mercredi 5 septembre 2007

Savoir observer et accepter la douleur et les sensations désagréables



Vous trouverez ci après :


1) des Extraits de l'Enseignement du Vénérable U Pannathami , à propos des sensations désagréables
Enseignement donné au cours de la retraite intensive vipassana de juin 2007.
Récit de la retraite

2) Expérience personnelle de l'observation de la douleur

3) Stratégie pour gèrer la douleur par Sayadaw U Pandita ( extraits de son livre "Dans cette même vie"

4) La concentration

5) La seconde flèche

6) Autres messages de ce blog sur la douleur




1) Extraits de l'Enseignement ou "dhamma talk" du Vénérable U Pannathami

En posture assise, le méditant va commencer par expérimenter les sensations désagréables. Plus il sera attentif, plus il verra ces sensations clairement. Il verra des torsions, des pulsions, des picotements.

Si on ne pratique pas vipassaná, on recherche le confort et si une sensation désagréable se manifeste, on change de posture sans être attentif. Ceci veut dire qu'on ne comprend rien, qu'on ne sait rien de la nature des sensations.

Lorsque l'on pratique en posture assise, pour comprendre la véritable nature des sensations, on doit rester immobile car si on bouge souvent, on ne peut pas développer l'attention.
Sans attention, la concentration ne va pas s'approfondir. Sans concentration, vous ne verrez pas les choses telles qu'elles sont réellement.

C'est pour cela qu'en posture assise, on doit maintenir le dos bien droit et avoir les jambes croisées, sans changer de position, alors tôt ou tard, les sensations désagréables vont
se manifester.
Vous ressentirez de la fatigue dans le dos parce que vous n'avez pas l'habitude de rester assis dans cette posture sans bouger, pendant une heure.
Vous aurez également des douleurs dans la région des fesses, des chevilles, des jambes.
Vous ressentirez à tous les points de contact de la dureté.
Tout cela ce sont des sensations douloureuses.

Au début de la séance, ces sensations ne sont pas très claires, vous ne les sentirez même pas, c'est pourquoi vous choisissez d'observer les mouvements de soulèvements et d'abaissement de l'abdomen comme objet primaire.

Mais, dès que ces sensations douloureuses vont s'intensifier et devenir claire, vous devez les prendre comme objets primaires d'attention et abandonner l'abdomen.

Vous aurez besoin de beaucoup d'énergie mentale pour faire face à la douleur. Vous devrez l'observer attentivement et le plus longtemps possible. Lorsqu'elle va devenir très forte, il est même possible que vous capituliez et que vous changiez de position sans attention. Vous ne vous êtes pas montré suffisamment patient.

C'est pour cette raison qu'on recommande toujours aux méditants de faire preuve de patience, vis-à-vis de la sensation désagréable. Si vous avez de la détermination, vous arriverez tôt ou tard à surmonter la sensation désagréable.

Si vous arrivez à rester immobile pendant une heure, malgré les sensations désagréables, la confiance va commencer à apparaître en vous. Vous vous direz : « je pensais que je ne pourrais jamais y arriver, mais pourtant j'y suis arrivé ». À la séance suivante, la sensation douloureuse ne vous affectera plus autant. Vous commencez à vous familiariser avec elle.

Au début, vous ressentez une sensation douloureuse, sans plus. Mais lorsque vous devenez capable de maintenir votre attention, vous allez voir que la douleur peut se transformer
en une autre sensation; en chaleur, en picotement, en dureté, et cela change de place. Et si vous êtes très courageux et que vous observez avec beaucoup d'attention, vous pourrez voir de plus en plus de sensations douloureuses différentes les unes des autres.

Pourquoi êtes-vous devenu capable de voir tout cela ; parce que vous observez très attentivement la sensation douloureuse.

Comprendre la nature des sensations cela ne veut pas dire qu'il faille qu'elles disparaissent. Qu'elles disparaissent ou qu'elles ne disparaissent pas n'a pas beaucoup d'importance. Le Bouddha nous dit : ce corps est souffrance; et vous le réalisez maintenant, directement par vous-même, dans votre propre corps. Ceci c'est la sagesse.Ce qui est important c'est de comprendre la nature, et vous avez dorénavant une certaine compréhension de la nature des sensations douloureuses.

C'est cela le bénéfice que l'on obtient, par l'observation attentive des sensations douloureuses.

Si vous avez une bonne concentration, vous allez apprécier ce type de sensations, vous allez même aimer avoir des sensations douloureuses, parce qu'elles vous permettent d'avoir une bonne méditation.

Lorsque l'esprit sera capable d'une forte attention et d'une forte concentration, même si il est assis sans coussin, à même le sol, le méditant se sentira très à l'aise et très confortablement installé. Il ne sera même pas à quel endroit se manifeste la sensation douloureuse. Il ressentira la sensation douloureuse à l'état pur.

Nous devons comprendre que nous sommes des puthujjana; des êtres ordinaires, des êtres non illuminés. Nous avons encore en nous lobha (l'avidité) et nos esprits sont confus. Nous avons des vues fausses. Mais si nous pratiquons la méditation vipassaná de façon assidue, comme je l'ai expliqué, en pratiquant les quatre établissements de l'attention, nous allons être capable
d'observer les sensations à l'état pur. Nous aurons alors, dépasser les concepts.

En revanche, si nous ne pratiquons pas ainsi, lorsque nous ressentirons une sensation
douloureuse nous allons réagir en nous disant, par exemple :
« J'ai si mal au dos » ou : « mon genoux me fait mal », nous n'aurons alors pas encore réussi à éliminer le concept. Le concept c'est la forme, comme : le dos, la main, la jambe, cette personne, moi, lui.

Donc, si vous arrivez à observer la douleur avec attention, vous aurez laissé de côté la forme et vous expérimenterez simplement une sensation, vous aurez surmonté le concept.
Vous comprendrez alors les paroles du Bouddha.

Le Bouddha a parlé de la Noble vérité de dukkha. Il a dit que l'attachement aux cinq agrégats est souffrance. À moins d'avoir atteint l'état d'arahanta (libre de tout attachement et de toute souffrance), il n'est pas possible de ne pas avoir d'attachement pour le corps et l'esprit.
Les êtres ordinaires sont très attachés à leur corps et à leur esprit.

En posture assise, suivre les mouvements de soulèvement et d'abaissement de l'abdomen, c'est rúpa khandhá (l'agrégat ou groupe de la matière). Le fait de noter les mouvements de l'abdomen, c'est viññána khandhá (le groupe de la conscience).
Les êtres ordinaires ; les puthujjana sont attachés aux cinq khandhá (agrégats).

Lorsque vous pratiquez vipassaná, vous devez être patient et faire de puissants efforts. Mais si vous êtes très sensible à la douleur, si vous avez peur d'avoir mal, vous ne pourrez pas facilement rester assis immobile. Votre esprit sera très
agité parce que vous avez peur.

Les douleurs vous apparaissent alors plus fortes qu'elles ne le sont en réalité.
Mais vous voulez comprendre le dhamma, vous voulez progresser dans votre méditation. Vous devez donc écouter et suivre les recommandations du Bouddha. Il nous demande de faire preuve de patience, sans patience, il est impossible de progresser.

Lorsque la douleur va se manifester, il faut l'observer attentivement il ne faut pas changer de posture et essayer de rester calme. Si vous arrivez à faire cela, tôt ou
tard vous comprendrez la nature des sensations désagréables. Même si la douleur ne disparaît pas au moment où vous l'observez, vous aurez compris sa nature.

La nature de la sensation désagréable c'est d'augmenter d'intensité, puis de diminuer d'intensité. Parfois, elle fini par disparaître.

Mais pour voir que la sensation désagréable disparaître, il faut que l'attention soit déjà très développée.
Ceci n'est pas possible au début. Parfois vous verrez que cette sensation désagréable change de place, qu'elle se transforme. Plus votre attention est développée, plus vous comprenez la nature de la sensation douloureuse: c'est la
compréhension.

s'il y a des douleurs qui se manifestent en vous, cela va affecter votre esprit. Vous essayez de ne pas bouger, de ne pas changer de posture. Vous observez attentivement cette sensation douloureuse, mais petit à petit la colère s'infiltre dans votre esprit, le mécontentement, le ressentiment.

Il y a toutes sortes de choses qui peuvent se manifester dans votre esprit à cause de cette sensation désagréable, surtout lorsqu'elle s'intensifie. Vous devez alors prendre cet état
d'esprit comme objet d'attention, vous devez l'observer ; puisque le principe de base de vipassaná, c'est d'observer tout ce qui se manifeste dans le corps et dans l'esprit.

Vous devez observer les états d'esprit qui apparaissent à cause de cette sensation douloureuse,
comme: l'inquiétude, la colère, le mécontentement. Alors vous les verrez s'atténuer progressivement et peut être même disparaître selon le degré d'intensité de votre attention.

La douleur va peut-être également disparaître et vous pourrez alors expérimenter la disparition de la douleur. Si vous réussissez à voir disparaître la sensation désagréable, la joie va se manifester en vous.

Les yogis qui ont réussi à observer la douleur avec beaucoup d'attention et qui ont réussi à la surmonter expérimentent un confort et un bonheur indescriptibles. « C'est incroyable » se disent ils. Ils ont expérimenté la disparition de la sensation douloureuse grâce à leur attention. Ils se sentent alors très à l'aise lorsqu'ils méditent. La posture est très confortable. Le confort qu'ils expérimentent après avoir surmonté la sensation désagréable est très agréable. Ils sont très calmes et très paisibles et ils ne désirent plus arrêter leur pratique.

Un yogi qui a réussi grâce à son attention, à surmonter les sensations douloureuses, va réussir à voir très clairement tout ce qui se passe en lui. Il va se souvenir plus facilement de certaines choses et il n'observera pas qu'une seule sensation, il sera capable d'observer des sensations dans le corps tout tout entier et dans son esprit. Tout cela parce que son attention est devenue très forte. Il a réussi à surmonter les douleurs, les engourdissements et il sait comment gérer ces sensations désagréables.

Dorénavant il se dit que la douleur est son amie. Il n'en a plus peur tout simplement parce qu'il a réussi à lacomprendre.

Mais le yogi n'aura qu'une seule chose en tête à la séance suivante : retrouver la même qualité de méditation. Mais les douleurs vont probablement revenir, alors il est déçu.

Essayez de ne rien espérer, de ne rien rechercher, de ne rien attendre. Mais cet état d'esprit est très difficile à maintenir en général. Si cet état d'esprit se manifeste en vous, vous
devez immédiatement l'observer. Le yogi doit observer tout ce qui se manifeste en lui.

Les yogis qui pratiquent de façon assidue et qui observent et notent les sensations douloureuses de manière attentive, vont réussir à surmonter toutes les difficultés.

On pourrait penser que la pratique des quatre établissements de l'attention est quelque chose de facile. Mais dès que nous aurons compris de quoi il s'agit réellement, nous ne penserons plus de la même façon.
Une fois que nous pratiquons réellement nous pouvons constater que c'est très difficile.
Le méditant a tant de douleur qu'il voudrait arrêter....

Le méditant qui a réussi à surmonter ces difficultés, va commencer à ressentir des sensations
agréables lorsqu'il sera en posture assise. Il expérimentera alors sukha vedaná (sensation de bonheur).....




2) Expérience personnelle

Lorsque j'ai rencontré le dhamma et commencé la pratique , je souffrais depuis des années d'une hernie discale cervicale. La douleur était si forte que je n'arrivais plus à dormir.

En 1999 j'ai déjà été opérée d'une hernie discale lombaire, il s'agissait donc pour moi d'une deuxième opération du rachis, mais cervicale cette fois.

Une opération avait été fixée et je me disais que cette opération et l'arrêt de travail qui s'en suivrait me permettrait d'avoir plus de temps pour la pratique.

Je me rendais régulièrement à des sessions d'étude et méditation dans la tradition de l'école de la Forêt, mais également à des sessions
vipassana dans la tradition Mahasi.

J'effectuais des retraites vipassana de 2 jours seulement, à cause de la douleur.

Chez moi je méditais quotidiennement 2 heures le matin très tôt et 1 heure le soir.

Puis, j'ai commencé à observer ma douleur : une douleur fulgurante à la base du cou et dans tout le bras (douleur classique de la hernie discale cervicale).
Au début, Cette douleur s'intensifiait, dés que je l'observais et c'était intenable.

Je ne pouvais pas m'assoir en lotus alors je prenais une chaise et les jours où la douleur était trop forte, je méditais en position allongée.

Je ne sais toujours pas pourquoi mais progressivement la douleur s'est atténuée pour disparaître complètement, de telle sorte que l'opération a été annulée.

Il n'y a rien de miraculeux et c'est sans doute liée au fait que j'ai dû, relâcher toutes mes tensions, durant la méditation, même si le but de la méditation n'est en aucun cas la relaxation.


Tout ça pour dire que
l'observation de la douleur peut avoir, parfois, des effets bénéfiques.



Extrait de mon
Récit 2e jour:

J'ai rencontré trois sortes de douleurs durant la méditation assise:

1-Les douleurs dites méditatives, qui sont liées à la position (on est pas habitué à rester en demi lotus ou jambes croisées, pendant 1 heure), ce sont les plus nombreuses, mais les plus faciles à observer et à noter. Une fois la méditation assise terminée il peut rester quelques " courbatures", mais c'est très supportable.

2-Les anciennes douleurs (qui sont liées à des maladies ou handicaps anciens ou même très anciens). Ces anciennes douleurs reviennent à votre conscience. Elles cessent dès que la méditation assise est terminée.

3-Les douleurs liées à des maladies ou handicaps actuels: Et bien curieusement, je n'ai pratiquement pas ressenti de douleur liées à des maladies actuelles comme mon hernie discale cervicale.

J'ai pu observer de manière très claire la peur et l'inquiétude qui accompagnent souvent les douleurs. La peur et l'inquiétude augmentent considérablement la sensation de douleur



Extraits de mon
Récit 5e jour:

Maintenant j’arrive à ACCUEILLIR de manière calme, les sensations désagréables (de toute manière ce serait peine perdue de vouloir les fuir ,) et le bruit qui me gênait au début fait partie de ma méditation.
Il m’arrive d’avoir une sensation de bonheur intense , de paix intérieure mais qui ne dure pas : tout est "impermament", je peux le voir par moi même.

C’est à partir du cinquième jour que sont venues s'ajouter, en plus des douleurs dites "méditatives”, des douleurs provenant d'anciennes maladies ou traumatismes.

Pour les douleurs liées à la position assise (donc douleurs dites "méditatives"), je commence à les observer de manière plus détachée : Certaines douleurs sont des « engourdissements », d’autres des « crampes » ou encore des « fourmillements ». Je fais bien la différence entre les différentes douleurs.
J'essaie de porter toute mon attention sur le centre de la douleur, d'observer son étendue, sa forme. Parfois j’observe de la chaleur, d’autres fois je peux observer clairement que la douleur augmente ou diminue. Mais je n'ai pas encore réussi à voir la douleur disparaître au moment où je l’observe et la note.
Toutefois, il m'est arrivé de réaliser que la douleur a changé de place et d'intensité, mais je n'ai pas encore réussi à observer le changement, au moment même où il se produit.

J'observe aussi mon état d'esprit par rapport à la douleur. La douleur peut provoquer de la peur, de l'angoisse ou de l'inquiétude. J’observe alors la douleur physique (objet physique) mais également mon état d’esprit. (objet mental). Et si en plus d’observer, je note, j’observe mon esprit qui note (objet mental). Il y a alors trois objets observés : la douleur, l’état d’esprit et l’esprit qui note.

Lorsqu'une douleur est observée de manière attentive, ce n'est plus qu'une douleur, qu'un objet physique à observer parmi d'autres. Mais, à partir du moment où l'observation cesse ou devient superficielle, la douleur reprend le dessus.
Parfois je réalise que mon observation est devenue superficielle et cela devient un nouvel objet à observer. Je m’observe entrain d’observer de manière trop superficielle. C’est incroyable le nombre d’objets que l’on peut observer lorsque l’on est attentif. Cette observation devient alors une véritable souffrance et vous réalisez, une fois de plus, que le bouddha a raison lorsqu’il dit que le corps est dukkha.



Extraits de mon
récit 8,9 et 10e jours:

La douleur est devenue, au fil des jours, un objet très présent. Si les premiers jours, elle n’apparaissait que vers la fin, depuis quelques jours la douleur apparaît très peu de temps après le début de l’assise, parfois elle est même présente dès le début de l’assise.

La douleur n’a pas changé, c’est mon attitude à son encontre qui a changé. Au lieu d’en avoir peur, je la considère comme quelque chose de bénéfique car je sais que grâce à elle, je vais progresser dans la compréhension de sa vraie nature.

Je pense avoir commencé à observer que la douleur change non seulement d’intensité, mais de place, tout comme les démangeaisons.

Lors d’un entretien avec le Vénérable, j’ai expliqué que parfois, les démangeaisons changeaient si rapidement d’endroit, que je n’avais pas le temps d’observer l’envie de gratter et, effectivement, l’envie de gratter avait disparu, il ne restait que la démangeaison. Or, la démangeaison sans l’envie de gratter devient presque agréable, c’est l’envie de gratter qui est pénible, pas la démangeaison elle-même . J’avais alors l’impression que c’est le souffle du vent qui parcourait tout mon corps.

Avec la douleur c’est pareil, parfois il n’y a que la douleur, d’autrefois il y a la douleur plus l’envie qu’elle cesse (par exemple), ce qui fait deux objets à observer : un objet physique et un objet mental.

Quand la douleur est trop forte, j’expire mentalement au centre de la douleur : ainsi si la douleur est située dans le bas du dos, j’expire mentalement dans le bas du dos et j’observe cela sans faire de note mentale. Je ressens alors comme un souffle d’air froid à l’endroit exact où j’ai expiré mentalement, ce qui me permet de me relaxer, de me détendre pour mieux observer la douleur. C’est une technique empruntée à la relaxation, mais parfois il est utile d’arriver à se détendre, à se calmer pour être mieux à même d’observer les phénomènes.

Une autre attitude lorsque la douleur devient trop intense, je reviens à l’observation de l’abdomen.

Il m’est arrivé, au cours de ces derniers jours, d’observer la douleur comme si elle ne faisait plus partie de mon corps, c’est l’impression que j’avais lorsque je n’observais que la douleur physique sans la présence de la peur ou de l’envie que ça s’arrête.
Une fois de plus je ne trouve pas les mots pour décrire ce que j’ai observé à propos de la douleur.

Et puis chaque yogi ressent les choses différemment.

J’ai donc pu observer que la douleur varie d’intensité qu’elle n’est jamais constante, parfois on peut observer clairement ces changements d’autre fois moins. Lorsque la douleur change de place, c’est si rapide qu’on ne sait pas trop ce que l’on a vraiment expérimenté, c’est une impression étrange.


Mais attention tout de même de ne pas aller trop loin, je veux dire par là, qu'il vaut mieux méditer moins longtemps plutôt que de souffrir inutilement à cause de la position assise.

Personnellement ce n'est pas la méditation en elle même qui m'a fait souffrir, ce sont mes douleurs liées à mon hernie. Mais comme j'avais mal tout le temps, je n'avais pas "plus" mal durant les assises, simplement je voyais la douleur différemment.

En revanche, vouloir rester assis en lotus ou semi-lotus, alors que la position devient insupportable ne sert à rien. Ne pas bouger pour des petites douleurs, OK, mais si les douleurs deviennent insupportables, penser à vous lever tout doucement en étant attentif à vos moindres gestes.
D'où l'intérêt de la marche méditative entre deux assises.

La méditation ne doit pas devenir "souffrance", il faut savoir prendre soin de soi, éprouver de la compassion pour soi-même. On ne doit pas se faire violence.
Ici encore c'est une question d'équilibre.


Afin de faire la balance entre ce qui est supportable et ce qui ne l'est pas, je vous conseille de lire un article sur "
Méditation et douleur"à propos notamment du Zen : ICI
dont voici quelques extraits :


S'il est vrai que la douleur modifie notre rapport au monde - on pourrait la qualifier de soustraction, soustraction à son être, aux perceptions - elle ne peut conduire à l'état de samâdhi. Je parle bien entendu d'une douleur totale, envahissante, non les simples crampes qu'on ressent parfois. La confusion psycho-corporelle (qu'est-ce que le temps, qu'est-ce l'espace pour l'homme souffrant ?) qu'induit un corps douloureux va à l'encontre d'un état de tranquillité et d'apaisement. La méditation nous introduit à un nouveau rapport avec nous-même, essentiellement non-violent. La douleur, au contraire, est toute entière faite de violence. Violence contre soi, violence contre autrui. Dans de nombreux centres, elle est en fait le signe d'une contrainte, celle de la soumission au groupe. Une contrainte qu'on s'inflige mais surtout, puisqu'elle est consentie, que le groupe inflige. Elle implique le méditant dans une relation interactive. La douleur n'est pas juste une sensation, elle est avant tout signification. Ce point est rarement élucidé. Marquant la chair, la douleur matérialise l'appartenance des corps....

... N'oublions pas que la douleur n'est pas qu'une simple réaction physiologique. Les perceptions, les réactions, les manifestations de la douleur vont se modifier selon l'histoire personnelle, relationnelle et culturelle. "Même si le seuil de sensibilité est proche pour l'ensemble des sociétés humaines, le seuil dolorifère auquel réagit l'individu et l'attitude qu'il adopte dès lors sont liés essentiellement au tissu social et culturel.". A ma connaissance, il n'existe pas d'étude comparée sur le vécu méditatif des orientaux et des occidentaux mais on peut supposer que l'acuité, l'appréciation et l'intégration de la douleur dans un contexte japonais est largement différent du notre..

.... Ce qui ne veut pas dire qu'il faille arrêter de méditer à la moindre crampe, il s'agit plutôt d'apprendre à gérer ses difficultés. L'effort nécessaire doit trouver son juste milieu.







3) Stratégie pour gèrer la douleur, par U Pandita

La vision pénétrante de la véritable nature des phénomènes dépend directement du niveau de
concentration que nous aurons réussi à développer.
Plus l'esprit est concentré, plus il pénètre et comprend la réalité.

Ceci est particulièrement vrai lorsqu'il s'agit de sensations douloureuses. Si la concentration est faible, l'inconfort qui est toujours présent en nous ne sera pas très clairement ressenti.
Mais lorsque la concentration commence à s'approfondir, la moindre petite sensation physique d'inconfort devient très claire comme si elle était agrandie, accentuée.

On pourrait dire, que les êtres humains souffrent bien souvent de myopie.

Avec les lunettes de la concentration le monde qui apparaissait flou ou brumeux et indistinct devient clair et précis. Ce ne sont pas les objets qui ont changé mais plutôt l'acuité de la vision. Lorsque vous regardez une goutte d'eau à l'oeil nu, vous ne voyez pas grand chose, mais si vous mettez un échantillon de cette eau sous un microscope, vous pourrez voir toutes sortes de choses..

Si au cours de votre méditation vous réussissez à mettre les lunettes de la concentration vous
serez surpris de voir comme les choses changent; ce qui vous apparaissait comme une sensation douloureuse solide et inintéressante va commencer à vous captiver.

Plus la concentration s'approfondit, mieux vous comprenez la douleur.Votre enthousiasme va encore grandir car vous verrez de plus en plus clairement que ces sensations douloureuses sont en état de flux permanent....





4) La concentration


...Le but principal de la méditation Vipassana consiste à surmonter les sensations désagréables. Lorsque le méditant y parvient, il a parcouru la moitié du chemin Vipassana.

Les méditants qui s’efforcent de surmonter les sensations douloureuses ont trois types d’attitude :

Ils pratiquent dans le but de faire disparaître les sensations désagréables
Ils adoptent une attitude agressive afin de se débarrasser de ces sensations désagréables
Ils méditent pour réaliser la nature intrinsèque des sensations désagréables

Si vous observez dans le but de faire disparaître les sensations désagréables, c’est parce que vous désirez être à l’aise et vous débarrasser de cette souffrance. Ce désir, c’est lobha, l’avidité. Mais si vous méditez, est-ce pour vous libérer de l’avidité ou pour l’accroître ?

Si vous adoptez cette attitude qui consiste à vouloir faire disparaître les sensations désagréables, lobha, l’impureté va surgir et chaque moment d’attention contiendra une impureté. Vous n’obtiendrez pas la vision pénétrante et vos progrès seront lents. Vous ne devez donc pas adopter cette attitude qui consiste à observer les sensations douloureuses dans le but de vous en débarrasser.

Le méditant qui adopte une attitude agressive, souhaitant se débarrasser des sensations désagréables a une attitude de haine, et s’il n’y parvient pas, le mécontentement et la colère se manifesteront. Si vous méditez, est-ce pour diminuer la colère et la haine ou pour les augmenter ? Vous méditez dans le but de les éradiquer et cette attitude rendra impossible le développement de la sagesse. Vous ne progresserez que très lentement. Cette attitude n’est pas non plus recommandée.

L’attitude correcte consiste à observer dans le but de comprendre la nature intrinsèque de la sensation douloureuse. Ce n’est qu’en percevant la nature intrinsèque des sensations qu’il est possible de voir les apparitions et les disparitions des phénomènes. Ce n’est qu’en percevant les apparitions et les disparitions des phénomènes qu’il est possible de voir anicca, l’impermanence, dukkha, la souffrance et anatta, le caractère incontrôlable des phénomènes. Et enfin, ce n’est qu’en percevant anicca, dukkha et anatta, qu’il est possible d’atteindre les réalisations les plus élevées.

Voilà pourquoi, lorsque vous observez les sensations désagréables, vous devez chercher à percevoir leur nature intrinsèque. Pour y parvenir, il faudra tout d’abord être patient. La patience est fondamentale, sans elle, il est impossible d’atteindre nibbana. Lorsque vous pratiquez Vipassana, essayez de rester calme. Votre seul devoir, c’est d’observer. Telle est l’attitude que vous devez adopter.

Lorsque la douleur s’intensifie, le méditant à tendance à se contracter. Il se tend à la fois physiquement et mentalement. Il ne faut pas laisser ceci se produire. Vous devez essayer de vous détendre un peu et porter votre attention sur la douleur; essayez de l’observer avec précision tout en cherchant à savoir à quel endroit précis elle se localise : est-ce au niveau de la peau ou est-ce dans la chair, est-ce plus profondément dans les os ?
Comment se manifeste-t-elle, quelle est son étendue ? Analysez tout cela tout en notant deux ou trois fois: « douleur ». Lorsque vous pourrez maintenir votre attention sur la sensation douloureuse et en analyser l’étendue, votre concentration aura atteint le niveau nécessaire pour réaliser la véritable nature de la sensation.

L’observation ne doit être ni superficielle ni trop rapide mais pénétrante de façon à en voir la nature changeante. Si vous maintenez votre observation, vous verrez peut-être la douleur atteindre un paroxysme pour ensuite commencer à diminuer d’intensité.

Le méditant qui poursuit sa pratique va encore approfondir sa concentration, et lorsqu’il notera la douleur, elle disparaîtra. La sensation désagréable sera surmontée par la conscience attentive. L’esprit ne sera plus perturbé. Vous aurez réussi à éliminer la tendance à l’aversion.

L’esprit est difficile à contrôler, il se pose où il veut et ne connaît aucune frontière. Il est possible de se rendre mentalement n’importe où. Il est possible de voyager en imagination et de nous rendre dans n’importe quel pays et personne ne peut nous en empêcher. Personne ne peut empêcher notre esprit de pénétrer dans son pays. Il n’existe aucune barrière qui puisse arrêter l’esprit.

La nature de l’esprit est d’apparaître et de disparaître très rapidement. A un moment, nous sommes heureux, l’instant d’après nous sommes tristes. Nous sommes joyeux maintenant, tout à l’heure, nous serons en colère. L’esprit réagit aux différents objets sensoriels et change rapidement. Il se pose où il veut. Il est difficile de le maintenir sur l’objet. Au début de la pratique, lorsque le méditant s’efforce de maintenir son attention, son esprit s’échappe constamment, il vagabonde ici et là. Il se retrouve parfois au supermarché, parfois au bureau, partout sauf là où il faut.

Il faut faire beaucoup d’efforts pour se concentrer. Nous devons nous motiver en pensant à la brièveté de la vie, à l’opportunité que nous avons de nous trouver dans le plan humain, ce qui est précieux et très rare et de la chance d’avoir accès aux enseignements du Bouddha. Nous devons méditer avec effort pour atteindre le Dhamma dans cette vie même. Sinon, nous pourrions reprendre naissance dans les mondes inférieurs où la souffrance domine et où les gens pleurent de désespoir et de remords.

En étant attentifs, nous nous protégeons des impuretés mentales -les kilesas- nous créons beaucoup mérites -de kusalas- que nous emporterons avec nous, et nous nous libérons de la souffrance.
source : vipassanasangha
Pour écouter ce texte sur la concentration, en entier au format MP3: ICI



5) La seconde flèche


Tout d'abord commençons par une histoire de la mythologie se rapportant à un homme qui volait et ensuite torturait ses victimes. Il les allongeait sur un lit et si la personne était trop petite, il tirait sur ses jambes jusqu'à ce que ses pieds arrivent au niveau des pieds du lit, et si la personne était trop grande, il coupait ce qui dépassait. La chance pour les victimes d'être à la bonne taille était très mince.

Ce mythe a un sens très profond. En fait, nous faisons comme cet homme dans la vie. Nous avons, nous aussi, des attentes très précises pour nous-mêmes et dans nos relations. Nous nous torturons nous-mêmes quand les choses ne correspondent pas à nos attentes.

Nous aimerions par exemple être heureux, ne jamais nous mettre en colère, mais ce n'est pas la réalité, car parfois nous sommes malheureux, parfois nous sommes en colère, parfois nous ne nous acceptons pas et parfois nous n'acceptons pas les autres. Nous sommes en fait rigides dans nos attentes.

Le Bouddha raconte également l'histoire d'un homme qui reçoit une flèche et ressent de la tristesse et de la colère parce qu'il a reçu cette flèche. Par conséquent, il ressent deux douleurs : une douleur physique et une douleur mentale. C'est comme si l'homme avait reçu une première flèche et immédiatement après une seconde flèche. Il éprouve la douleur de deux flèches.

De la même façon, nous nous torturons quand nous n'acceptons pas ce qui arrive ou que nous n'acceptons pas les autres. La seconde flèche atteint un endroit déjà blessé par la première flèche, ce qui augmente la douleur car lorsque l'on est touché au même endroit c'est pire.

La seconde flèche est quand on condamne ou qu'on juge. En fait, nous refusons tout simplement d'accepter la première flèche. Nous nous posons en victimes et nous lançons nous-mêmes la seconde flèche.

La rigidité par rapport à nos attentes engendre des désirs spécifiques et très précis. Nous désirons la réussite ou la reconnaissance, et nous nous torturons nous-mêmes. Nous nous créons des attentes et nous tentons de les réaliser. Mais il y aura inévitablement des échecs entraînant des tourments et de la peine.

Ceci n'est pas accepter les circonstances avec sagesse, car au lieu de regarder ce qui nous arrive objectivement, nous remuons le couteau dans la plaie.

Nous ne savons pas comment faire face aux blessures. En fait, il faut simplement observer les faits, regarder la réalité et non pas nos désirs.

Le Bouddha complète son histoire au sujet des deux flèches en imaginant que la personne ne reçoit pas la seconde flèche. Elle est touchée par une flèche et ne ressent aucune tristesse ou colère, elle ne se lamente pas. Elle ne souffre que d'une douleur : la douleur physique et non mentale.

Tout ceci se réfère à l'acceptation. C'est voir les choses telles qu'elles sont, sans rejeter, condamner, réagir. C'est seulement en acceptant que nous pouvons agir utilement.

L'acceptation n'est pas la passivité, c'est le point de départ de toute action sage. C'est comprendre que les choses sont comme ça, les reconnaître, ne pas se torturer à leur sujet, et de là, en tenant compte de la situation, l'action peut être juste. Nous pouvons agir efficacement et guérir notre souffrance et celle des autres. Nous ne rajoutons pas de la souffrance à celle qui existe déjà et nous laissons la paix se manifester.


Source : vipassanasangha
Ecouter ce texte au format MP3 : ICI



6) Autres messages de ce blog sur la douleur


  • La guérison du corps et du coeur : ICI
  • Douleur et Méditation : ICI


2 commentaires:

Anonyme a dit…

Bonsoir,

La souffrance fait partie de la vie. Mais il faut plus de courage pour la laisser s'exprimer... Mais quand on l'apprivoise, les bénéfices sont immenses.

Chaleureusement

Mireille
http://attitudezen.org

Catherine a dit…

merci d'être passé.