. Nous cachons nos malades mentaux dans des hôpitaux psychiatriques. Nous exilons nos pauvres dans des ghettos autour desquels nous construisons des rocades afin que ceux qui ont la chance de ne pas y vivre ne voient pas la souffrance qui y est contenue.

Nos dépendance visent à nous engourdir face à ce qui est. Parmi nos dépendances, l'une des plus répandues est celle de la vitesse. La société technologique nous pousse à accélérer l'allure de notre productivité et de notre vie. Dans une société qui n'est pas loin d'exiger que nous vivions en mode accéléré, la vitesse et les autres peurs et dépendances nous engourdissent au point de nous rendre insensibles à notre propre ressenti.


Comment être relié à son cœur?

Dans de telles conditions, il nous est pratiquement impossible d'habiter notre corps ou de demeurer relié à notre cœur, à plus forte raison de nous relier à autrui et à la terre sur laquelle nous vivons. Au contraire, nous vivons de plus en plus seuls, isolés, coupés des autres et du tissu naturel de la vie. Une personne par voiture, de grandes maisons, des téléphones portables, des baladeurs collés à nos oreilles, joints à une extrême solitude et à un sens profond de pauvreté intérieure : voilà l'affliction la plus répandue dans notre société contemporaine.

Il nous est difficile de nous améliorer par un acte de volonté - comme si le mental voulait se débarrasser de lui-même, ou que nous voulions être les fils de nos propres oeuvres.

Lorsque nous luttons pour nous transformer, nous ne faisons que perpétuer des mécanismes de censure et d'agression envers nous-mêmes. Nous alimentons notre guerre civile intérieure.

(...)
Le but d'une discipline spirituelle est aussi de nous offrir un moyen de mettre fin au conflit,

non par la force de notre volonté mais dans un processus organique né de la compréhension et d'un entraînement progressif. Une pratique spirituelle suivie nous aide à cultiver une nouvelle manière de nous relier à la vie.

Lorsque nous nous retirons du champ de bataille, nous ne voyons plus avec les yeux voilés par le désir. Nous nous découvrons... Nous découvrons nos attirances et aversions continuelles, notre combat pour résister à tout ce qui nous fait peur, nous observons nos préjugés, notre convoitise, notre instinct de territoire. Puis derrière ces luttes continuelles, nous percevons notre profond sentiment d'incomplétude et de peur. Nous voyons à quel point notre lutte contre la vie a empêché notre cœur de s'ouvrir.

Dès lors qu'on abandonne la lutte et qu'on ouvre son cœur à ce qui est, on découvre le repos intérieur dans l'instant présent - c'est l'alpha et l'oméga de la pratique spirituelle. Nous trouvons enfin l'Amour que nous recherchons.

Dès qu'il met fin au conflit, le chercheur de vérité découvre quelque chose qu'il essayait de fuir ; la solitude, un sentiment d'infériorité, l'ennui, la honte, des désirs insatisfaits. Il lui faut face à ces aspects de lui-même.

Vous avez peut-être entendu parler de personnes qui ont fait des expériences "hors du corps", pleines de lumières et de visions.
Un véritable chemin spirituel requiert quelque chose de plus exigeant, que l'on pourrait appeler une expérience "dans le corps".

Pour nous éveiller, nous devons établir le contact avec notre corps, nos émotions, notre vie en cet instant même.

Il faut un engagement constant et inébranlable pour vivre dans le présent.

Sur le chemin spirituel, ce n'est pas une fois mais bien des fois que nous devons mettre fin au conflit. Mettre fin au conflit, et revenir au présent, c'est découvrir que notre propre cœur est assez vaste pour inclure le bonheur de tous les êtres comme inséparable du nôtre. Quand nous nous permettons en nous de ressentir la peur, l'insatisfaction, les difficultés que nous avions toujours évitées, notre cœur s'adoucit.

Faire face à toutes les difficultés que nous avions toujours fuies n'est pas seulement un acte de courage, c'est aussi un acte de compassion.


La compassion est le frémissement d'un cœur pur qui se produit lorsque nous avons permis à la douleur de la vie de nous toucher.

En mettant fin au conflit, nous pouvons accueillir nos deuils et nos tourments personnels, nos propres joies et nos propres triomphes. La générosité du cœur humain nous permet de nous ouvrir à notre entourage, notre famille, à notre communauté, aux problèmes du monde, à notre histoire et à notre patrimoine humain.

La compréhension lucide nous permet de vivre en harmonie avec notre vie, avec la loi universelle appelée Tao ou Dharma, la vérité de la vie.


(...)

mercredi 30 janvier 2008

La Guérison du corps et du cœur...





Périls et Promesses de la Vie Spirituelle de Jack Kornfield


Extraits du chapitre : Une Guérison nécessaire


Plan de ce message :
  • La Guérison du corps
  • La guérison du cœur
  • La guérison du mental
  • Méditation guidée : Développer l'attention qui guérit


(...)

LA GUÉRISON DU CORPS


La séance de méditation commence souvent par des exercices qui ont pour but de nous amener à être conscients de notre corps ; cette conscience est particulièrement importante dans une culture comme la nôtre, qui néglige la vie physique et instinctive.(...)


(...) En méditation, nous avons la possibilité de ralentir notre fonctionnement et d'accueillir tranquillement ce qui apparaît.

Quand nous sommes activement conscients, nous pouvons cultiver l'intention de nous ouvrir sans résistance aux expériences physiques, d'habiter réellement notre corps, ce qui nous permettra de ressentir plus clairement ses plaisirs et ses douleurs.


Nous ne savons pas observer la douleur

Notre conditionnement nous ayant appris à éviter et à fuir la douleur, il s'ensuit que nous la connaissons mal.

Pour guérir le corps, nous devons étudier cette douleur. Si nous nous penchons avec attention sur nos maux physiques, nous allons remarquer qu'il en existe plusieurs sortes.(...)

(...)La plupart du temps, le genre de douleur qu'on rencontre au cours de l'attention méditative n'est pas le signe de problèmes médical. Ce sont des manifestations physiques douloureuses de nos refoulements et de nos crispations aux plans psychique, physique et spirituel (...) Ce sont les régions du corps qui se sont contractées maintes fois dans des situations éprouvantes afin de nous protéger des inévitables difficultés de l'existence.

(...)


LA GUÉRISON DU CŒUR


De même qu'on permet au corps de s'ouvrir et qu'on le guérit en percevant ses rythmes et en l'entourant d'une attention profonde et bienveillante, on peut ouvrir et guérir d'autres dimensions de son être.

Le cœur et les émotions connaissent un processus de guérison similaire lorsqu'on leur offre notre attention afin de découvrir leurs rythmes, leur nature, et leurs besoins.


Ouvrir son cœur consiste à s'ouvrir aux souffrances occultées

La plupart du temps, ouvrir son cœur consiste tout d'abord à s'ouvrir aux souffrances occultées que l'on a accumulées pendant toute une vie - Tant les souffrances personnelles que les souffrances universelles de la guerre, de la vieillesse, de la maladie et de la mort. (...)

(...) Le plus souvent, les blessures les plus intimes, le sentiment d'abandon, la douleur sont ressentis comme des larmes retenues. Les bouddhistes parlent d'une mer de larmes humaines plus vaste que les quatre grands océans.

Lorsqu'on prend la place qui est la nôtre et que l'on cultive l'attention méditative, le cœur s'offre tout naturellement à la guérison. Le chagrin des souffrances et des espoirs anéantis, retenu en nous si longtemps, s'exprime alors.

Nous pleurons sur nos traumatismes passés et sur nos peurs présentes, sur toutes les émotions que nous n'avons jamais osé ressentir consciemment.(...)
La souffrance liée à la petite enfance et à la famille, blessures liées au père ou à la mère, la solitude, tout mauvais traitement physique ou sexuel, tout cela est emmagasiné dans notre cœur. (...)

(...) Refus de la réalité, colère, sentiment de perte ou de chagrin, ce travail sur la douleur engendre un profond renouveau.(...)



LA GUÉRISON DU MENTAL



Nous ne contrôlons pas nos pensées

(..) Lorsque nous observons nos pensées durant la méditation nous réalisons que nous ne les contrôlons pas (...)

La source même des mouvements du mental est l'insatisfaction (...)

(...) La nature dualiste de la pensée constitue une des causes de notre souffrance (...)


La guérison de l'esprit s'opère de deux manières:

On porte d'abord son attention sur le contenu des ses pensées et on apprend à les canaliser plus habilement en faisant appel à une réflexion lucide (...)
Si nous voulons que ces conflits soient guéris, nous devons cesser de nous identifier à eux (...)

Dés lors que nous comprenons que la nature même du mental est de penser, de diviser, de faire des projets nous sommes capables de nous libérer de la puissante emprise de son séparatisme et de nous établir paisiblement dans le corps et dans le cœur (...)


Au delà des pensées il y a un silence doux et apaisant

Lorsque nous allons au delà de cette effervescence de la pensée, nous découvrons un silence doux et apaisant (...)

(...)




MEDITATION GUIDÉE: Développer l'attention qui guérit


Asseyez-vous confortablement et tranquillement. Laissez votre corps se détendre. Respirez doucement.

Abandonnez toutes vos pensées, passé, avenir, souvenirs, projets. Contentez-vous d'être présent.

Laissez parler votre précieux corps afin qu'il vous révèle lui-même les endroits qui ont le plus besoin de guérison.

Permettez aux douleurs, aux tensions, aux maladies, aux blessures physiques de se manifester. Portez à ces endroits douloureux une attention délicate et bienveillante. Lentement, consciencieusement, ressentez leur énergie physique.

Observez ce qu'ils renferment dans leur profondeur - pulsations, élancements, tension, picotements, sensation de chaleur, contraction, irritation, mal diffus, tout ce que nous rangeons sous le nom de douleur.

Prenez le temps de les ressentir pleinement, de les envelopper d'une attention réceptive et bienveillante.

Ensuite, devenez conscient de la région du corps qui entoure ces points douloureux. Notez calmement les contractions ou crispations éventuelles ; respirez légèrement et laissez-les se détendre.

Puis, de la même manière, prenez conscience d'une aversion, d'une résistance éventuelle de votre esprit. Constatez son existence avec la même attention paisible, sans refus, en lui permettant d'exister telle qu'elle est et de se détendre quand bon lui semblera.

Observez maintenant les pensées et les peurs qui accompagnent la douleur que vous explorez : "ça ne passera jamais", "c'est insupportable", "je ne mérite pas ça", "c'est trop difficile", trop compliqué, trop profond", etc.

Offrez à ces pensées une attention bienveillante pendant quelque temps, puis revenez doucement à votre corps physique.

A présent, laissez votre conscience s'approfondir et s'adoucir. Ressentez à nouveau les différentes zones qui entourent l'endroit douloureux et permettez à chacune d'elle, à mesure qu'elle se relâche, de se déplacer, de s'intensifier ou de se dissoudre à son gré.

Penchez-vous sur votre douleur comme sur un enfant que vous voudriez doucement réconforter, la tenant toute dans une attention tendre et rassurante. Envoyez doucement votre respiration à l'intérieur de cette douleur, acceptant tout ce que vous voyez avec une bonté apaisante.

Continuez cette méditation jusqu'à ce que vous vous sentiez relié à toutes les parties de votre corps qui réclament votre attention, jusqu'à ce que vous vous sentiez en paix.

A mesure que cette attention thérapeutique se développe, vous pouvez la diriger régulièrement vers des régions particulières de votre corps affectées par une maladie ou une douleur. Vous pouvez ensuite explorer ce corps pour voir s'il réclame la même douceur de votre attention en d'autres points.

De la même manière, vous pouvez porter une attention thérapeutique à des blessures psychiques profondes. Le chagrin, le regret, la rage, la solitude, la peine peuvent tous être ressentis en premier lieu dans le corps.

Une attention délicate et bienveillante vous permettra d'aller au cœur de ces blessures. Demeurez tranquillement avec elles. Au bout de quelque temps, respirez doucement et ouvrez votre attention à chaque zone de contraction, d'émotions et de pensées qui accompagne ces blessures.

A la fin, vous pouvez laisser tous ces mouvements se calmer à leur tour, comme si vous réconfortiez doucement un enfant, en acceptant tout ce qui est, jusqu'à ce que vous vous sentiez en paix.

De cette manière, vous pouvez prendre soin de votre cœur, aussi souvent que vous le souhaitez.

Souvenez-vous que la guérison de votre corps est déjà là ; elle n'attend que votre attention compatissante.

(...)

  • D'autres enseignements de Jack Kornfield sur ce blog : ICI

Remarques:

  • Pour tous les "Extraits de livres" publiés dans ce blog, j'ai utilisé un scanner (Voir liste des livres ICI )
  • VOIR tous les "Extraits de livre" publiés sur ce blog (21 à ce jour) ICI

mardi 29 janvier 2008

La concentration d'accès






Extraits du livre de Jack Kornfield : "Périls et promesses de la vie spirituelle"



L'entrée dans une conscience élargie: La concentration d'accès


La clé qui ouvre à la fois les domaines de l'absorption et les domaines de la dissolution consiste en une stabilisation du coeur et du mental appelée "concentration d'accès".

Celle-ci représente le premier niveau de présence et de stabilité fortes qui apparaît dans la prière ou dans la méditation. Lorsqu'on parvient à cette concentration, la pratique spirituelle devient pour un temps stable et focalisée, et ni les obstacles intérieurs ni les vicissitudes de la vie quotidienne ne la perturbent plus.

On s'immerge, attentif, dans la méditation, provoquant un puissant changement de conscience; un courant de clarté, d'aisance et de concentration pénètre notre pratique.

Pour parvenir à la concentration d'accès, il faut être doué d'une aptitude naturelle à se concentrer, combinée à la persévérance et à la discipline.
Certains "pratiquants" ("élèves" dans le texte), qui suivent une formation intensive avec un instructeur compétent peuvent atteindre le niveau de la concentration d'accès en quelques mois, voire quelques semaines d'entraînement.

Les principes de méditation qui régissent cet entraînement sont toujours les mêmes: Répétition, concentration et abandon.
On se concentre sur une prière ou sur un mantra, sur une lumière colorée ou sur une visualisation, sur le souffle ou sur le corps, ou encore sur un sentiment tel que la bonté ou la compassion, en revenant sans cesse à l'objet de la concentration, ou en le répétant sans relâche, à travers tous les stades de la résistance et de la difficulté, jusqu'à ce que le coeur et le mental commencent à trouver le calme, à s'unifier et à être pratiquement absorbés dans l'expérience.

Au stade initial de la concentration d'accès, on se sent parfois mal assuré. On peut être puissamment concentré mais, tel un cycliste débutant, chanceler de temps à autre et se laisser distraire par ce qui se passe à l'arrière-plan. La répétition continuelle et la patience permettront de trouver l'équilibre au sein de cet état.

En s'abandonnant maintes et maintes fois à cette expérience, on peut apprendre à maintenir et à alimenter un niveau d'attention intensément concentrée.

La concentration d'accès a été ainsi nommée par les Anciens parce qu'en la pratiquant, nous développons suffisamment de stabilité de cœur et d'esprit pour accéder à des domaines supérieurs par le biais de la méditation.

A partir de cette concentration d'accès, on peut élargir le moi, degré par degré, en raffinant la conscience pour parvenir aux huit degrés d'absorption et se sentir un avec des états extraordinaires de conscience lumineuse.

Le moi, élargi, pénètre dans des royaumes subtils d'absorption, nous accédons à des états visionnaires comprenant les six mondes d'existence, des états de lumières et de sentiments sublimes, et même des états raréfiés de conscience qui sont au delà de ces derniers.

A partir de la concentration d'accès, nous pouvons réellement pénétrer dans une dimension de conscience totalement différente, les "domaines de la dissolution du moi". Ici, nous n'élargissons ni ne raffinons le moi mais nous examinons très profondément sa nature et celle de la conscience, jusqu'à ce que même les éléments les plus subtils et les plus élevés du sens du moi et de la séparation se dissolvent.




samedi 24 novembre 2007

Pratique intensive et pratique non intensive








Les textes qui vont suivre sont extrait du livre de Jack Kornfiel: "Dharma vivant"

1) Pratique intensive et pratique non intensive

2) Pourquoi écrire /lire des livres sur le dharma:




Pratique intensive/non intensive:


Les deux approches contrastées de la méditation sont la retraite et l'approche non intensive, complémentaire. Ces deux méthodes peuvent être appliquées séparément ou en combinaison selon les styles ou le mode de vie du méditant.

L'approche non intensive met l'accent sur la pratique adaptée à la vie quotidienne, car elle permet de développer la sagesse à un rythme naturel, à partir des activités de la vie quotidienne. La méditation devient alors une manière d'être et ne demande pas une situation isolée et recueillie.

La méthode intensive amène le développement naturel de la sagesse et de l'attention. C'est un chemin qui ne réserve ni instant de bonheur suprême ni concentration intense. Mais ce chemin peut être difficile à suivre s'il ne s'accompagne pas de périodes de pratique intensive.

La lenteur à laquelle nous progressons dans la vision intérieure peut être décourageante.
L'attention ne se fixe pas facilement dans un environnement agité. Le désir, l'ennui et les contraintes quotidiennes peuvent nous amener à abandonner la pratique.

Mais l'approche non intensive présente aussi de grandes qualités. La sagesse que l'on parvient à développer est profonde et durable. On n'a pas à redouter l'attachement aux états de félicité mentale ou à une concentration excessive. Et, puisqu'il n'y a rien à gagner et qu'il n'y a rien d'autre que le moment présent, la pratique quotidienne est en fin de compte le but recherché par tous.

Une pratique intensive occupant de nombreuses heures par jour dans un lieu retiré peut favoriser le développement rapide de la vision intérieure et de la concentration.
Le méditant passe parfois quinze heures par jour à méditer, assis ou debout, sans interruption. L'esprit est en paix et une vision intérieure aiguë se développe (...)

La concentration et la félicité qui découlent souvent de la pratique intensive continue se combinent avec une vision intérieure profonde du Dharma (la nature des choses) qui renforce la confiance et le désir de poursuivre sa pratique.
Cette expérience est d'une importance considérable. Elle assure une base solide pour méditer dans le monde une fois achevée la période de retraite.
Certains maîtres affirment que ces retraites sont le seul moyen de connaître l'expérience véritable du dharma et d'atteindre le nirvana.

La méthode intensive et la méthode naturelle quotidienne ont toutes deux été recommandées par le Bouddha. Ce sont deux chemins valables, et nous, occidentaux, avons aujourd'hui la possibilité d'expérimenter ce qu'il y a de meilleur dans les deux approches:
Nous pouvons consacrer un certain temps à des retraites intensives et les combiner avec la pratique quotidienne de l'attention. L'ensemble nous permet d'équilibrer notre vie, d'approfondir notre sagesse et de renoncer à nos attachements.




Pourquoi écrire /lire des livres sur le dharma:


À un certain point de ma méditation, je pris la décision de ne jamais écrire de livre. Quelle perte de temps !
Quelle bonne manière de me tromper et de tromper les autres. Il y a bien assez de livres sur le bouddhisme, la méditation et la pratique spirituelle. Du reste, aucun d'entre eux ne dit la vérité, car la vérité ne peut s'exprimer par des mots(...)

L'essence n'est pas dans les mots, elle est dans l'expérience.

Pourtant, le livre est là: un rapport, un indice.
C'est une tentative de mettre à la disposition des occidentaux qui cherchent à comprendre l'enseignement du Theravada aujourd'hui.
Jadis, le bouddhisme était surtout représenté par la traduction formelle d'anciens textes.

Mais cet enseignement toujours vivant est présenté ici à travers les mots de certains des plus grands maîtres de cette école. Mon seul espoir est qu'il puisse aider ses lecteurs à découvrir leur propre dharma.

Les enseignements présentés ici peuvent paraître étonnants et contradictoires. Un maître prescrit une approche de la pratique, et se trouve aussitôt contredit par un autre dans le chapitre suivant.
Ce paradoxe ne fait que révéler l'existence de nombreuses approches valables de la même vérité fondamentale.

Si le lecteur découvre que le Dharma ne peur se trouver dans les formes et techniques contrastées du Bouddhisme, mais uniquement dans l'expérience qui leur est sous-jacente, il est prêt à commencer sa pratique.

Ne vous demandez pas trop quelle sera la méthode la plus efficace, la plus claire ou la plus facile. Choisissez une technique, un maître, et lancez-vous(...)



vendredi 23 novembre 2007

La vision intérieure par la méthode naturelle








La vision intérieure par la méthode naturelle:


Célèbre moine bouddhiste, Buddhadasa Bhikkhu fut l’un des premiers à promouvoir la compréhension mutuelle entre les religions par le dialogue entre personnes de différentes confessions et il était hautement respecté dans le monde entier. Il a quitté son monastère pour redécouvrir l’insertion du bouddhisme dans le monde et l’esprit de ses origines. L’accent qu’il a mis sur l’interdépendance de toutes choses a fait de lui un des précurseurs de la pensée écologique et un apôtre de la paix entre les nations. Ses écrits, traduits et publiés dans de nombreuses langues, ont exercé une influence considérable sur le renouvellement de la pensée bouddhiste. Les réflexions qu’il a exprimées ont le potentiel de guider non seulement la Thaïlande, mais aussi toutes les sociétés qui luttent pour la création d’un ordre social, politique et économique juste et équitable.

L'enseignement qui va suivre de Achaan Buddhadasa, est extrait du livre de Jack Kornfield " Dharma Vivant" et a été scanné et publié par : Vivre le Dhamma :
Pour une commodité de lecture sur le web, le texte a été divisé en chapitres qui n’apparaissent pas dans l’original



La concentration naturelle



Nous allons voir ici comment il est possible de se concentrer par la méthode naturelle ou en fonctionnant suivant une pratique construite et organisée.

Le résultat final est le même : l’esprit est concentré et prêt à mener une introspection précise. Mais il faut ici formuler une remarque : la concentration naturelle est généralement suffisante pour le développement de la vision intérieure, tandis que la concentration résultant d’une formation organisée est généralement excessive par rapport à l’utilisation envisagée.

De plus, il arrive que cet état extrêmement concentré génère chez le méditant un sentiment de très grande satisfaction. Un esprit pleinement concentré est susceptible de connaître un tel sentiment de bien-être que le méditant risque de s’y attacher, ou d’imaginer qu’il est l’aboutissement de la voie, le nirvana.

La concentration naturelle est suffisante pour pratiquer l’introspection et ne présente aucun des désavantages inhérents à la concentration poussée dérivée d’une pratique intensive.

Les Écritures se réfèrent souvent à des hommes qui ont atteint naturellement les divers stades de l’éveil. Cela s’est souvent produit en présence du Bouddha, mais aussi par la suite en présence d’autres maîtres. Les disciples auxquels cela est arrivé n’étaient pas partis méditer dans la forêt pour pratiquer assidûment la concentration sur des objets précis, selon les méthodes décrites dans les manuels.

Il est clair que c’est sans le moindre effort que les cinq disciples du Bouddha atteignirent l’éveil en entendant son discours sur le non-soi. La vision intérieure pénétrante leur est venue naturellement. Ces exemples nous montrent bien que la concentration naturelle peut se développer d’elle-même au moment où l’on essaie de comprendre clairement quelque chose, et que la vision intérieure qui en résulte peut être aussi durable qu’intense.

Elle se manifeste naturellement, automatiquement, tout comme l’esprit se concentre au moment où nous nous apprêtons à exécuter un exercice d’arithmétique ou que nous visons la cible avant de tirer un coup de fusil : l’esprit se concentre et se calme immédiatement. C’est ainsi que se manifeste la concentration naturelle spontanée. En temps normal, nous n’y prêtons pas attention parce qu’elle semble n’avoir rien de magique, de miraculeux ni d’impressionnant. Mais le simple pouvoir de cette concentration naturelle pourrait nous permettre à tous d’atteindre la délivrance. Nous pourrions conquérir la récompense suprême qu’est la libération, le nirvana, le plein éveil, grâce à la seule concentration naturelle.

Donc, ne pas négliger cette concentration naturelle spontanée. La plupart d’entre nous la possèdent déjà ou sont capables de la développer rapidement. Nous pouvons l’utiliser, comme la plupart des éveillés de jadis, en ignorant tout des techniques de concentration modernes.


la nature des étapes de la prise de conscience

Observons maintenant la nature des étapes de la prise de conscience interne qui nous conduisent à la vision intérieure complète du « monde », c’est-à-dire des cinq agrégats.

Le premier stade est la joie

Le premier stade est la joie, le bonheur mental ou le bien-être spirituel. Faire le bien, donner une aumône (la forme la plus minimale de l’acquisition de mérites) peuvent être source de joie. Au niveau supérieur, la morale, soit la conduite irréprochable en paroles et en actions, suscite une joie encore plus grande.

Par-delà ce stade, on atteint la joie de la concentration, la découverte du grand plaisir que l’on ressent dès les premiers niveaux de la concentration.

L’extase a le pouvoir de susciter la tranquillité. En temps normal, l’esprit ne connaît pas de retenue, asservi qu’il est à toutes sortes de pensées et de sensations liées aux séductions du monde extérieur. Son état normal est l’agitation, et non le calme. Mais le calme et la stabilité progressent en proportion de la joie spirituelle. Lorsque la stabilité est parfaite, la concentration l’est aussi. L’esprit est tranquille, calme, souple, maîtrisé, léger et satisfait. On peut alors l’utiliser pour poursuivre un but, et notamment pour éradiquer les souillures, ou états mentaux négatifs.

Cet état d’extase et de paix ne rend pas l’esprit muet, dur comme un roc. Rien de cela. Le corps se sent dans son état normal, mais l’esprit est particulièrement calme et disposé à la réflexion et à l’introspection. Il est parfaitement clair, serein, apaisé et maîtrisé. Il est prêt au travail, à la connaissance. Tel est le niveau de concentration auquel il faut tendre, et non celui du méditant concentré, raide comme une statue, privé de ses facultés de perception.

Dans une posture de ce type, il est impossible d’entreprendre un quelconque travail d’introspection. Un esprit profondément concentré ne peut pratiquer l’introspection. Il est dans un état de non-perception et totalement inutilisable pour la vision intérieure. La concentration profonde est un obstacle majeur à la pratique de la vision intérieure.

Pour pratiquer l’introspection, il faut tout d’abord revenir à une concentration plus superficielle, on pourra alors utiliser la puissance intellectuelle acquise. La concentration élevée n’est qu’un outil. Ce qu’il nous faut est un esprit calme, stable, si bien préparé au travail que lorsqu’on se met à la pratique de la vision intérieure, on parvient à la juste compréhension du monde entier. On aboutit alors à la vision intérieure naturelle, du même type que celle dont avaient bénéficié quelques contemporains du Bouddha en écoutant ses discours.

Cette concentration permet le type de pensée et d’introspection qui conduisent à la compréhension, sans miracle ni procédures cérémonieuses.

Cela ne veut pas dire pour autant que la vision intérieure se manifestera immédiatement. On ne peut être éveillé d’un seul coup. La première étape de la connaissance peut se produire à n’importe quel moment, mais cela dépend toujours de l’intensité de la concentration et de la manière dont elle est utilisée. Si concentré et clairvoyant que l’on soit, la manifestation de la vision intérieure est quelque chose de très particulier, d’extraordinairement clair et profond. Si la connaissance que l’on a acquise est la connaissance juste, elle correspondra à l’expérience directe de la réalité et, avec la pratique, elle progressera jusqu’à la compréhension juste et vraie de tous les phénomènes.

Si le développement de la vision intérieure reste limité, celle-ci pourra tout de même transformer quelqu’un en saint, ou au moins en homme à l’esprit élevé, ou en un homme ordinaire plein de qualités. Aujourd’hui même, si l’on développe les qualités de l’esprit dans un environnement favorable, il est possible de devenir pleinement éveillé. Tout dépend des circonstances.

Mais quoi qu’il en soit, si l’esprit dispose de cette concentration naturelle, le facteur que l’on appelle vision intérieure doit obligatoirement se manifester et correspondre plus ou moins étroitement à la réalité. Si nous autres méditants écoutons, considérons et étudions sérieusement le monde, l’esprit et le corps ou les cinq agrégats dans le but de comprendre leur vraie nature, la connaissance acquise dans un état calme et concentré ne pourra être source d’erreurs, et nous sera dans tous les cas bénéfique.


vision du caractère transitoire, déplaisant et étranger



L’expression « vision intérieure de la véritable nature des choses » se rapporte à la vision du caractère transitoire, déplaisant et étranger au « soi » de toutes choses, au fait que rien ne mérite d’être obtenu, d’être vécu, au fait de voir qu’aucun objet ne mérite qu’on s’y attache pour ce qu’il est ou parce qu’il est bon ou mauvais, attirant ou repoussant. Aimer ou détester quelque chose, ne serait-ce qu’une idée ou un souvenir, est de l’attachement. Dire que rien ne vaut la peine d’être ou d’être obtenu, c’est dire que rien ne mérite que l’on s’y attache. « Obtenir », c’est attacher son cœur à la propriété, à une situation, à la fortune ou à un objet plaisant. « Être », c’est s’attacher à la conscience de l’image de soi, s’identifier à son statut d’époux, d’épouse, de riche, de pauvre, de gagnant, de perdant, d’être humain ou même à la conscience d’être soi.


le fait d’être soi n’a rien de drôle



Si nous y regardons de près, le fait même d’être soi n’a rien de drôle, au contraire, car essayer d’être quelqu’un est source de souffrance. Si l’on parvient à se détacher totalement de l’idée d’être soi, ou une image quelconque de soi, on ne souffre plus.

C’est pour cela qu’il est utile de concevoir l’inutilité d’être quoi que ce soit, et c’est la raison d’être de la formule selon laquelle être quelque chose, n’importe quoi, ne peut être qu’une source de souffrance liée à cette forme d’être particulière. S’il y a « soi », il y a forcément d’autres choses qui ne sont pas « soi » ni « à soi ». Ainsi, on a des enfants, une femme, un ceci, un cela. On a donc des devoirs en tant qu’époux, épouse, maître ou serviteur... Il n’y a aucun état d’être que l’on puisse conserver sans lutte. Les difficultés et les luttes liées à la conservation d’un état d’être ne sont que le résultat de notre obsession aveugle des choses, de l’attachement aux choses.


continuer à exister en cessant



Mais comment continuer à exister en cessant d’essayer d’être ou d’obtenir des choses ? Celui qui n’a pas réfléchi à ce problème risque fort de ne pas trouver la réponse. Les mots « obtenir » et « être » sont fondés sur les états mentaux négatifs, sur le désir, sur l’idée de « mérite d’être obtenu, mérite d’être » qui poussent l’esprit à « obtenir » et à « être » avec obstination. Le résultat ne peut être que dépression, angoisse, désarroi et trouble, ou du moins un lourd fardeau pour l’esprit. Connaissant la vérité, nous devons toujours être sur le qui-vive, surveiller l’esprit - pour qu’il ne se laisse plus asservir à « obtenir » et « être » par le biais de l’attachement. Nous devons faire preuve de courage pour rester à l’écart de ces influences malsaines. Mais si nous ne sommes pas encore assez forts pour renoncer complètement à avoir et à être, nous devons être attentifs et clairvoyants de manière à ce que lorsque nous obtenons ou que nous devenons quelque chose, nous soyons le moins investi possible, et que l’émotion soit réduite au minimum.


Le monde, et toutes choses n’appartiennent à personne



Le monde, et toutes choses, sont impermanents, inintéressants et n’appartiennent à personne. Tout individu qui désire et s’attache à quelque chose en souffrira - dès le début, dans son premier désir d’avoir ou d’être cette chose, puis quand il s’engage dans le processus de l’avoir ou de l’être, et enfin après quand il a obtenu ou qu’il est devenu cette chose ou cet état. Avant, pendant et après, celui qui s’attache est lié comme par une chaîne et souffrira lorsque ce à quoi il s’est attaché disparaît.

Il en va de même avec la bonté, à laquelle pourtant tout le monde attache une grande valeur. Celui qui s’implique dans le bien d’une manière erronée et s’y attache exagérément souffrira autant de ce bien que si c’était un mal. Souvenons-nous de cela si nous voulons nous impliquer dans le bien, et prenons garde de ne pas nous attacher à nos bonnes actions.

Un sceptique pourrait me demander : « Si aucune chose ne mérite d’être obtenue et aucun état d’être désiré, cela veut-il dire que personne ne doit travailler pour obtenir fortune, situation et biens ? » Or, si l’on comprend de quoi il est question, on voit bien que celui qui dispose d’une compréhension juste est bien mieux placé pour effectuer toutes les tâches qui doivent être accomplies dans le monde que celui qui est soumis à des désirs exigeants, qui se montre irresponsable et inintelligent.


Rien ne nous empêche de travailler et d’agir dans le monde

Rien ne nous empêche de travailler et d’agir dans le monde, mais nous devons toujours être attentifs aux affaires dans lesquelles nous sommes impliqués, et nos actions ne doivent pas être motivées par le désir. Nous pouvons alors observer les résultats de notre travail de manière naturelle, non obsessionnelle.

Le Bouddha et ses disciples éveillés étaient entièrement libérés de tout désir, mais parvenaient tout de même à accomplir des choses bien plus utiles qu’aucun d’entre nous. Si nous nous penchons sur l’emploi du temps du Bouddha, nous constatons qu’il ne dormait que quatre heures par jour et passait tout le reste de son temps à travailler.

Quant à nous, nous consacrons plus de quatre heures par jour à nous distraire.

La sagesse discriminante

Puisque le Bouddha et ses disciples éveillés étaient parvenus à éradiquer totalement leurs états mentaux négatifs, responsables du désir d’être quelqu’un ou d’obtenir quelque chose, quelle est donc la force qui les motivait ? Ils étaient motivés par la discrimination, ou la sagesse associée à la bonne volonté (metta).

Les actions fondées sur les besoins corporels naturels, comme de recevoir et de manger de la nourriture, étaient elles-mêmes motivées par la discrimination. Ils étaient libres de tout état mental négatif, libres de tout désir de continuer à vivre pour devenir ceci ou cela ; mais ils étaient capables d’opérer la distinction entre ce qui vaut la peine et ce qui ne vaut pas la peine, et c’était là la force qui envoyait leur corps sur la route pour mendier la nourriture. S’ils en trouvaient, tant mieux. S’ils n’en trouvaient pas, tant pis.

Quand ils avaient la fièvre, ils savaient comment se soigner, et agissaient du mieux possible en fonction de leurs connaissances. Mais si la fièvre était insurmontable, ils savaient que la mort est naturelle et qu’au bout du compte, nous perdons la maîtrise de notre corps. Etre vivant ou mort ne signifiait rien pour eux, les deux étant de valeur égale. Ils étaient sans désirs.

Si l’on veut se libérer entièrement de la souffrance, c’est bien la meilleure attitude que l’on puisse adopter. Il n’y a pas besoin d’idée d’un « soi » qui serait maître du corps, seule la sagesse discriminante permet au corps de continuer à vivre par sa force naturelle.

C’est cette sagesse discriminante qui permet le déroulement naturel des processus corporels et mentaux et qui permet de les observer sans attachement et sans désirs.

L’exemple du Bouddha montre que le pouvoir de la discrimination et de la bonne volonté suffit à maintenir en vie un être libéré de ses désirs, et, qui plus est, à lui permettre de faire beaucoup plus de bien que ceux qui sont toujours soumis à leurs désirs. Les personnes soumises à des états mentaux négatifs ne font que ce qui leur profite, car ils agissent par égoïsme. En revanche, les actes de l’éveillé, ignorant le soi, sont d’une pureté parfaite.

Lorsque l’homme qui vit dans le monde entend dire qu’aucun objet ni aucun état ne méritent d’être désirés, il n’est pas convaincu. Il n’y croit pas. Mais celui qui comprend le sens profond de cette affirmation la trouve stimulante et réjouissante. Son esprit se rend maître des choses et indépendant. Il est capable d’effectuer un travail quelconque, car il sait qu’il ne se laissera pas asservir par lui.

La raison pour laquelle il nous est presque impossible d’accomplir parfaitement un travail, sans la moindre erreur, est que nous sommes mus par le désir d’obtenir ou d’être quelque chose, poussés par notre désir. C’est pour cela que nous ne pouvons être maîtres de nous-mêmes et ne pouvons être constamment bons, honnêtes et justes. Toutes les ruines, tous les échecs sont causés par l’esclavage du désir.


La connaissance de la véritable nature des choses

La connaissance de la véritable nature des choses est l’objectif de tout bouddhiste, le moyen de sa délivrance. Que nous aspirions à des avantages mondains comme la fortune, la situation, la réputation, ou au bénéfice supra mondain du nirvana, le fruit de la délivrance, le seul moyen de réaliser ce souhait est la connaissance et la vision intérieure.

La vision intérieure est pour nous source de prospérité. Il est dit dans les Écritures que seule la vision intérieure peut nous purifier. Nous ne possédons des choses et ne sommes quelque chose qu’en termes de vérité mondaine, relative. Nous disons couramment que nous sommes ceci ou cela pour la simple raison que la société trouve plus commode de nous identifier par nos noms et nos occupations.

Mais nous ne devons pas croire que nous sommes réellement ceci ou cela. Ce serait nous conduire comme des criquets, qui, lorsqu’ils ont la tête couverte de boue, sont égarés et se mordent les uns les autres jusqu’à la mort. Quand nous, humains, avons la face couverte de boue, quand nous nous laissons prendre au piège des illusions et des désirs, nous sommes si désorientés que nous agissons à l’inverse de notre comportement habituel et que nous pouvons aller, par exemple, jusqu’au meurtre.

Ne nous laissons donc pas aller à nous attacher à des vérités relatives, qui sont essentielles pour communiquer dans la société mais ne peuvent servir qu’à cela. Nous devons prendre conscience de la véritable nature du corps et de l’esprit, afin de nous en détacher.

Quant à la fortune et à la situation dont nous avons l’impression de ne pas pouvoir nous passer, considérons-les comme des vérités relatives de manière à perdre l’habitude de dire : « Ceci appartient à un-tel, ou à telle ou telle catégorie. » La loi se charge de gérer la propriété ; nous n’avons pas besoin de nous attacher à l’idée de « mien ».

Nous ne devrions posséder des choses que pour notre bien-être, et ne pas laisser les choses se rendre maîtres de notre esprit. Lorsque nous avons cette connaissance claire, les choses deviennent nos serviteurs, nos esclaves, et nous pouvons les utiliser plutôt que de nous laisser asservir par elles.

Si nos pensées tendent au désir et à l’attachement, que nous avons conscience d’avoir et d’être ceci ou cela, et que nous nous attachons à ces idées, les choses finiront par nous utiliser. Nous passerons notre vie à essayer d’acquérir et à craindre de perdre divers biens, notre réputation, notre fortune ou autre chose, et deviendrons leur esclave. Nous devons gérer les choses de manière à garder notre indépendance, à dominer les choses. Sinon, nous nous trouverons dans une situation fort peu enviable quand ces choses disparaîtront ou cesseront d’être, comme toutes choses.

émancipation



Lorsque nous avons réussi à percevoir clairement que rien ne mérite d’être désiré, le détachement croit en proportion de notre vision intérieure. L’attachement a enfin commencé à régresser. C’est là un signe que notre esclavage a déjà duré si longtemps que l’idée de nous en libérer nous est enfin venue. Ce désenchantement et cette désillusion peuvent enfin se manifester lorsque nous sommes las de notre entêtement stupide à nous attacher aux choses. Nous voulons nous défaire de ces filets dans lesquels nous avons été retenus prisonniers. Ce processus de rupture ou de séparation des objets de l’attachement était appelé par le Bouddha « émancipation ». C’est une étape des plus importantes, un stade décisif vers la délivrance finale.

Une fois délivrés de nos attachements aux formes, aux sensations et aux idées, nous ne pouvons plus être esclaves du monde. Nous sommes purs, décontaminés de toutes les souillures que sont l’envie, la colère et l’erreur. Quitter l’esclavage pour jouir du goût merveilleux du monde sans désir, c’est réaliser notre pure condition naturelle. Cette pureté réelle donne alors naissance à un calme et une sérénité que rien ne peut plus troubler. La délivrance de l’oppression et de la turbulence était ce que Bouddha appelait simplement « la paix ». Le calme, la paix, une certaine manière de goûter au nirvana pendant notre vie.


Nirvana

Le mot nirvana a été traduit par « absence de tout instrument de torture ». Mais on peut aussi le traduire par « extinction sans reste » : d’abord, l’absence de source de tourments, la délivrance de toutes les formes de contraintes et de limites, et ensuite l’extinction, sans aucun combustible pour alimenter le retour de la souffrance. Si l’on relie les deux sens du mot, on aboutit à la notion de liberté complète. Il y a quelques autres sens très utiles du mot nirvana : l’extinction de la souffrance, l’éradication des souillures, ou encore l’état, le royaume, ou la condition qui est la cessation de toute souffrance, de toute souillure, et de toute activité karmique.

De nombreuses sectes utilisent le mot nirvana, mais parfois avec des sens différents. Pour un groupe, il voudra dire calme et tranquillité, parce qu’il identifie le nirvana avec la concentration profonde. Pour d’autres c’est l’absorption complète dans les sens qui serait le nirvana.

Le Bouddha a défini le nirvana comme étant simplement la condition de la délivrance de notre esclavage, de nos tourments et de la souffrance, l’état qui résulte de la vision de la véritable nature des choses et nous permet de renoncer à tout attachement. Il est donc indispensable de cultiver la vision intérieure par un moyen ou par un autre.

la voie naturelle



L’une des méthodes consiste à faire en sorte que la vision intérieure se révèle à nous par elle-même, naturellement, en cultivant nuit et jour la joie dérivée de la pureté mentale, jusqu’à ce que les qualités décrites se manifestent progressivement.

L’autre méthode consiste à développer nos pouvoirs mentaux en adoptant une pratique de concentration ou de culture de la vision intérieure. Dans de bonnes conditions, certains pourront tirer profit de cette dernière méthode.

Mais il est toujours possible de pratiquer le développement de la vision intérieure par la voie naturelle - en nous contentant de mener une vie si pure et honnête que nous connaissons successivement la joie, le calme, la vision intérieure de la vraie nature des choses, le désenchantement, le retrait, la fuite, la purification des souillures et enfin la paix du nirvana. C’est le moyen de nous libérer progressivement de la souffrance et de nous rapprocher de la perfection intérieure, du nirvana, de jour en jour, de mois en mois, d’année en année.

Pour compléter notre explication sur l’apprentissage de la vision intérieure, nous devons évoquer ici les systèmes organisés qui n’ont pas été enseignés par le Bouddha mais par des maîtres ultérieurs.

Ce type de pratique convient à des gens qui débutent à un niveau très bas, qui ne sont pas capables de percevoir naturellement, de leurs propres yeux, le caractère insatisfaisant de la vie mondaine.

Cela ne veut pas dire qu’il soit impossible d’obtenir les mêmes résultats par la méthode naturelle ; la seule méthode dont il est question dans les écritures est en effet la méthode naturelle.

Certains trouvent la méthode naturelle difficile à comprendre, ou pensent que la vision intérieure naturelle ne peut être développée que par des êtres extraordinairement vertueux ou pour qui la pleine compréhension des choses serait un jeu d’enfant.

Que faire donc si l’on n’a pas les vertus ou les qualités nécessaires ? C’est pour des personnes de ce type que les maîtres ont élaboré des systèmes de pratique, des cours précis que l’on doit suivre du début à la fin.

Vipassana



Le terme technique qui désigne aujourd’hui ces pratiques de développement de la vision intérieure s’appelle Vipassana. Vipassana s’oppose à l’étude intellectuelle, les deux étant aujourd’hui considérés comme des volets complémentaires de la formation. Vipassana est le travail réalisé à l’intérieur de soi ; c’est une formation mentale au sens strict, qui n’a rien à voir avec les manuels. Les écritures ne mentionnent directement ni Vipassana ni l’étude intellectuelle, mais tous deux apparaissent dans des textes plus récents.

Cependant, Vipassana est une pratique bouddhiste authentique, conçue pour des gens qui cherchent à éradiquer la souffrance. Elle se fonde sur l’introspection concentrée et continue. Les maîtres qui voulaient expliquer ce qu’était Vipassana s’appuyaient sur une série de questions : Quelle est la base, le fondement de Vipassana ?

Quelles sont les caractéristiques qui nous permettent de dire que ceci est bien Vipassana ?

Quelle est l’activité que l’on appelle Vipassana ?

Quel est le résultat ultime que l’on attend de Vipassana

Notre réponse en ce qui concerne le fondement de Vipassana serait : la morale et la concentration. Vipassana signifie « vision intérieure claire » et se rapporte à la vision claire qui s’offre à un esprit plein de joie et débarrassé de ses états mentaux négatifs.

La joie se développe à partir de la pureté morale, qui est une condition préalable nécessaire. Cela est dit dans les Écritures bouddhiques, où la pratique est décrite comme une série d’étapes appelées les sept purifications, culminant dans le nirvana. Pour les maîtres, la pureté morale correspond à la première des sept purifications.

Lorsque l’on est parvenu à l’apaisement des activités corporelles et de la parole, on aboutit à la tranquillité mentale, qui induit à son tour les autres étapes de la purification : délivrance des conceptions erronées, délivrance du doute, connaissance de la juste voie à suivre par opposition aux voies détournées, connaissance et vision de sa progression au long du chemin, et enfin vision intérieure intuitive totale.

Ces cinq dernières étapes sont le propre de Vipassana. La purification du comportement et de l’esprit n’est que la voie d’entrée dans Vipassana.

De nombreux maîtres bouddhistes enseignent aujourd’hui le développement de la vision intérieure. La pratique débute par des exercices de concentration comme par exemple l’attention à la respiration, puis des pratiques de vision intérieure Vipassana.

Dans d’autres systèmes la méditation est dès l’abord orientée sur la vision intérieure. Le méditant qui veut entreprendre la pratique se rend en général pour quelque temps dans un centre de méditation ou dans un lieu isolé.

Au cours de cette retraite, il s’adonne à la méditation intensive pour équilibrer son esprit et atteindre l’expérience supra mondaine, la délivrance du nirvana. Lorsque le méditant pratique par la méthode naturelle en un lieu isolé, il devra de toute manière un jour intégrer Vipassana et pratiquer l’attention dans sa vie quotidienne.

Le sage, en vérité, n’a ni passé ni futur ; il voit que la liberté consiste à comprendre qu’il n’y a rien à perdre ni à gagner, rien à obtenir, et rien à devenir. Que cette connaissance soit la cause du véritable bonheur et de la libération de tous les êtres.