jeudi 31 janvier 2008

Douleur et Méditation




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Remarques préalables :

J'ai déjà évoqué, à plusieurs reprises dans ce blog, le thème de la "douleur " pendant et après la méditation.

En observant la douleur, nous allons apprendre à la connaître mais surtout pas à la combattre.

Si nous méditons dans le but de faire disparaître la douleur nous avons perdu d'avance.

La douleur est un phénomène comme un autre, qui peut-être mental ou physique et à ce titre nous l'observons comme tous les autres phénomènes, qu'ils soient agréables, désagréables ou neutres.

L'observation doit conduire à la compréhension des phénomènes ou "objets" d'observation.

En observant la douleur, avec beaucoup de patience, grâce à
vipassana , on finira par voir ce qu'elle est réellement : la douleur est dukkha, anatta et anicca

1- La douleur est dukkha:
Elle provoque de la souffrance, de l'insatisfaction ect..

2- La douleur est anatta:
Ce n'est pas "notre douleur", en ce sens qu'elle apparaît et disparaît sans notre intervention, elle ne nous appartient pas. Il ne suffit pas de dire: " je" ne veux pas avoir mal, pour ne plus avoir mal..

3- La douleur est anicca :
Elle est
impermanente : elle change d'endroit, elle est limitée à une certaine durée, elle varie d'intensité, elle disparaît puis reviens,

En observant la douleur de manière attentive nous verrons très clairement ces trois caractéristiques.


"Vouloir que la douleur disparaisse", c'est finalement la même chose, le même processus que; "vouloir qu'une sensation "agréable" apparaisse ou reste".
L'aversion et le désir c'est la même chose : désirer que quelque chose s'arrête ou désirer que quelque chose arrive c'est toujours du désir. Les deux sont causes de souffrance ( c'est la 2e
Noble Vérité)

La douleur ( physique et morale ) est au centre de l'enseignement du Bouddha, elle fait partie de la
Première Noble Vérité découverte par le Bouddha et qui est, plus largement : dukkha

Une fois de plus, nous voyons que tout est lié dans le Bouddhisme.


La méditation sans la douleur n'existe pas, et plus vous ressentez de la douleur, plus vous avez de chance de progresser car vous avez un objet d'observation "magnifique".
Je veux dire par là, que nous pouvons apprendre énormément de la douleur et que de cet "apprentissage", basé essentiellement sur son observation attentive peut naître la "claire compréhension".

Pour observer la douleur nous devons avoir de la compassion : si nous nous énervons contre elle, si nous éprouvons de l'aversion et de la peur, elle augmentera.
Nous devons alors observer cet état d'esprit, l'état d'esprit dans lequel nous sommes quand nous observons la douleur.


La douleur nous permet d'observer plusieurs choses : la douleur physique d'une part et les sensations corporelles qu'elle provoque, mais aussi notre état d'esprit à son encontre, ce qu'elle provoque sur notre mental.

Lorsque vous éprouvez des douleurs durant la méditation au lieu de vous lamentez, réjouissez vous car vous allez pourvoir observer toutes ces choses.
Sinon observer au moins votre état d'esprit entrain de se lamenter..
Il y a toujours quelque chose à observer grâce à la douleur..

(Bien évidemment cela ne veut pas dire que si la douleur est liée à une maladie, nous ne devons pas la soigner)

Kathy



Ci après, des extraits d'un enseignement : "Le développement de la vision intérieure", donné par Achaan Naeb, nonne thaïlandaise née au début du siècle.






Achaan Naeb commence généralement par demander aux visiteurs de s'asseoir confortablement, puis de ne plus bouger. Bientôt, naturellement, l'un des visiteurs change de position. « Arrêtez, ne bougez pas. Pourquoi bougez-vous ? Attendez pour bouger. » L'enseignement d'Achaan Naeb s'adresse naturellement à la source de souffrance la plus évidente : notre corps. Si nous nous contentons de rester assis, en essayant de ne pas bouger, la douleur apparaît puis augmente, et nous voulons changer de position. La plupart des actions que nous accomplissons dans la journée se déroulent selon le même schéma.
Jack Kornfield - Dharma Vivant


Être attentif à la douleur


Si le méditant est attentif à une position, celle-ci doit tôt ou tard devenir douloureuse.

Lorsque la douleur apparaît, il doit être attentif à la douleur sans tenter de la faire disparaître. Il en est de même en ce qui concerne l'attention portée à l'esprit qui vagabonde. Si nous nous concentrons sur la douleur pour supprimer la douleur, le désir s'installe et remplace l'attention à l'objet.

Le facteur mental correct pour la voie moyenne de l'équilibre mental est absent, car notre conscience est tournée vers un sentiment de plaisir ou d'aversion. Vouloir que la douleur disparaisse est encore une marque d'attachement. Et lorsque nous éprouvons un sentiment de déplaisir parce que la douleur n'a pas encore disparu, nous ressentons de l'aversion.

Si la douleur disparaît comme nous l'avions souhaité, nous voici encore davantage soumis à l'attachement, et telle n'est pas la bonne pratique : nous ne percevons pas l'objet « présent » puisque nous nous projetons dans le futur. Nous nous écartons alors de la voie moyenne.
Nous constatons qu'il n'est pas facile d'atteindre à l'équilibre de cette voie.

C'est pourquoi il est essentiel de comprendre dès le départ ce dont il s'agit. Nous devons réaliser que la vision intérieure ne dépend pas seulement de nos efforts ou de l'intensité de notre concentration, mais aussi de la justesse de la prise de conscience.

Si nous ne parvenons pas à ce type de prise de conscience, quels que soient nos efforts de concentration, nous ne parviendrons pas à la sagesse. (...) Si vous avez la juste perception et la juste compréhension, vous pouvez méditer en tous lieux sur la « réalité présente » (ce qui existe indépendamment de nos désirs).


Réaliser la nature de la souffrance

Pourquoi devons-nous être attentifs à notre posture ? Pour pouvoir réaliser la nature de la souffrance. (...)

Lorsque nous changeons de position, si nous n'avons pas conscience du fait que la posture précédente était pénible, la nouvelle posture peut dissimuler la réalité de la souffrance.

Nous devons donc toujours être sur le qui-vive et utiliser notre sagesse pour comprendre la raison de ce changement de position. Si nous découvrons cette raison avant de changer, la nouvelle posture ne dissimulera pas la réalité de la douleur.

Si nous sommes toujours conscients de la posture, nous nous apercevons que la douleur n'apparaît qu'après un certain temps, et que ce n'est qu'à ce moment-là que nous souhaitons changer de position.

Lorsque nous souffrons dans une posture donnée, nous n'aimons pas cette posture, et lorsque nous n'aimons pas cette posture, parce qu'elle est inconfortable, tout désir de l'adopter disparaît. Lorsque le désir de l'adopter disparaît, il se peut que l'aversion vienne prendre la place du goût que nous éprouvions initialement pour elle. Lorsque l'aversion envahit l'esprit, le désir s'attache aussitôt à une nouvelle posture, parce qu'elle paraît confortable.

Nous constatons donc qu'il y a de l'attachement ou de l'aversion attachés à toutes les positions. Cependant, la plupart du temps, le méditant ne reconnaît pas cela. Pour être conscient d'une position, il doit comprendre que, avant d'en changer, il doit savoir à tout moment la raison pour laquelle il doit procéder à ce changement. Si nous ne connaissons pas la cause de ce changement, nous ne pouvons pas reconnaître la douleur en tant que douleur.


Souffrance et impermanence

Envisageons maintenant la question sous un autre angle.

Est-il possible d'adopter une position et de ne jamais en changer ? Naturellement, la réponse est non. Même si nous ne voulons pas en changer, nous y sommes obligés.

Auparavant, nous disions que nous nous asseyions parce que nous voulions nous asseoir, ou nous nous tenions debout parce que nous voulions être debouts. Mais pouvons-nous dire maintenant que nous voulons changer de position parce que tel est notre souhait ? Nous pouvons dire maintenant que nous changeons de position à cause de la douleur, parce que nous sommes mal à l'aise. (...)

Nous devons maintenant comprendre pleinement les raisons pour lesquelles nous sommes contraints à changer de position. Est-ce uniquement à cause de la douleur ? Si nous répondons que nous changeons pour nous sentir plus à l'aise, cette réponse est fausse, car elle fait appel à une distorsion de l'idée de bonheur.

La réponse juste est que nous bougeons pour éliminer la douleur, et non pour être heureux. Et si nous ne comprenons pas bien pourquoi nous changeons de position, les états mentaux négatifs se manifestent immédiatement.

Si les changements de position sont destinés à éliminer la douleur, cela revient à dire que nous devons sans cesse remédier à une situation mauvaise. C'est comme si nous devions prendre des médicaments en permanence. Comme si nous étions en train de soigner une maladie. Or nous ne considérons pas comme le bonheur le fait de se soigner.

Il est facile de constater la douleur dans une posture que nous tenons depuis un certain temps, mais cela devient plus difficile dans la nouvelle posture adoptée. Mais la sagesse nous permet de le faire. Sans la sagesse, le désir se manifeste sans cesse.

C'est pourquoi nous devons être capables de reconnaître la souffrance dans la nouvelle posture. Comment ? En réalisant que nous avons changé de posture à cause de la douleur, nous sommes forcés de comprendre que la douleur est présente dans toutes les postures.

Etre assis devient douloureux, se tenir debout devient douloureux, et c'est pourquoi nous changeons.

Toutes les postures deviennent douloureuses à un moment donné, et c'est pourquoi nous changeons. (...) Nous comprenons alors que ce que nous appelons le bonheur finit toujours pas disparaître. La sagesse est ce qui permet de comprendre que la douleur est inhérente à toutes les formations de l'esprit et de la matière.
(...)

Pour information : La version intégrale de cet enseignement de Achaan Naeb, a été publié dans le livre de Jack Kornfield « Dharma vivant »

  •  Lire la version intégrale : "Le développement de la vision intérieure" sur Vivre le dhamma : ICI

2 commentaires:

Moutassem a dit…

Merci Kathy pour cet enrichissant article sur la douleur durant la méditation. Il m'arrive parfois de ressentir une brûlure entres les omoplates. Si j'essaie de la 'fuir' je sens que je ne respire plus. Alors que lorsque je me cale dans le ressenti, la respiration s'approfondit et la douleur diminue.

Unknown a dit…

Pour le moment je souffre énormément du dos et j'essaie de lâcher prise, difficile