mardi 12 février 2008

Exaltation de soi-même et dénigrement des autres

Mara ( illustration Thaï)


Mara




Remarques préalables: Cet enseignement, extrait du livre "Dans cette vie même" est tiré du chapitre 3 de ce livre : "Les dix armées de mara" et plus particulièrement de la "Dixième armée de mara" qui est: l'Exaltation de soi-même et dénigrement des autres.

Les
Dix armées de Mara sont les forces des Kilesas ( c'est à dire les impuretés en pali)
En pali
Mara veut dire tueur. Il personnifie la puissance qui tue la vertu et la vie.
Ses armées sont entrainées pour attaquer les méditants. Elles ont essayé de vaincre le Bouddha la nuit même de son illumination.

  • L'histoire de Mara est notamment relatée dans le Padhana Sutta : L'effort
  • ( Lire sutta en entier à la fin de ce message)
Extraits :

"......Les passions sensuelles sont ta première armée.
Ta seconde s'appelle Mécontentement.
Ta troisième, c'est la Faim et la Soif.
Ta quatrième s'appelle Envie insatiable.
En cinquième viennent Paresse et Engourdissement.
La sixième s'appelle Terreur.
Ta septième est Incertitude.
L'Hypocrisie et l'Obstination, ta huiitème.
Gains, Offrandes, Gloire, et Statut
obtenus à tort,
et quiconque se louangerait soi-même
et déprécierait les autres......"


Mara et son armée


Les 10 armées de Mara ou les 10 Kilesas :
(On notera que certains
kilesas font également partie des 5 empêchements à la méditation )

  • 1 le plaisir sensuel
  • 2 Le mécontentement
  • 3 La faim et la soif
  • 4 Le désir (fait parti des 5 empêchements )
  • 5 La paresse ou la Torpeur (fait parti des 5 empêchements)
  • 6 La peur
  • 7 Le doute (fait parti des 5 empêchements)
  • 8 La Vanité et l'ingratitude
  • 9 Gains, louange, honneur, réputation non méritée
  • 10 Exaltation de soi-même et dénigrement des autres


Un enseignement de Sayadaw U Pandita :

La Dixième armée de Mara : Exaltation de soi-même et dénigrement des autres

(...)

L'exaltation de soi-même attaque souvent lorsque certains succès ont été remportés dans la pratique: On a par exemple le sentiment d'avoir une moralité parfaite (...)

Nous sommes alors victime de la dixième armée de Mara. Cette dixième armée est peut-être la plus mortelle de toutes (...)


L'essence de la Vie sainte


La vie sainte comporte trois sections : sila, samadhi et panna


Il est possible de se réjouir de sa propre pureté sans pour autant dénigrer les autres ou se glorifier soi-même. (...)

La vie sainte comporte trois sections : sîla, samâdhi et pannâ, ce qui inclut la réalisation du chemin et du fruit, c’est-à-dire l’expérience de nibbâna.(...)


Il y a également les pouvoirs psychiques au nombre desquels la vision pénétrante de la véritable nature de la réalité par la sagesse vipassanâ.

Et il y a par ailleurs le gain, le respect et la notoriété qui résultent éventuellement de la pratique.


la personne qui se satisfait du gain et de la notoriété

Un bûcheron se rend dans la forêt car il a besoin de sève pour un travail important. Il tombe sur ce beau grand arbre, lui coupe toutes les branches pour les ramener chez lui. Une fois dans son atelier, il constate que ces branches et ces feuilles ne lui sont d’aucune utilité pour son travail ; c’est la personne qui se satisfait du gain et de la notoriété.

La personne qui se contente d’avoir une moralité très pure

Un second bûcheron décolle soigneusement la fine écorce extérieure ; c’est le yogi qui se contente d’avoir une moralité très pure mais qui ne fait aucun effort pour développer son esprit.

Exaltation de soi-même et dénigrement des autres

Vient un troisième yogi, un peu plus intelligent, qui réalise que la moralité n’est pas le but du chemin. Il faut penser à développer l’esprit. Ce yogi va alors se choisir une forme de méditation et travailler intensivement. Lorsqu’il aura atteint la fixité de l’esprit, il se sentira fort. Son esprit sera calme et heureux, il expérimentera la joie et le ravissement. Il est même possible qu’il maîtrise les jhânas ou absorptions méditatives dans une profonde concentration.

Il se met alors à réfléchir : « Mon Dieu, comme je me sens bien ! Mais cette personne là, à côté de moi, est tout aussi agitée qu’au début ! » Ce yogi a l’impression d’avoir atteint l’essence de vipassanâ et de la vie sainte alors qu’en réalité, il est tout simplement victime de la dixième armée de Mâra (exaltation de soi-même et dénigrement des autres).
C’est le bûcheron qui se contente de l’écorce intérieure de l’arbre sans avoir atteint le noyau.

les pouvoirs psychiques

Un autre yogi, plus ambitieux, est décidé à développer les pouvoirs psychiques, il les atteint et est submergé d’orgueil. En plus, il s’amuse beaucoup avec ses nouveaux pouvoirs. Il pourrait alors penser : « Oh c’est une expérience très avancée, ce doit être l’essence du Dhamma.
Ce n’est pas pour tout le monde ! Cette dame, là, ne peut certainement pas voir ce qui est juste devant son nez, les devas et les êtres infernaux ». Si ce yogi ne se libère pas de la dixième armée de Mâra, il finira intoxiqué, incapable de développer les états mentaux positifs ; sa vie sera marquée par une grande souffrance.


Les pouvoirs psychiques ne libèrent pas vraiment.

A notre époque, les gens sont facilement subjugués par les pouvoirs paranormaux. Le fait d’exhiber ces pouvoirs psychiques, même très modestement, provoque pour on ne sait quelle raison, une explosion de foi chez les gens.

C’était déjà le cas du temps de Bouddha:

Il y a même eu un laïc qui s’est un jour approché du Bouddha pour lui suggérer de s’attirer des élèves en faisant étalage de ses pouvoirs psychiques ; le Bouddha devait, selon lui, mettre en évidence ceux parmi ses disciples qui détenaient les pouvoirs psychiques et leur demander de faire des miracles en public. « Les gens seront très impressionnés, dit-il, et vous aurez beaucoup de dévots. »

Le Bouddha refusa. Par trois fois, l’homme réitéra sa demande et trois fois elle fut refusée.

Finalement le Bouddha dit :

"Homme laïc, il y a trois sortes de pouvoirs psychiques. Le premier consiste à voler dans les airs, plonger dans la terre et faire toutes sortes d’autres performances paranormales. Le second consiste à lire les pensées d’autrui. "

Vous pouvez dire à quelqu’un : « Oh, tel ou tel jour, vous pensiez ceci, vous êtes sorti pour faire cela… » Les gens peuvent être très impressionnés par ce genre de choses.


Mais il y a une troisième sorte de pouvoir psychique : c’est le pouvoir d’instruire

Ce pouvoir vous permet par exemple de dire à quelqu’un : « Vous avez telle ou telle attitude et ce n’est pas bien, c’est négatif, c’est nuisible, cela ne conduit pas au bonheur ni à celui des autres, vous devriez abandonner ce comportement et adopter telle ou telle pratique pour cultiver les bonnes actions. Ensuite, vous devriez méditer en suivant les instructions que je vais vous donner.» Ce dernier pouvoir, celui de guider les autres sur le juste chemin est le pouvoir psychique le plus important.

« Oh ! Laïc, ces deux premiers pouvoirs n’entameront pas la confiance de ceux qui ont foi en vipassanâ, mais s’ils sont exhibés devant les gens qui n’ont pas cette foi, ils pourraient les amener à se poser certaines questions : ‘ Eh bien ! Qu’a-t-elle de particulier, cette méditation ? On peut obtenir ces pouvoirs par les mantras et autres méthodes ésotériques de certaines sectes ou systèmes religieux que je connais ‘. Ces gens là manqueront mon enseignement. »


Le troisième pouvoir psychique est le meilleur , c'est le pouvoir d’enseigner les autres.


« Oh ! Laïc, quelqu’un qui est capable de dire ‘ceci est mal, ne le fais pas, tu dois cultiver le bien par la parole et par l’action. Voilà comment on débarrasse l’esprit des kilesas. Voilà comment il faut méditer. Ceci est le moyen d’atteindre la paix de nibbâna qui libère de toute souffrance ‘. Ceci, oh ! Laïc, est le pouvoir psychique le plus intéressant."

Mais allez-y, essayez d’atteindre les pouvoirs psychiques si cela vous intéresse. Ce n’est pas essentiel mais cela ne contredit pas la pratique de vipassanâ. Personne ne vous en empêchera et le succès dans ce domaine n’est certainement pas quelque chose dont on puisse se moquer.

L’essentiel, c’est de ne pas croire que les pouvoirs psychiques sont l’essence de l’enseignement.

Celui qui atteint les pouvoirs psychiques et qui croirait avoir atteint la fin du chemin spirituel, se trompe lourdement. Ces gens cherchent le noyau du bois mais se satisfont de la couche extérieure ; rentrés chez eux, ils constatent qu’ils ne peuvent rien en faire.

Donc, lorsque vous aurez atteint les pouvoirs psychiques, s’il vous plaît, poursuivez votre pratique et franchissez successivement toutes les étapes de connaissance vipassanâ, les différentes consciences du chemin et du fruit, jusqu’au moment où vous aurez réalisé l’état d’arhat.

Lorsque l’attention et la concentration seront bien établies, la sagesse vipassanâ va pénétrer les différents niveaux de compréhension de la nature des choses. On peut dire qu’il s’agit là d’un autre type de pouvoir psychique mais ce n’est pas encore la fin du chemin.

Il se peut que vous atteigniez finalement le chemin sotapatti, la noble conscience de celui qui est entré dans le courant. C’est le premier stade d’illumination. Cette première expérience de nibbâna, la conscience du chemin, déracine certaines kilesas de façon définitive.

En poursuivant votre pratique, vous arriverez peut-être à la conscience du fruit. Lorsque cette conscience du fruit se manifeste, l’esprit demeure dans la paix de nibbâna. On dit que cette libération n’est pas limitée dans le temps, une fois que vous aurez fait l’effort de l’atteindre, vous pourrez y retourner à n’importe quel moment.

Il faut cependant comprendre que ces premiers succès ne sont pas le but final.

Ce que nous propose Bouddha, c’est l’atteinte de l’illumination parfaite, la libération définitive qui anéantit à tout jamais toute forme de souffrance.

Le Bouddha se servit donc de l’image du tronc d’arbre et en guise de conclusion, il dit :

« Le bénéfice de mon enseignement ne se limite pas au gain, au respect ou à la renommée, le bénéfice de mon enseignement ne se limite pas à la pureté du comportement, il ne se limite pas à l’atteinte des jhânas, il ne se limite pas à l’atteinte des pouvoirs psychiques ; l’essence de mon enseignement, c’est la libération complète des kilesas et la capacité de réaliser cet état à n’importe quel moment ».

J’espère que vous pourrez accumuler suffisamment d’énergie, de force et de courage pour faire face aux dix armées de Mara, pour les vaincre toutes avec une compassion sans merci, de façon à pouvoir franchir successivement toutes les étapes de connaissance vipassanâ.

Puissiez-vous atteindre dans cette vie même la noble conscience de celui qui est entré dans le courant et arriver finalement à vous libérer totalement et de façon définitive de toute souffrance.


Source : Extrait  de : Dans cette même vie de Sayadaw U Pandita (Editions ADYAR)



Autre illustration de Mara




A moi --
résolu dans l'effort
près du fleuve Nerañjara,
faisant un grand effort,
faisant jhana
pour accéder au repos du joug --

Namuci vint,
prononçant des mots de compassion:
"Vous êtes couleur cendre, maigre.
La mort est en
votre présence.
La mort
a 1,000 parts de vous.
Seule une part
est votre vie.
Vivez, mon bon monsieur!
La vie vaut mieux.
Vivant,
vous pourrez accomplir
des actes de mérite.
Que vous viviez la vie sainte,
accomplissant le sacrifice du feu,
vous vaudra tant de mérites.
Quel besoin avez-vous de vous efforcer?
Difficile à suivre
-- la voie de l'effort --
difficile à faire, difficile
à soutenir."

En prononçant ces vers,
Mara se tenait en présence de l'Eveillé.
Et c'est à Mara, parlant ainsi,
que le Béni du Ciel dit ce qui suit:

"Parent de l'inattentif,
Mauvais,
venu ici pour n'importe quel besoin:
Je n'ai pas, en fait de mérites,
le moindre des besoins.
Ceux qui ont besoin de mérites:
c'est à eux que
Mara devrait s'adresser.

En moi, il y a conviction,
austérité,
persistance,
discernement.
Pourquoi, alors que je suis si résolu
m'enjoins-tu
de vivre?
Ce vent pourrait assécher
même les rivières.
Pourquoi, alors que je suis si résolu
mon sang ne devrait-il pas s'assécher?
A meusre que s'assèche mon sang
ma bile et mon flegme.
A mesure que disparaissent mes muscles,
l'esprit devient plus clair;
l'attention, le discernement,
la concentration sont
plus fermes.
En demeurant ainsi,
accédant à la sensation ultime,[2]
l'esprit n'a plus d'intérêt
pour les passions sensuelles.
Vois:
d'un être
la pureté!

Les passions sensuelles sont ta première armée.
Ta seconde s'appelle Mécontentement.
Ta troisième, c'est la Faim et la Soif.
Ta quatrième s'appelle Envie insatiable.
En cinquième viennent Paresse et Engourdissement.
La sixième s'appelle Terreur.
Ta septième est Incertitude.
L'Hypocrisie et l'Obstination, ta huiitème.
Gains, Offrandes, Gloire, et Statut
obtenus à tort,
et quiconque se louangerait soi-même
et déprécierait les autres.

Cela, Namuci, est ton armée,
les commandos du Sombre Seigneur.
Un couard ne peut les défaire,
mais qui les vainc
en tire le bonheur.
Est-ce que moi je transporte de l'herbe muñja ?[3]
Je crache sur ma vie.
La mort au combat vaudrait mieux pour moi
que, battu,
de survivre.

Coulant ici, ils n'apparaissent pas,
certains prêtres et contemplatifs.
Ils ne connaissent pas la voie
par laquelle ceux aux bonnes pratiquent
vont.

En voyant sa force sous la bannière
de tous côtés --
ses troupes, Mara
sur sa monture --
Je vais au combat.
Puissent-ils ne pas me faire bouger
de
ma place.
Cette tienne armée,
que le monde et ses devas
ne peuvent surmonter,
Je l'écraserai par le discernement --
comme un pot non cuit avec une pierre.

En rendant ma résolution maîtrisée,
l'attention bien-établie,
J'irai de royaume en royaume,
entraîner de nombreux disciples.
Eux -- attentifs, résolus
faisant ce que je leur demande --
malgré leurs souhaits, iront
où, étant allés,
il n'y a pas de griefs."

Mara:

"Pendant sept ans, j'ai suivi à la trace
les pas du Béni du Ciel,
mais n'ai pu en tirer une ouverture
sur Lui, auto-éveillé
et glorieux.
Une corneille a fait le tour d'une pierre
de la couleur du gras
-- 'Peut-être ai-je trouvé
quelque chose de tendre ici.
Il y a peut-être quelque chose de délicieux' --
mais ne trouvant rien de délicieux là,
la corneille s'en est allée.
Comme la corneille qui attaque le rocher,
je me fatigue avec Gotama."

Comme il était emporté par le chagrin,
son luth tomba de sous son bras.
Alors lui, l'esprit découragé,
aussitôt
disparut.


1 commentaire:

Anonyme a dit…

merci pour ces commentaires et la traduction d'extrait : très utiles et instructifs, on désire en savoir plus et continuer la recherche.