lundi 31 décembre 2007

La position du Bouddhisme par rapport au racisme - Première partie





Ci après des extraits de : Le Bouddhisme et la question raciale par G. P. Malalasekera et K.N. Jayatilleke.

Ce texte a été publié par l’UNESCO



Présentation:
  • Les auteurs:
*K.N. Jayatilleke. est chargé de cours de philosophie à l’Université de Ceylan
il est l’auteur de nombreux articles et publications,

*
G. P. Malalasekera est doyen de la Faculté des études orientales et professeur de civilisation palie et bouddhiste à l’Université de Ceylan.
Il est l’auteur de plusieurs livres, notamment : Bouddhisme au Sri Lanka et Bouddhisme à Ceylan.
Il a également publié un «
Dictionnaire des noms propres Pali »
Les textes traduits dans "Les 28 Bouddhas" sont tirés principalement du dictionnaire des noms propres pali de G.P. Malalasekera.

  • Le texte:
Cette étude a pour objet (...) de montrer la contribution propre du bouddhisme à la compréhension et à la solution du problème racial.

Le premier chapitre, dont je n'ai pas copié d'extraits, donne un aperçu succinct des problèmes de la race et du racisme, et de la forme sous laquelle ils se sont posés en Inde avant le bouddhisme.

Le deuxième chapitre; objet du présent message; étudie la position du bouddhisme à l’égard des races, des préjugés raciaux et des problèmes connexes.

Le chapitre trois, fera l’objet d’un prochain message qui sera intitulé : "L’attitude du bouddhisme à l’égard du problème racial- Deuxième Partie"

Pour information, ce troisième chapitre contient un bref exposé historique des tentatives faites par le bouddhisme pour éliminer les barrières des races et des castes, et pour réconcilier les hommes, et rend compte des résultats qui ont pu être obtenus dans cette voie, par la douceur, la persuasion et l’exemple, sans jamais recourir à la force armée. ( objet de ce message) étudie la position du bouddhisme à l’égard des races, des préjugés raciaux et des problèmes connexes.



Extraits du Chapitre II :
LA CONCEPTION BOUDDHIQUE DE L’HOMME ET L’ATTITUDE DU BOUDDHISME A L’ÉGARD DU RACISME ET DES CASTES


L’homme n’est que l’un des êtres doués de sensibilité qui peuplent l’univers.

Pour l’École bouddhiste Theraväda, comme pour l’école Mahäyäna, l’homme n’est que l’un des êtres doués de sensibilité qui peuplent l’univers.(...)

Si l’on considère l’immensité de l’espace cosmique et le nombre infini des mondes, dont les mondes humains ne forment qu’une très petite partie, les questions raciales semblent vraiment insignifiantes.(...)

Réprimandant certains moines qui s’estimaient supérieurs aux autres parce qu’ils étaient plus réputés et plus riches, le Bouddha les comparait à des vers de terre nés et nourris dans le fumier, et qui s’estimeraient de ce fait supérieurs.

L’homme doit acquérir l’humilité

Dans une telle perspective cosmique, l’homme qui rampe à la surface de la terre en essayant d’y subsister doit au moins acquérir l’humilité.(...)

Au cours de notre évolution samsarique nous naissons des centaines de fois sous la forme d’animaux et nous n’atteignons que très rarement à l’existence humaine.

Dans l’ordre cosmique, la naissance sous la forme d’un être humain est un évènement rare. Les hommes ont donc le devoir de tirer le meilleur parti possible de cette précieuse existence humaine.

Ils ont la capacité de découvrir par eux mêmes les vérités les plus profondes concernant le cosmos.

Une personne y est parvenue : c’est le Bouddha, qui est à la fois le meilleur des hommes et le plus évolué de tous les êtres doués de sensibilité.(...)

(...)Ceux qui atteignent à ces sommets ne sont ni des prodiges de la nature ni les heureux élus de quelque divinité : Ce sont des hommes qui ont travaillé, au cours de nombreuses existences, à développer leur nature intellectuelle, morale et spirituelle. Ce qu’ils ont réalisé est à la portée de chacun. Et non seulement les hommes, mais tous les êtres doués de sensibilité - si inférieurs soient-ils - peuvent devenir des bouddhas car la nature d’un bouddha (bouddha-bhava) est toujours présente en eux, dit le Mahäyäna.(...)

Nul n’a le droit de mépriser ses semblables

Ne serait-ce que pour cette raison, nul n’a le droit de mépriser ses semblables car toutes les créatures sont soumises aux lois de l’existence et possèdent, au fond, la même nature et les mêmes possibilités, bien qu’elles se trouvent à des stades différents de développement et ne se développent pas toujours au même rythme.

(...) En prenant conscience à la fois de notre condition commune et des possibilités qui sont en nous, nous comprenons que chacun a le devoir d’aider ses semblables et que nul n’a de raison légitime de les mépriser.


1- L'unité Biologique de l'humanité et la réfutation du racisme


Pour montrer la valeur et la dignité de l’existence humaine, le bouddhisme met spécialement l’accent sur les occasions et les possibilités de perfectionnement qui s’offrent à l’homme.

L’humanité ne forme qu’une seule espèce.

Il souligne aussi l’unité de l’espèce humaine, qu’il différencie des règnes animal et végétal : dans les règnes animal et végétal, on peut distinguer diverses espèces, mais l’humanité ne forme qu’une seule espèce.

Ce point de vue se trouve confirmé de façon éclatante par les découvertes de la biologie moderne.

Le Bouddhisme s’oppose nettement à certaines théories du XVIII et du XIX siècle, d’après lesquelles les races humaines comme les espèces animales pourraient être classées en supérieures et inférieures et mine les fondements mêmes des doctrines racistes qui divisent les êtres humains en groupes plus ou moins isolés et considèrent que les diverses caractéristiques humaines sont entièrement déterminées par des facteurs génétiques.

Le passage ci-dessous est une critique de la théorie brahmanique des castes ; il montre incidemment que les brahmanes revendiquaient la supériorité pour des motifs d’ordre génétique.

« Nous avons une controverse au sujet des différences dues à la naissance, ô Gautama ! Bharadvaja dit qu’on est brahmane de naissance, et moi je -dis qu’on l’est par ses actes ; saclie cela, ô toi qui vois tout. »

« Nous sommes incapables de nous convaincre l’un l’autre ; aussi sommes-nous venus à toi, dont on célèbre la parfaite sagesse. - Je vais t’expliquer dans l‘ordre, ô Vasettha, dit Bhagavat, la répartition exacte des êtres vivants selon les espèces, car ces espèces sont innombrables. »

« Tu connais les herbes et les arbres ; bien qu’ils ne le manifestent pas, ils portent des signes distinctifs selon les espèces et leurs espèces sont innombrables. »

« Tu connais les vers, les papillons et les fourmis ; ils portent des signes distinctifs selon les espèces, et leurs espèces sont innombrables. »

« Tu connais les quadrupèdes, petits et grands ; ils portent des signes distinctifs selon les espèces, et leurs espèces sont innombrables ».

« Tu connais les serpents qui rampent sur la terre ; ils portent des signes distinctifs selon les espèces, et leurs espèces sont innombrables ».

(...)

« Chez ces espèces, les signes distinctifs de l’espèce abondent ; mais il n’y a pas de signes qui distinguent les espèces chez les hommes. Ni dans la chevelure, la tête, les oreilles, les yeux, la bouche, le nez, les lèvres ou le front. Ni dans le cou, les épaules, le ventre, le dos, les hanches, la poitrine, les organes génitaux féminins ou les relations sexuelles. Ni dans les mains, les pieds, les paumes, les ongles, les mollets, les cuisses, la couleur ou la voix, il n’existe de signes qui permettent de distinguer parmi les hommes des espèces ».

« Il existe des différences entre les autres êtres qui possèdent un corps mais, entre les hommes, les différences sont purement nominales ».

(...)

Ainsi donc, selon le Bouddha, on ne peut classer les hommes en différents genres ou espèces, comme on le fait pour les herbes, les arbres, les vers, les papillons, les poissons, les quadrupèdes, les oiseaux, etc.

Sur ce point, Gautama est d’accord avec la biologie moderne qui envisage que les Anthropidae sont représentés par un seul genre et par une seule espèce : l’homme.

Cette conclusion est d’autant plus remarquable que Gautama n’a pas été induit en erreur par l’accident de la couleur.

Le Bouddha montre ensuite que les distinctions faites entre les hommes ne répondent pas à des différences biologiques fondamentales, mais à des classifications conventionnelles.

Les distinctions fondées sur la couleur de la peau (uanna), la nature des cheveux (kesa), la forme de la tête (sisa) ou la forme du nez (nasa) n’ont rien d’absolu. On rejoint presque ainsi la position de la science moderne.(...)

Le bouddhisme s’accorde donc avec les enseignements de la biologie moderne, qui ont ruiné les doctrines racistes et démontré l’unité biologique de l’espèce humaine.

Lorsque le bouddhisme nous invite à traiter tous les hommes et toutes les femmes, quelle que soit leur race ou leur caste, comme s’ils étaient notre père, notre mène, notre frère ou notre soeur, comme les membres d‘une même famille, il proclame une vérité profonde et non un simple précepte moral.

(...)

Il existait cependant, à l’époque du Bouddha, des philosophies racistes et celles-ci sont critiquées dans les textes bouddhiques

Le Bouddha nie l’existence de types humains fixes, génétiquement déterminés. Il admet le libre arbitre et la capacité de l’homme à devenir moral ou immoral, heureux ou malheureux, à se transformer ou à dégénérer.


2- La dignité et l'égalité des hommes : Critique du Système des Castes


Le bouddhisme combat les préjugés et les discriminations de caste:

On voit que le bouddhisme admet l’unité biologique de l’espèce humaine et se refuse à reconnaître l’existence de groupes raciaux génétiquement différents.

Le bouddhisme combat les préjugés et les discriminations de caste en les ignorant dans la pratique et en ruinant leurs fondements théoriques à l’aide d’arguments rationnels.

Ci après ; les arguments scientifiques, moraux et religieux invoqués par le bouddhisme contre la théorie brahmanique des castes.

Arguments biologiques.

L’argument biologique essentiel est qu’il n’existe pas d’espèces humaines, comme il existe des espèces animales et végétales, et que l’humanité ne forme qu’une seule espèce.

L’Ambattha Sutta (Sermon sur Ambattha) montre que la notion de pureté de caste, si chère au coeur des brahmanes, n’est qu’un mythe.

Ambattha, un jeune brahmane, était si fier de sa haute naissance qu’il négligeait les règles de la courtoisie en parlant au Bouddha, qui n’était pas brahmane.

Le Bouddha lui répond en mettant en doute la pureté de ses origines : « Si l’on remontait à tes ancêtres paternels et maternels, lui dit-il, on s’apercevrait que l’un d’eux était l’enfant d’un jeune esclave sakya »


Arguments sociologiques.

Pour combattre les théories brahmanistes, on peut aussi rechercher la nature et les origines véritables de la société et des castes.

Dans la conception hindouiste, statique, de la société, le système traditionnel des quatre castes (prêtres, soldats et administrateurs, marchands et agriculteurs, serviteurs) est considéré non seulement comme absolu, fondamental et nécessaire à la société, mais encore comme voulu et institué par Dieu (Brahma).

Le bouddhisme primitif propose, au contraire, une conception dynamique, évolutive de la société. Le système des quatre castes n’est pas absolu.

Les textes bouddhiques insistent sur le fait que les brahmanes ne naissent pas autrement que les autres hommes. (...)

Le bouddhisme considère les castes comme des catégories professionnelles, d’origine historique, et attribue la persistance des préjugés et des discriminations de caste à l’influence des prêtres brahmanes.(...)

La théorie des castes, que les brahmanes essaient d’imposer à la société pour justifier et perpétuer les préjugés et les discriminations fondés sur la religion, est qualifiée à maintes reprises par les textes bouddhiques de pur instrument de propagande.(...)

Le bouddhisme défend contre le brahmanisme la cause de l’égalité sociale des hommes, en se fondant sur la structure effective de la société à cette époque.(...)

Contrairement aux brahmanes, qui cherchaient à faire de la religion un monopole, les bouddhistes forment une société idéale où tous les hommes, quelle que soit leur condition sociale ou leur naissance, sont libres d’entrer dans les ordres religieux et peuvent prétendre de ce fait aux mêmes honneurs.(...)

D'après le bouddhisme, tous les hommes, sans distinction de caste ou de race, ont des droits égaux et méritent de bénéficier de possibilités égales de développement, car ils appartiennent tous à la société humaine.(...)

La condition sociale de chacun est déterminée non par la caste ou la race, mais par la fortune - qui permet d’avoir des serviteurs de toute origine.
Tous doivent être égaux devant la loi.
Les aptitudes ne sont pas déterminées par la naissance. La valeur morale de chacun doit être reconnue par la société, sans distinction de caste. Tous les hommes doivent bénéficier de possibilités égales de développement moral et spirituel puisque tous sont susceptibles d‘un tel développement.

C’est en ces termes que le bouddhisme proclame l’égalité de tous les hommes en tant que membres de la société humaine.(...)


Les arguments ethniques et religieux.

Comme nous l’avons vu, le bouddhisme invoque les faits historiques pour contester aux brahmanes toute prérogative spéciale en matière de religion. Il démontre que les brahmanes ne sont pas, comme ils le prétendent, les enfants élus de Dieu et les seuls susceptibles d’être sauvés - car les gens de toutes castes, s’ils en trouvent la possibilité, peuvent atteindre à la perfection spirituelle et faire leur salut.(...)

Tous les hommes sont égaux au regard de la loi morale. Ils sont jugés en fonction du bien et du mal qu’ils ont fait, et non d’après leur condition sociale ou leur naissance.(...)



3- L'Unité spirituelle de l'humanité


Au point de vue biologique, l’humanité forme une seule espece. Membres d’une même société, tous les hommes méritent d’avoir les mêmes droits et les mêmes possibilités, et en particulier celles de développement moral et spirituel.(...)

Tous les hommes, quelle que soit leur race, sont voués à la maladie, à la décrépitude et à la mort

Ce qui unit les hommes, c’est le sentiment de leur destin commun et de leur condition commune. Tous les hommes, quelle que soit leur race, sont voués à la maladie, à la décrépitude et à la mort ; et ils sont tous soumis aux mêmes désirs : désir de satisfactions sensuelles, désir de vie ou d’immoralité personnelle, désir de domination ou de mort.

Sans cesse, ils aspirent à la sécurité et au bonheur, mais, en cherchant à satisfaire leurs désirs, ils ne font que s’agiter dans une inquiétude perpétuelle.

Le Bouddha a dit : « C’est au plus profond de nous-mêmes que se trouve le but final de tous nos efforts ; c’est en nous que nous découvrirons la paix et le bonheur éternels qui nous permettront de réaliser nos plus hautes aspirations. »

Tous les hommes, quelle que soit leur caste ou leur race, doivent et peuvent se sauver eux-mêmes.(...)

Lorsqu’on veut établir des distinctions entre les hommes, ce qui compte ce n’est pas la forme des membres, la couleur de la peau, l’origine ou la condition sociale, mais la position de chacun par rapport à son but - qui est aussi le but commun de l’humanité et la source du vrai bonheur et de la parfaite santé mentale.

Pour le bouddhisme, les êtres humains ne sont supérieurs ou inférieurs que selon leur degré de perfection morale et spirituelle, indépendamment de toute considération de race ou de caste. Et celle distinction même n’a rien de rigide, puisque chacun change constamment et a le pouvoir de devenir meilleur ou pire.

L’une des caractéristiques de ces êtres supérieurs est qu’ils ne revendiquent aucune supériorité morale ou spirituelle et qu’ils n’ont aucune prétention personnelle. Certes, ils ont conscience de leur supériorité, mais ils n’en font pas étalage, car il est dit que ceux qui ont réalisé leur salut cessent de se considérer eux-mêmes comme étant« supérieurs ».

Les êtres moralement et spirituellement inférieurs, au contraire, se ferment toute possibilité d’éveil spirituel et de progrès moral en revendiquant une supériorité illusoire et en créant ainsi, pour leur propre malheur, et celui des autres, des divisions artificielles entre les hommes.

Les hommes ne sont supérieurs ou inférieurs qu’en raison de leur valeur morale et spirituelle ; mais cette classification elle-même est sujette à modifications, les hommes pouvant changer et changeant en fait.

Nous n’avons donc le droit de mépriser personne. Le criminel le plus endurci - comme le voleur paria Angulimala qui fut converti par le Bouddha - peut avoir de profondes qualités naturelles, et subir en peu de temps une complète transformation spirituelle.

(...)


* A suivre: La deuxième partie de cette étude, ICI


Méditation et tranformation

photo: isarablog



Comme pour tous les autres messages de ce blog, pour en savoir plus, cliquer sur les mots surlignés en bleu.



Plus de 6 mois après ma "retraite intensive", je ne vois plus les choses de la même manière.

Mon approche du bouddhisme et de la méditation a beaucoup changé.

L'
impermanence existe à tous les niveaux.

Parfois j'ai l'impression d'avoir avancé, d'autres jours j'ai l'impression d'avoir reculé.

Mais le plus significatif, c'est que je commence seulement à comprendre véritablement pourquoi je médite. Je ressens mieux les choses.

J'ai suivis d'autres retraites depuis cette retraite intensive dont j'ai fait le récit, et je sais maintenant que peu importe pour moi de suivre une
retraite intensive ou non intensive.

Par ailleurs, avant de faire cette retraite intensive de 10 jours, j'avais fait d'autres retraites, mais plus courtes et moins "intensive" dirons nous...
J'étais alors persuadée qu'une retraite intensive de 10 jours allait me transformer et me permettre d'avancer beaucoup plus vite sur le chemin!
Aujourd'hui, je suis incapable de vous dire si ma transformation est liée à cette retraite ou au fait que je continue de méditer tous les jours, de lire des enseignements et surtout des sutta, au moins un tous les soirs juste avant de m'endormir.
Sans doute est-elle liée à tout un ensemble de chose, y compris mon kamma.


Comme je l'expliquais déjà dans la présentation de ma retraite:

Il n'y a rien de miraculeux dans le Bouddhisme : il y a de la compassion, de la bienveillance, de la sagesse, mais pas de miracle...

Ce serait une erreur de penser que seule une seule pratique permet d'avancer sur le chemin. Il existe d'autres formes de Retraite et ce qui compte c'est la Foi, la confiance.
Chacun choisi sa "voie", son "chemin", sa "méthode" ou sa "manière" de pratiquer le dhamma.

Aucun chemin n'est plus rapide qu'un autre, mais chaque personne étant différente, certains chemins sont mieux adaptés à notre personnalité. Mais ils conduisent tous au même endroit, même si ils sont différents.

Marcher sur le chemin prend du temps, des années et souvent une seule vie ne suffit pas, alors 10 jours, c'est une goutte d'eau.
Pourtant, se mettre temporairement à l'écart en faisant une retraite, (peu importe le type de retraite) permet ensuite de mieux pratiquer le dhamma dans la vie de tous les jours, de mieux intégrer la pratique dans les situations de la vie quotidienne


La manière dont je médite a également changé.

Je continue de méditer matin et soir et tous les jours, mais je pratique davantage le calme mental
(samatha)

Sans le "calme mental", je suis incapable de voir quoi que ce soit et donc incapable de voir les choses comme elles sont.

Avant, je pensais que c'était possible de méditer et d'observer dés le début, maintenant j'ai besoin de calmer mon mental au début de ma méditation, même si il est vrai que le fait d'observer les choses calme le mental.


C'est pour ça que j'ai ajouté dans mon blog plusieurs messages sur la Respiration, afin d'équilibrer samtha et
vipassana.

En réalité je n'ai plus aucun programme, plus aucune méthode.
Je veux dire par là que je ne cherche plus à observer "coute que coute" ou à être attentive "coute que coute": l'observation arrive d'elle même une fois que mon esprit agité se calme. Et si elle n'arrive pas ce n'est pas grave.


Mais surtout j'ai compris que Vipassana, c'est le but et aucunement le point de départ.
Prendre les choses à l'envers peut parfois être stérile, voire dangereux. Il est donc très important de choisir avec attention le moine ou la personne laïc (mais dans ce cas, de préférence reliée à une sangha) qui vous guide durant une retraite.

Si on vous raconte n'importe quoi dés le début, vous ne serez pas à même de le savoir et vous risquez de partir dans une mauvaise direction et d'avoir ensuite à faire marche arrière, si vous le pouvez encore.


Avec du recul je pense que faire le récit de sa retraite peut-être dangereux.
Personnellement cela a été positif, mais en fonction de la manière dont on raconte les choses, on peut se perdre , on peut aussi perdre le bénéfice de sa retraite et surtout induire les gens en erreur.

Déjà, lorsque je me relis aujourd'hui, je sais que je n'écrirais plus les mêmes choses, mais ce que j'ai écris c'est ce que je ressentais à ce moment là.

Plusieurs personnes m'ont écris pour me dire que c'est grâce à mon récit qu'elles ont eu envie de faire une retraite intensive.
Et même , lors d'une
courte retraite; Une fois le Noble Silence terminé , j'ai également fait la connaissance d'une jeune femme qui m'a expliqué que c'est un peu grâce à un blog qu'elle a été tenté de faire cette expérience, et le blog en question et bien c'était celui ci......


Ma méditation s'est donc transformée durant ces derniers mois et cette transformation a, à son tour, modifié ma manière de méditer... de la même manière que la retraite intensive avait modifié ma manière de méditer.




Aujourd'hui, pour moi, Répondre à la question: "
Pourquoi je Médite?" reviens au même, que de répondre à la question "pourquoi je suis Bouddhiste?"

Je me répètes, mais si l'on peut méditer sans être Bouddhiste, on ne peut pas être Bouddhiste sans méditer ou pratiquer.

  • - Si c'est juste l'approche "intellectuelle" du Bouddhisme qui nous plait, on est pas bouddhiste, même si on a lu des centaines de livres sur la question et des sutta.
Dans le bouddhisme il faut voir les choses par soi même.

  • - A l'inverse, de nombreuses personnes méditent sans même connaître l'enseignement du Bouddha, le dhamma. Elles méditent juste pour méditer, sans même respecter la morale (sila), sans avoir la foi.
Elles méditent parce que cela leur procure "bien être" et "calme" sur le moment et ça leur suffit. Bien que pratiquant la méditation, ces personnes ne sont pas Bouddhistes.


  • - Mais on peut aussi connaître l'enseignement du Bouddha et méditer, sans pour autant être Bouddhiste.

Mais alors qu'est ce qui fait la différence?

- Le désir de se libèrer des 3 poisons. (il ne s'agit pas du désir de possèder quelque chose);
- la Foi (saddha) dans les 3 joyaux que sont le Bouddha, le sangha, et le dhamma;
- le respect des préceptes et de la morale (sila);
- une certaine discipline, la pratique ou l'entrainement (bhavana),
- de la dévotion,
- une certaine compréhension du dhamma;
- avoir de la compassion pour soi même et pour les autres.

Sans cela, on arrivera pas à la sagesse, à la compréhension et à la vue juste. Sans cela on arrive nul part.
L'attention pour l'attention, sortie du contexte des
4 Nobles Vérités ( et donc du Noble octuple sentier) ne veut rien dire, en tout cas, cela ne conduira pas à voir les choses comme elles sont (vipassana)

Lorsque j'ai commencé ce blog, je n'avais pas conscience de la force de la foi, celle ci était présente mais au cours de ces derniers mois elle s'est renforcée.

J'ai le sentiment d'avoir énormément changé depuis mes premiers messages sur ce blog, d'avoir muri. J'entends par là d'avoir avancé sur le chemin. Je ne suis plus la même personne.

La durée, même si elle a une importance n'est pas essentielle, l'intensité de la pratique est aussi importante.

Mais surtout je réalise aujourd'hui que ça fait des années que je suis sur le chemin mais je ne le savais pas.

Lorsque je regarde derrière moi, je réalise que beaucoup d'évènements dans ma vie m'ont fait progresser sur le chemin.

Je suis venue au "Bouddhisme" non pas pour me sentir mieux , car je n'étais pas "mal" au sens pathologique du terme, mais pour me sentir différente.

Je reste persuadée que si j'avais rencontré le dhamma à 20 ans je serai passé à côté.

Pourtant, je n'envisage plus la vie sans le dhamma, ma vie est le dhamma et le dhamma est ma vie.

Ma vision des choses a également changé.


En réalité, tous ces éléments vont se renforcer avec et grâce à la pratique.

Lorsque l'on débute, on ne sait pas bien ce qui se passe, on ne comprends pas toujours nos motivations, d'autant plus que notre kamma y est pour quelque chose.

Certaines personnes ont déjà pratiqué dans leurs vies antérieures d'autres non, nos personnalité, nos rencontres, les évènements, tout ça va faire de nous des pratiquants différents, ni supérieurs ou inférieurs, juste différents


Les enseignements du Bouddha considérés dans leur globalité, sont tous en interrelation au sein d'un système parfaitement cohérent, de pensée et de pratique, trouvant son unité dans son but final : la réalisation de la libération de la souffrance, au sens le plus large



Le but de la Méditation ce n'est pas la relaxation ni même de trouver la paix et la sérénité pendant 45 ou 60 minutes, même si effectivement durant la méditation on ressent un sentiment de bien-être.

Le but de la Méditation c'est d'arriver un jour à se libérer des 3 poisons.

Un jour? mais quand ?

Dans cette vie même ou dans une autre, peu importe, ce qui compte c'est avancer, progresser et réduire progressivement les kilesas (impuretés en pali).

Ce qui est terrible c'est que plus on avance dans la pratique plus on réalise qu'on est remplie de kilesas et qu'il nous faudra beaucoup de temps pour s'en débarrasser.

Mais finalement, c'est déjà un progrès énorme que de voir nos propres kilesas. C'est un pas vers la connaissance, par opposition à l'ignorance.

Toute notre vie est illusion et ignorance , mais on ne le sait pas. Lorsque l'on commence à réaliser cela on ne peut plus revenir en arrière.



Pour rappel les 3 poisons :

Ce sont les 3 poisons, ces "pollutions de l'esprit" qui poussent les individus à agir en créant les conditions d'apparition de la souffrance : dukkha.

Ces poisons sont:

Lobha :
Avidité, cupidité, convoitise, propention à s'accrocher; à chercher le plaisir, l'attachement.
Selon Michel Henri Dufour : Comprend tous les degrés depuis la plus légère trace d'attachement jusqu'au forme les plus graves de convoitises et d'égocentrisme


Dosa :
La haine, La malveillance.
Selon Michel Henri Dufour : Comprend tous les degrés d'aversion depuis le plus légère touche de mauvaise humeur (envers les autres et envers soi même) jusqu'au formes extrème de colère et de haine.

Moha
La confusion ou l'ignorance , l'illusion mais aussi la stupidité et la sottise



Agir avec des motivations positives entraine des conséquences positives mais n'est pas en soi suffisant pour obtenir la transformation de l'esprit, illuminé par la vrai nature de la réalité

La pratique du bouddhisme consiste en grande partie à comprendre ce lien entre la souffrance et ses causes, afin de sortir du cycle sans fin des existences dans lequel elles nous enchaînent.

Kathy 

dimanche 30 décembre 2007

Méditation sur la respiration 2




  • Un autre message intitulé Méditation sur la Respiration (enseignement de Ajahn Akincano et un enseignement de Ajahn Sumedho : "suivre la respiration") se trouve : ICI


A propos de la Respiration lire aussi:


Ci la respiration a une si grande importance c'est grâce à ce sutta :anapanassati sutta.

L'anapanassati sutta complète en quelque sorte le satipatthana sutta

Vous pouvez lire ce sutta dans le message "quelques sutta" ICI

Ci après un enseignement basé sur le sutta anapanassati (l'attention sur la respiration) par Vénérable Balangoda Anandamaitreya Mahathera.


(...) Sur les quarante techniques décrites pour la concentration (par le Bouddha), je parlerai de celle qui consiste en la méditation sur sa propre respiration.

Quiconque cherche le succès dans son investigation spirituelle, doit tout d’abord avoir une bonne moralité. Au minimum, il doit développer ces cinq préceptes (panca-sîla) :

1. il doit s’abstenir de tuer ou de blesser toute forme de vie ;

2. il doit s’abstenir de la possession illégale des biens d’autrui ;

3. il doit s’abstenir de mauvais comportements sexuels ;

4. il doit s’abstenir de mauvaises paroles ;

5. il doit s’abstenir de la consommation d’intoxicants.

Outre l’observance des cinq préceptes, il doit éviter tout moyen incorrect de subvenir à ses besoins. S’il souhaite atteindre de hauts degrés de concentration, il doit réaliser contrôle des sens, célibat et chasteté.

La personne qui désire pratiquer la méditation sur la respiration doit pour cela trouver un lieu favorable. Celui-ci doit être libre de toute contrainte, solitaire et à l’écart de toute turbulence.

Les méditants des époques anciennes passaient leur temps principalement dans les forêts ou dans les bosquets lointains, ou encore dans des abris isolés, au pied d’un arbre, ou bien dans des maisons vides. Dans de tels lieux, ils pratiquaient leur système de méditation.

Dans une société pleine de tumulte, il n’est pas possible de pratiquer de la sorte dans la journée. Mais, la nuit, quand les gens sommeillent et que le silence règne, il n’est pas difficile de méditer. Pour ce faire, toute posture appropriée et confortable convient. Au début, toutefois, il est nettement préférable de s’asseoir en tailleur ou bien sur une chaise, mais en gardant tout le tronc bien droit sans tension dans la colonne, les vertèbres au repos de bout en bout.


Première étape de la Pratique

Tout d’abord, le méditant doit s’asseoir de manière confortable et doit être bien résolu dans sa pratique, en vue du développement spirituel, tout en se dédiant à son maître spirituel. Cela fait, il devient prêt à entreprendre la pratique.

Il observe ses inspirations et ses expirations dés le départ. Jamais, il ne doit forcer ses respirations, mais il doit être attentif à son rythme respiratoire, à l’entrée et à la sortie de l’air tout en laissant fonctionner le processus de respiration de façon naturelle.

Il doit seulement être vigilant et attentif à celui-ci. S’il a le nez long, l’air touchera en premier lieu l’extrémité du nez ; s’il a le nez court, il touchera d’abord la lèvre supérieure. Il fixe son mental et son attention sur l’endroit du premier toucher de la respiration

Il doit exercer cette pratique au moins deux fois par jour, et durant une heure entière chaque fois. Quant aux méditants qui consacrent toute leur vie à la méditation, ils exercent celle-ci la journée entière hormis les moments consacrés aux besoins de leur corps.

Etre conscient, vigilant ou attentif à son rythme de respiration, voilà l’étape préliminaire de cette pratique. Si le méditant n’avait pas jusqu’alors développé suffisamment sa concentration, son mental erre pendant la pratique, vers le passé ou vers un futur imagé.

Afin d’éviter une telle errance, le méditant peut compter ses respirations comme suit :

Il compte à chaque inspiration ou expiration, peu importe.

Lorsqu’une respiration touche l’extrémité du nez ou la lèvre supérieure, il compte mentalement : « un ». Jusqu’à ce que la respiration suivante touche l’endroit en question, il compte mentalement : « un, un, un » , et ainsi de suite.

Quand la respiration qui suit touche le même endroit, il compte : « deux, deux, deux » , et ainsi de suite... il continue à compter de cette façon jusqu’à arriver à la cinquième respiration.

Lorsqu’il compte « cinq » ce sera l’achèvement du premier cycle après lequel commence le deuxième en comptant : « un » etc... comme au premier cycle, mais cette fois jusqu’à arriver au chiffre « six » .

Après achèvement du deuxième cycle, il commence le troisième en comptant de nouveau : « un » mais jusqu’à arriver au chiffre « sept » .

Ensuite, il entreprend le quatrième cycle en commençant le comptage de « un » jusqu’à atteindre le chiffre « huit » .

Puis il commence le cinquième cycle en comptant « un » jusqu’à atteindre le chiffre « neuf » .

Continuant ce processus, il commence le cycle suivant et compte de « un »... à « dix » .

Ne pas dépasser ce nombre. Considérant ces cinq cycles comme un groupe, il recommence celui-ci et ainsi de suite, une heure durant. Grâce à cette méthode, le méditant doit pouvoir contrôler son mental et l’empêcher d’errer.


Deuxième étape

Si le méditant coupe court à l’errance de son mental, et réussit à bien le fixer sur l’endroit du premier toucher de la respiration, il peut arrêter de compter.

Il doit alors fixer son mental sur cet endroit tout en étant attentif à sa respiration et à sa durée.

Au moment de l’inspiration, le méditant doit observer celle-ci et y être attentif : « je fais une longue inspiration » ; de même lors d’une courte inspiration, il doit le signaler en y étant également attentif : « je fais une courte inspiration » .

Autrement dit, qu’il s’agisse d’une longue ou d’une courte inspiration, il doit la signaler comme telle.

Il convient en outre d’être attentif à ne pas laisser une seule respiration passer sans être signalée. De la sorte, il doit continuer sa pratique durant au moins une heure. En poursuivant ce processus, il remarque que ses respirations deviennent de plus en plus subtiles et douces.


Troisième étape

Le méditant doit s’entraîner à être attentif à toutes les phases de sa respiration.

Quand il fixe son attention sur l’endroit du premier toucher de la respiration, il essaye d’être attentif sur le début, le milieu et la fin aussi bien de l’inspiration que de l’expiration.

Lorsqu’il inspire, il doit mentalement suivre avec vigilance l’inspiration dés le début, à savoir dés qu ’elle touche le lieu précité, jusqu’à la fin.

De même, il doit suivre son expiration du début jusqu’à la fin(...)


Quatrième étape

A cette étape, le méditant constate un calme dans le rythme de sa respiration.

Si tel n’est pas le cas, il doit revenir à l’exercice précédent, et par un effort approprié tenter de réaliser le calme et la sérénité requis pour la respiration.

Peu de temps après, il y réussira, suite à quoi son corps et son mental s’épanouiront : son corps devient si limpide et par conséquent léger au point de s’élever dans l’air. A vrai dire, le corps physique de certains méditants monte en l’air d’au moins dix centimètres. Je connais deux personnes (moines bouddhistes) qui lorsqu’ils pratiquent cette méditation montent en l’air au point que leur tête touche le plafond de la pièce, avant de redescendre au sol quelques minutes après.
(...)

la fixation par le méditant de son mental et de son attention, sur sa respiration fait disparaître les obstacles (nivaranas) qui entravaient son développement.
Ces obstacles sont au nombre de cinq :
1 la sensualité (kamacchanda),
2 la mauvaise volonté (vyapada),
3 la paresse et la léthargie (thinamiddha),
4 la turbulence et l’inquiétude (uddhacca-kukkucca), et
5 l’incertitude (vicikiccha).

( Lire : les 5 empêchements (ou obstacles) à la Méditation : ICI )

Après un certain temps de pratique, quand on atteint la quatrième étape de son développement, les cinq obstacles s’évanouissent, le mental devient purifié, et son objet -la respiration- radieux.

Pour certains, cela ressemble à un groupe d’astres, ou à un astre, ou à une pierre précieuse ; d’autres voient quelque chose qui ressemble à des pierres précieuses ; d’autres encore à des perles unies, ou quelque chose de semblable à une bouffée de fumée, ou à une toile d’araignée déployée, ou comparable à un nuage, à une fleur de lotus, à une roue de char, au soleil, à la lune, ou à quelqu’autre objet luisant. Cela s’appelle l’objet contrepartie (patibhaga-nimitta). Lorsque cet objet apparaît, le méditant doit faire particulièrement attention pour éviter sa disparition. Car s’il disparaît, il sera très difficile à faire réapparaître. Sa disparition est due au manque de vigilance.(...)


Les Jhana

Le méditant qui suit ces instructions énergiquement, est capable d’atteindre la première transe extatique. Mais, bien qu’il le fasse en fixant son mental sur l’objet contrepartie, il est plus utile et plus sûr pour lui à ce point de la pratique, d’agrandir cet objet ou de l’étendre en longueur et en largeur. Tout d’abord, il doit mentalement préciser sa taille : par exemple un centimètre en tout, puis deux, trois, et ainsi de suite... Il étend ainsi de plus en plus sa taille, pour atteindre un décimètre, puis deux, etc... jusqu’à atteindre la taille d’un parapluie au moins, ou, s’il le désire, celle d’une maison, d’une ville ou encore de l’espace infini. Alors, il percevra l’objet contrepartie s’étendant en une lumière sans limites. Toutefois, l’étendre ainsi n’est pas nécessaire. La taille d’un parapluie suffit pour y fixer son mental avec stabilité et atteindre la première transe extatique (le premier jhana).

Quand le méditant parvient à cet état de concentration du mental, il expérimente les cinq facteurs de la première transe : la pensée attentive (vitakka), la pensée soutenue (vicara), la joie (piti), la quiétude (sukha), et la concentration (ekagatta). Ces cinq facteurs de la première conscience extatique rendent plus stable la concentration du mental sur l’objet, et repoussent fortement les cinq obstacles (nivaranas). La pensée attentive repousse la paresse et la léthargie, la pensée soutenue repousse l’incertitude, la joie repousse la mauvaise volonté, la quiétude repousse la turbulence et l’inquiétude, et la concentration repousse la sensualité. Le méditant qui atteint cette transe extatique, expérimente un sentiment de soulagement et de béatitude, une extase totale, et une paix dont il n’a jamais auparavant rêvé !

Le méditant qui atteint la première transe extatique doit l’assimiler par cinq moyens, sans quoi, il ne sera pas capable d’avancer dans sa pratique.

Il l’assimile par :

1. référence (avajjana),

L’assimiler par référence consiste à tourner ses pensées vers une transe en quelque lieu et temps que ce soit, et ce sans difficulté.

2. entrée (samapajhana),

L’assimiler par entrée, c’est être capable d’entrer dans la transe en quelque lieu et temps que ce soit.

3. stabilité (adhitthana),

L’assimiler par stabilité, c’est demeurer dans la transe à volonté.

4. sortie (vutthana),

L’assimiler par sortie, c’est la capacité d’en sortir en quelque temps et lieu que ce soit.

5. révision (paccavekkhana).

L’assimiler par révision, c’est la capacité de s’en souvenir et d’examiner sa nature, ses facteurs, et autres détails.

Lorsque le méditant assimile et assimile à fond tout ce qui a trait à la première transe par ces cinq moyens, il devient apte à progresser à la suivante, la deuxième transe extatique (deuxième jhana).



Après avoir assimilé la première transe, il perçoit la pensée attentive (vitakka) et la pensée soutenue (vicara), comme états grossiers du mental, sentant qu’il est préférable pour celui-ci d’entrer en transe –s’il le peut– en dehors de ces facteurs.

Autrement dit, après être entré dans la première transe des milliers de fois et l’avoir comprise à travers les cinq moyens déjà cités, il devient de plus en plus familier et intime avec l’objet de contrepartie, et il devient capable d’entrer en transe sans la pensée attentive ou la pensée soutenue (vitakka et vicara).

Il atteint ainsi la deuxième transe (jhana), et expérimente par là même ses trois constituants : joie (piti), quiétude (sukha), et concentration (ekagatta).

Ce méditant doit maintenant assimiler cette deuxième transe par les mêmes cinq moyens.

A ce moment-là, il perçoit que la joie (piti) est, elle aussi, un état grossier du mental.

Après de nombreuses entrées dans la deuxième transe, il pourra atteindre la troisième transe qui est sans joie, mais accompagnée de quiétude (sukha) et concentration (ekagatta).

Il doit assimiler cette transe également par les mêmes cinq moyens. Quand en révisant cette troisième transe, il perçoit la quiétude (sentiment d’agrément) comme un élément grossier proche des plaisirs sensoriels, il essaye également de s’en débarrasser.

Après avoir dominé la troisième transe par les mêmes cinq moyens, la quiétude se transforme en equanimité (sentiment neutre). Suite à quoi, il atteint la quatrième transe, expérimentant équanimité et concentration. Comme pour les précédentes, il doit assimiler cette transe par les cinq moyens.
(...)
il doit être prudent à ne pas en être passionné ou y être attaché, car le désir .(..) peut entraver son développement spirituel.(...)



Source : Si vous souhaitez lire cet enseignement en entier (sous la forme d'un petit livre proposé par le centrebouddhisteinternational (CBI) vous pouvez le télécharger (format zip): ICI

vendredi 28 décembre 2007

Enseigner le Bouddhisme





Ne pas faire le mal, accomplir ce qui est bien, purifier son esprit c'est là tout l'enseignement de l'Eveillé.



Extraits de : Lohicca Sutta : Les enseignants dignes de blâme:

si le Dhamma est quelque chose qu'on doit réaliser par soi-même, quel est donc le rôle d'un enseignant? N'y a-t-il des enseignants qui méritent une quelconque forme de critique?
La réponse du Bouddha inclut un ample résumé de toute la voie de la pratique:
1- il y a celui qui n'est pas encore accompli dans la noble pratique et qui enseigne à des élèves qui ne l'écoutent pas;
2-celui qui n'est pas encore accompli dans la noble pratique et qui enseigne à des élèves qui pratiquent comme il leur enseigne et atteignent à l'émancipation;
3- celui qui est pleinement accompli dans la noble pratique, mais qui enseigne à des élèves qui ne l'écoutent pas.
4- L'enseignant digne d'éloges est celui qui est pleinement accompli dans la noble pratique, et enseigne à des élèves qui pratiquent comme il leur enseigne et atteignent à l'émancipation.



Plan de ce message:
  • Enseigner le Bouddhisme, Par Chris Ward
  • Rappel : Pourquoi et Comment lire les sutta


  • Enseigner le Bouddhisme, Par Chris Ward


Comment apprenons-nous le bouddhisme ?

Une question qui conduit tout naturellement à se demander : comment le bouddhisme (théravada) est-il enseigné ?

Immédiatement après son éveil, le Bouddha estima qu’il serait trop difficile et ennuyeux d’enseigner ce qu’il venait de réaliser, ce qu’on a appelé la grande hésitation.

C’est seulement après l’intercession de Brahmâ Sahampati que le Bouddha se laissa fléchir et accepta le fardeau d’enseigner.


L’intention d’enseigner n’est donc pas le résultat inéluctable de l’Éveil mais un exemple d’un acte de compassion. C’est un acte de générosité.

La non-inévitabilité d’enseigner est soulignée par le groupe d’êtres éveillés qui n’enseignent pas (les pacceka buddha) que l’on considère comme ayant atteint seuls l’Éveil et qui, se satisfaisant de la solitude, ne deviennent pas des « enseignants des dieux et des hommes ».

Il me semble que beaucoup de pratiquants occidentaux supposent que l’enseignement du Dhamma est la tâche des moines et des nonnes.
Et pourtant, ce n’est pas forcément le cas.

Nous avons la chance que le Sangha de la Forêt a suscité une série de grands maîtres et pourtant tous les moines et les nonnes n’enseignent pas, même après avoir porté la robe depuis des années.


Avant d’enseigner aux autres, il faut peut-être aspirer à pratiquer jusqu’à atteindre un certain degré de maturité spirituelle.
Ou peut-être y a-t-il un manque d’envie d’enseigner et une pratique consistant à offrir ses services d’autres façons - comme par exemple en apportant appui et formation aux moines et aux nonnes plus jeunes.

Le fait que l’enseignement est donné comme un acte de générosité sous-tend tout ceci.
Il est gratuit. Un acte de générosité n’est pas une obligation, un devoir ou un échange commercial, mais quelque chose de donné librement.

Ceux qui enseignent, parmi les moines et les nonnes du Sangha de la Forêt, adoptent souvent la manière d’Ajahn Chah de ne rien préparer (ou pas grand-chose) et de parler de façon directe de ce qui est une préoccupation ou une réflexion du moment.

Ceci provoque une qualité d’immédiateté et de « vie » dans les interventions et est un exemple du Dhamma en pratique.
L’orateur est au fait de la situation présente, à la fois intérieurement et extérieurement, et démontre une confiance dans la façon dont les événements vont naturellement évoluer.

Cette politique de l’absence de préparation, qui pourrait aussi être vue comme une façon délibérée de demeurer dans l’incertitude, est difficile à suivre.
Elle demande de l’assurance, l’acceptation de l’échec (aux yeux du monde) et elle éclaire douloureusement la peur du ridicule et le désir de faire une intervention parfaite (ou même utile).

Entendre une intervention sur le Dhamma donnée de cette manière est une expérience puissante car elle peut nous toucher à un niveau intuitif tout en donnant des informations sur des aspects des enseignements.

Étant donné la nature de ces interventions, elles ne suivent pas un « curriculum » et elles peuvent répéter des thèmes connus, ou ne sembler fournir que quelques morceaux d’un puzzle beaucoup plus grand.

Toutefois, sur une période de temps assez longue et avec de la persistance, bien des pratiquants obtiennent suffisamment d’indications pour construire graduellement une carte ou un modèle de ce qu’est la voie du bouddhiste.

Les indications peuvent mener à des livres et des textes, peuvent mener à une pratique mieux centrée ou peuvent être comprises en questionnant un pratiquant laïc ou un moine.

Demeurer sans cesse dans l’impréparation et l’incertitude pourrait conduire au renvoi pour un enseignant dans de nombreuses écoles ou universités.

Mais je sais que de nombreux enseignants et conférenciers expérimentés se lancent et donnent des cours non préparés lorsque les circonstances le demandent.

La façon la plus courante pour enseigner dans les écoles et les collèges est d’utiliser un programme et de le transmettre dans une série de cours de façon soigneusement structurée à une audience sélectionnée.

L’avantage de cette méthode pour un étudiant motivé est qu’un modèle mental cohérent et global peut être construit. Les concepts et les termes peuvent être appris et leur sens obtenus en les appliquant à la discipline en cause.

Cependant, le bouddhisme n’est pas seulement la digestion d’un assortiment de doctrines (pariyatti) et l’étude d’un vocabulaire spirituel ; c’est plus global que ça.
Il soutient un développement complet du caractère. Et non seulement les qualités, la motivation et l’intégrité du « maître » sont une bonne partie de ce qui est enseigné mais le « vocabulaire » doit être médité et utilisé s’il se révèle utile et aide à nous libérer de dukkha.

Source : vivekarama








(Rappel) Pourquoi et comment Lire les sutta, par Michel Henri Dufour:


Pourquoi lire les Sutta:

Les Sutta représentent la source fondamentale des enseignements du bouddhisme Theravada.
.. Il n’est pas nécessaire de se demander si les Sutta rapportent exactement les paroles du Bouddha historique, personne n’est de toute façon en mesure de l’affirmer ou de l’infirmer.
Il suffit de garder présent à l’esprit que les enseignements des Sutta ont été pratiqués, souvent avec succès, par d’innombrables disciples au fil des siècles depuis environ 2 600 ans.

Si l’on désire véritablement savoir si les enseignements fonctionnent il est nécessaire d’étudier les Textes et de les mettre en pratique. Ils présentent en effet un ensemble complet et cohérent offrant un guide permettant au disciple de partir du niveau où il se trouve, quel que soit ce niveau (sceptique, dilettante, laïc dévot, moine ou nonne) et d’accéder à la maturité spirituelle.

Au fur et à mesure du parcours le pratiquant s’apercevra qu’il lui est de moins en moins utile d’emprunter à d’autres traditions spirituelles car les Sutta contiennent tout ce qui est nécessaire à la délivrance de l’insatisfaction existentielle (dukkha).

Le Bouddha dit à cet effet : « De même que l’océan ne possède qu’une saveur, celle du sel, mon Enseignement ne possède qu’une saveur, celle de la délivrance. ».

Au cours des lectures il sera fréquent de rencontrer des enseignements qui remettront en
question, voire contrediront, notre compréhension actuelle du Dhamma.
Ces conflits apparents ne sont pas des incohérences dans les Sutta mais un signe que les Textes en question nous ont entraînés à la limite de notre compréhension.
En contemplant ces obstacles et en réfléchissant profondément les conflits vont se résoudre et de nouveaux horizons se dévoiler...

Comment lire un Sutta:


Au cours de nos lectures nous devons constamment garder à l’esprit quelques principes généraux ainsi qu’un certain nombre de questions permettant de situer le Sutta par rapport à notre condition présente, notre pratique et notre but.

Principes généraux:

– Il n’existe aucune traduction définitive d’un Sutta.

– Aucun Sutta ne contient tous les enseignements.

– Il est vain de chercher à savoir si un Sutta rapporte exactement les paroles prononcées par le
Bouddha.

– Si l’on est rebuté par un Sutta il faut le mettre de côté provisoirement et le relire plus tard, jusqu’à ce qu’il évoque une réponse et qu’il soit signifiant pour notre pratique.

– Un bon Sutta est celui qui incite à en abandonner la lecture. Puisque le but de la lecture des Sutta est d’inspirer à développer une vue correcte, à vivre une vie de qualité et à méditer efficacement, si l’on ressent la nécessité de poser le livre et d’essayer immédiatement, le Sutta aura rempli son office.

– Lire un Sutta à voix haute du début à la fin est une bonne pratique.

– Essayer de remarquer les différents niveaux d’enseignement du Sutta, en contemplant la façon dont le Bouddha dans son exposé utilise lui-même et met en application ce qu’il prône.

– Ne pas sauter les répétitions même si elles paraissent ennuyeuses et lourdes. Elles possèdent souvent de légères variations qu’il ne faut pas négliger.

– Discuter du Sutta avec un ami sur la Voie ou un membre de la Communauté monastique.

– Apprendre un minimum de pali afin de creuser les différentes acceptions des mots, leur étymologie, pour être à même de comprendre et jauger les différentes traductions proposées par les auteurs.

– Lire ce que les commentateurs, anciens ou modernes, ont écrit à propos du Sutta.

– Offrir au Sutta le temps de la maturation. Un Sutta n’est pas une énigme à résoudre sur le champ, il peut se révéler sous ses différents aspects longtemps après sa lecture.

source : vademecum bouddhique de M.H. Dufour : ICI



- De nombreux enseignements de Maîtres et des sutta sont à votre disposition sur ce blog, pour les trouver voir le plan détaillé du blog : ICI




jeudi 27 décembre 2007

Etre libre de désir, d'aversion et d'ignorance






Ci après des enseignements de Ajahn Khemasiri





Ajahn Khemasiri appartient à l’École des Moines de la Forêt, de la Tradition Theravāda.
Son premier contact avec le bouddhisme en 1977 fut à travers la Tradition Tibétaine. Mais en 1978 il rencontra, en Angleterre, Ajahn Chah et Ajahn Sumedho, deux Maîtres Theravāda de l’École des Moines de la Forêt et commença alors les premières retraites et séjours dans les monastères. En 1984, il entra comme novice au Monastère d’Amaravati au nord de Londres et c’est en 1986 à Chitthurst, qu’il reçut l’ordination de Bhikkhu. De 1995 à 1999 séjours en Thaïlande et en Birmanie : période de pratique individuelle intensive dans différents monastères et ermitages. Depuis 2000, il réside au Monastère Dhammapala en Suisse, dont il vient de prendre la direction.




La pratique de la méditation

Dans la pratique de la méditation, il est bon de garder une attitude de débutant.

(...)Nous avons tous besoin d’instructions différentes, de formes d’aide différentes, selon notre niveau de développement, tout au long de notre vie. Nous n’avons pas tous la même progression.
Nous arrivons dans cette vie avec un bagage différent — c’est ce que l’on appelle « l’héritage karmique » dans le Bouddhisme.(...)

Nous avons tous des points forts et des points faibles différents et il est très important de pouvoir les reconnaître.

Donc nous ne pouvons pas nous attendre à ce qu’une pratique de méditation, ou même toutes les pratiques de méditation appliquées aveuglément, nous aide à résoudre toutes nos faiblesses.
Nous devons utiliser notre propre intelligence intérieure dès le départ. C’est pourquoi j’ai dit qu’il est important d’avoir la vue globale du débutant sur les enseignements mais aussi sur sa propre personnalité.(...)

Les gens ont parfois une approche opposée : ils se limitent à une seule méthode de méditation et ils espèrent que s’ils la pratiquent intensément, ils parviendront à une ouverture — bang ! — et ce sera le nirvana.
Je ne dis pas cela pour dénigrer la pratique intensive ou la pratique de la concentration profonde, mais il est très important de savoir utiliser ces outils.(...)


Avons-nous accès à nos qualités d’attention et en faisons-nous bon usage ?

(...) dans la pratique de la méditation bouddhiste, nous utilisons d’abord l’attention et la présence en relation avec un objet.

Le Bouddha a recommandé différents objets de méditation qui sont des fondements sur lesquels baser notre méditation.
Globalement ce sont : le corps, les sensations, les états mentaux et émotionnels, et les dhamma, c’est-à-dire des objets de contemplation, de réflexion.



Méditation guidée

Prenez une posture confortable qui vous permette de rester trente ou quarante minutes assis sans bouger. Le corps est droit mais détendu, pas rigide.
Dans la pratique du Bouddhisme, on parle beaucoup d’avoir un sentiment de juste équilibre.
Simplement à la façon dont nous tenons notre corps, nous pouvons très rapidement prendre conscience de l’effort et de l’énergie que nous y investissons.
Vous trouverez certainement plus facile d’avoir les yeux fermés pendant cette pratique.

Au lieu d’utiliser un objet de méditation particulier comme la respiration, le corps ou un
objet mental, nous allons observer ce qui se passe si nous laissons simplement l’attention se déplacer d’elle-même. Vers quoi va-t-elle se diriger si nous commençons, par exemple, par écouter les sons, utiliser nos sens ?

Voyez ce que vous ressentez au niveau du coeur. Que se passe-t-il quand votre attention est aussi libre, aussi ouverte ? Peut-être y aura-t-il une résonance au niveau des sensations.

Prenez conscience du moment où l’attention passe dans le domaine de la pensée sans, bien sûr, vous laisser piéger par les pensées. Vous remarquez simplement que l’esprit a tendance à prendre cette direction.

Peut-être une chose que vous n’avez pas pu terminer vous revient à l’esprit et votre attention va être sollicitée dans ce sens.

Mais qu’il s’agisse de pensées ou de sensations physiques ou sensorielles, laissez votre attention évoluer librement, n’essayez pas de la stabiliser ou de la manipuler d’une manière ou d’une autre.

Vous restez très ouvert, pas contracté, à l’écoute de cette force très subtile à l’intérieur de votre esprit.

Bien sûr, nous utilisons notre esprit toute la journée, mais généralement cela se fait de manière inconsciente, non observée.
Ce soir, par contre, nous observons comment l’attention de notre esprit se déplace et nous restons présents à ses mouvements.

Quand vous remarquez que vous êtes perdus dans une pensée ou dans des impressions physiques ou sensorielles, ne vous laissez pas piéger ! Elargissez simplement l’angle de votre attention, restez dans un état d’ouverture et de curiosité par rapport à ce que le moment suivant va apporter.

Vous voyez, il n’y a vraiment pas grand-chose à faire. En fait, il est bien mieux de se libérer de toute idée de « faire quelque chose » et de s’orienter simplement vers « la présence à ce qui est ». Cela paraît facile quand on le dit, mais c’est certainement plus facile à dire qu’à faire.

Prenez également conscience de ce que vous ressentez.
Peut-être y a-t-il un certain malaise ou une insécurité.
Peut-être, au contraire, vous sentez-vous très bien, très ouverts, très présents.
Laissez simplement votre attention être consciente de ces ressentis.

Voyez si vous avez une claire conscience des objets de votre attention mais aussi de votre attention elle-même.
En temps normal, nous sommes seulement conscients des objets de notre attention. C’est ainsi que cela fonctionne dans le monde. Mais ici, à travers cet exercice, nous essayons de prendre conscience, de ressentir ce qu’est l’attention en elle-même.
A-t-elle une forme ? Une couleur ? Une odeur ? Comment la ressentez-vous ?

Le but de cet exercice

le but de cet exercice était de vous donner le sentiment, la sensation de ce qu’est cette subtile qualité d’attention avec laquelle nous travaillons.

Comme vous avez pu le voir et le ressentir, elle n’offre rien de tangible, rien dont nous puissions nous saisir, alors que la tendance de notre esprit est de vouloir quelque chose de solide, de concret.

Même quand il s’agit du domaine de l’esprit, nous voulons avoir un objet stable sur lequel fixer notre attention et il existe effectivement une approche de la méditation qui propose cela.
Je ne rejette pas du tout cette approche mais il arrive parfois que nous oubliions l’outil même qui nous permet d’être attentifs à quoi que ce soit — cette qualité d’attention elle-même — parce que notre attention s’attache toujours à un objet.

C’est pourquoi il est bon parfois de se détacher, de s’éloigner de cette tendance de façon à observer et ressentir ce mouvement de l’attention, voir comment nous le vivons de l’intérieur, comment il fonctionne. Et nous établissons ainsi une relation avec l’attention.


Questions Réponses


Question : à un certain moment mon attention s’est posée dans la région du coeur et j’ai ressenti des picotements désagréables. Comment interpréter cela ?


Réponse: C’est la réalité de ce moment pour vous aujourd’hui.

Quand on pratique dans le contexte de l’attention présente, comme nous l’avons fait ce soir, le but est justement d’observer cette chose qui est consciente des picotements au niveau du coeur.
Au-delà de l’attention aux picotements, c’est l’attention à cette qualité de perception.
Quand l’impression sensorielle est forte, comme c’était le cas ici pour vous, l’attention est attirée par la sensation et elle se laisse absorber, de sorte que le mental prend le dessus et on commence à se poser des questions : « Quelle est cette sensation ? Je n’aime pas cela », etc.
Cela se produit souvent quand les sensations sont désagréables ou que l’on a un rejet par rapport à une situation. Et dès que l’on exprime cette impression intérieurement : « Oh ! Je n’aime pas cela du tout ! », celle-ci s’intensifie encore.
La façon juste d’agir dans cette situation est de se « désengager » de la sensation et des sentiments qu’elle provoque, sans pour autant perdre le fil de l’attention; ouvrir délicatement l’espace autour de la sensation au lieu de se focaliser dessus.



Question : Quand on pratique cette attention panoramique sans se fixer sur un objet particulier, peut-on dire que l’on est établi dans un état de conscience pure, au-delà de l’activité mentale ?

Réponse: Certains enseignants de méditation utilisent effectivement le terme « pure conscience » ou « attention pure » pour parler d’une attention non orientée vers un objet particulier.

Mais pour que l’attention soit vraiment pure, il faut qu’elle ne se laisse à aucun moment capter par un objet.
On peut être conscient de l’apparition d’un objet, bien sûr, si quelque chose se produit au niveau du mental ou du coeur — une émotion ou un état mental — mais l’attention ne se laisse pas absorber par lui.

Cela peut paraître facile mais en fait c’est tellement subtil qu’il est très difficile de ne pas se laisser prendre au piège. D’autant que nous sommes conditionnés par une vie entière d’habitudes, l’habitude de poser notre attention sur tous les objets qui se présentent.


Il faut donc avancer lentement dans cette voie pour se défaire de cette habitude, sans non plus tomber dans l’extrême opposé qui consisterait à se perdre dans un vaste espace sans plus savoir où l’on en est.

Cette approche engendre la confusion mentale, la personne sent qu’elle est désorientée et qu’elle n’est pas sur une voie correcte.

Reste encore à relier cette pratique à l’enseignement de base du Bouddha qui consiste à prendre conscience de quand, où et comment apparaît la souffrance.

La façon dont nous utilisons l’attention est très liée à notre expérience de la souffrance.
Alors, quand l’attention est pure, comme vous l’avez dit, on ne ressent pas la souffrance parce que l’on se détend, on s’en remet à cette qualité d’attention.

Il s’agit là d’une capacité que nous avons tous mais qui est dissimulée par l’habitude très ancrée de faire exactement le contraire, c’est-à-dire de nous fixer, de nous agripper à tout ce qui se produit au niveau du mental comme des stimulations sensorielles.

Dans le Bouddhisme, on parle d’un « entraînement » des facultés du coeur-esprit car ce n’est pas quelque chose qui se produit automatiquement ou par la volonté. Il ne suffit pas de se dire : « Oh ! J’aimerais beaucoup avoir cette attention pure ! Etre tout le temps dans cet état-là » pour que cela se produise.


Nous devons donc être très honnêtes vis-à-vis de nous-mêmes dans cette pratique; prendre conscience de notre mode de fonctionnement, voir si nous avons l’habitude de nous focaliser sur des pensées, si nous avons tendance à partir dans des états vagues de confusion mentale ou si nous avons besoin de suivre une démarche étape par étape qui nous sécurise.


Dans ce que le Bouddha a appelé « les fondements de l’attention »
, nous passons par tous les différents aspects de notre expérience en appliquant notre attention à des objets de méditation très précis. On travaille avec la respiration. On apprend à calmer l’esprit, à le concentrer. On apprend à se maintenir dans l’instant présent en fixant son attention sur un objet. (...)

Question : Quelle est la différence entre l’attention et la conscience de l’attention ?


Réponse: En fait, les termes « attention » et « conscience » sont quasiment interchangeables. Ils se distinguent quand ils pointent vers un objet. Ainsi on parle de l’attention au corps, l’attention aux sensations, l’attention aux états mentaux, etc., mais il y a aussi une forme d’attention, que l’on peut appeler conscience » — pour la distinguer de l’autre — qui a pour particularité de ne pas avoir d’objet. (...)

On peut même dire que la véritable attention c’est la vacuité car elle est vide de l’impulsion habituelle de saisie que peut avoir l’esprit. Quand on réalise cette expérience, le coeur est réellement plein mais certains diraient que c’est l’expérience de la vacuité.(...)




Entrer dans une nouvelle réalité


Cette « nouvelle réalité » est libre de désir, d’aversion et d’ignorance.

Dans le contexte bouddhiste, je précise tout de suite que cette « nouvelle réalité » est libre de désir, d’aversion et d’ignorance. Parce que tous ici, nous serions d’accord pour reconnaître que notre façon normale d’appréhender la réalité est toujours assez problématique, toujours « défectueuse », pour ainsi dire.

Dans le contexte du Bouddhisme, nous disons qu’il s’agit là de l’expérience de dukkha. Dukkha est généralement traduit par le mot « souffrance » mais en réalité le sens de ce mot est plus vaste et plus profond que ne le laisse supposer le simple mot de « souffrance ».

Il représente le sentiment d’insatisfaction enfoui au plus profond de l’existence conditionnée. Bien entendu, l’existence conditionnée n’est pas nécessairement associée à la souffrance mais dès que l’on naît dans ce monde sous la forme d’un être humain, on peut supposer que cela implique un minimum d’insatisfaction.

En fait, pour la plupart d’entre nous, c’est un peu plus qu’un « minimum ». Nous ressentons parfois, au quotidien, des formes extrêmes de souffrance.

La façon bouddhiste d’expliquer cela est que nous sommes nés dans ce monde en conséquence de choses que nous avons créées ou fabriquées avant cette vie elle-même.

On peut alors se dire : « Quelle catastrophe ! Parce que j’étais ignorant, j’ai créé des conditions qui m’ont amené à cette vie-ci, je me retrouve dans exactement les mêmes conditions que celles qui m’ont amené là. »

Pourtant, nous devons nous souvenir que naître en tant qu’être humain, sous la forme d’un homme ou d’une femme, est en fait une grande chance.(...)


La différence entre un esprit éveillé et un esprit non encore éveillé, est que les sentiments éprouvés — l’amour, la compassion, la joie — sont encore conditionnés par les circonstances.

Les circonstances peuvent être liées à une autre personne ou à une certaine humeur, un état d’esprit du moment.

Parfois nous sommes tellement pris par nos propres soucis que nous ne sommes même plus capables de nous ouvrir aux nombreuses sources de joie et de compassion, même dans le monde conditionné.

Nous pouvons être déprimés au coeur même du plus beau des paysages, du plus beau des couchers de soleil, sans en être conscients.

En général, nous ne sommes pas dans des états extrêmes de dépression comme cela, mais nous fonctionnons sur un mode « médiocre », pourrait-on dire.

Nous nous perdons dans nos pensées, dans nos processus mentaux, nous remâchons des expériences passées, ou encore nous planifions l’avenir.

Nous avons tous beaucoup d’habitudes, de stratégies, pour éviter le moment présent. Cette habitude d’éviter le moment tel qu’il est, est à la racine d’une grande partie de notre souffrance existentielle. Et comme c’est une habitude très profondément ancrée en nous, nous n’en sommes quasiment pas conscients;

c’est devenu la réalité « normale », dans laquelle nous vivons la plupart du temps.
Alors quand quelque chose de spécial se produit, quand nous rencontrons quelqu’un de spécial, nous sortons de ces schémas et soudain toutes les qualités positives émergent : l’affection, la compassion, la joie.(...)


Le Bouddha nous a assurés que toutes ces sublimes qualités que sont l’amour, la compassion et la joie altruiste, font partie du coeur humain et n’ont pas besoin d’être stimulées par quelque chose d’extérieur.

Il a passé beaucoup de temps et d’énergie à nous expliquer comment nous pouvons nous ouvrir à cette autre réalité par nous-mêmes.


sīla, samādhi et pañña.

Etant très réaliste, le Bouddha a établi de solides fondations et, sur ces fondations, il a construit l’édifice de son enseignement.
Traditionnellement on les appelle : sīla, samādhi et pañña.

La première des trois fondations de la pratique, comme les racines profondes d’un gros arbre, est donc sīla, l’éthique, le comportement moral, que parfois les gens n’estiment pas forcément nécessaire ou important. En Occident, en particulier, il y a beaucoup de confusion dans le domaine de l’éthique. (...)

Dans l’éthique bouddhiste, sīla est toujours lié aux deux autres fondements de l’enseignement : samādhi, le développement de la concentration mentale, et pañña, la sagesse.

Nous devons donc toujours évaluer par nous-mêmes comment nos actions, nos paroles et nos pensées sont liées au développement du calme intérieur et de la clarté ou de la sagesse. Et quand on y est attentif, on constate qu’il y a effectivement un lien direct entre l’éthique — la façon dont nous nous comportons dans le monde, dans notre vie — et ce que nous vivons à l’intérieur, en particulier quand nous méditons.

Nous réalisons que, dès lors, ces racines dont nous parlions, s’enfoncent plus profondément dans le sol, ce qui signifie que tout cet édifice spirituel devient plus stable.

(...) la profondeur des racines de l’éthique bouddhique signifie qu’il y a de la place pour la flexibilité. Pour les Préceptes, par exemple, il y a une certaine souplesse qui nous permet d’y réfléchir et de voir comment ils s’appliquent à notre vie personnelle (...)

(...) Il y a la réalité « normale », celle que nous vivons au quotidien, mais les enseignements bouddhistes nous présentent une réalité qui n’est pas dominée par ce que nous appelons normalement, conventionnellement, « un sentiment de soi » (...)

Le Bouddha a commencé par dire : « Voyez-vous, la forme — le corps, mais aussi les formes en général — n’est pas un ‘soi’. En effet, si la forme était soi, nous pourrions dire à juste titre : ‘Que ma forme soit ainsi ! Que ma forme ne soit pas ainsi ! ’ » — on pourrait imposer à notre corps de ne pas vieillir ou de ne pas tomber malade, d’être plus beau ou plus fort. « Mais c’est précisément parce que la forme n’est pas soi que nous ne pouvons pas agir ainsi sur elle. Et c’est parce qu’elle n’est pas soi qu’elle est cause de souffrance. »

Et puis le Bouddha continue son exposé en prenant les quatre autres agrégats, un par un :
« Si les sensations étaient soi, nous pourrions dire : ‘Que mes sensations soient seulement comme ceci ! Que mes sensations ne soient pas comme cela ! ’ Mais c’est précisément parce que les sensations ne sont pas non plus ‘soi’ que nous ne pouvons pas dire cela. »

La même démonstration s’applique aux perceptions, souvent liées à la mémoire. Quelle influence avons-nous sur ce processus de mémoire, sur ce qui émerge de la mémoire à cet instant ou sur ce qui « devrait » émerger dans le futur ? Même chose avec les formations mentales, ce qui se passe dans le processus de la pensée, et aussi la façon dont nous gérons les impulsions qui nous parviennent des sens.

Et puis le Bouddha continue à mener ses disciples dans une investigation plus profonde, toujours basée sur les cinq khandha mais dans un autre domaine, celui de l’impermanence :

«La forme est impermanente. Ce qui est impermanent est-il satisfaisant ou insatisfaisant ? » A quoi les moines répondent : « C’est insatisfaisant, Vénérable. » Alors le Bouddha demande : « Que dites-vous de cette insatisfaction, de cette impermanence, du fait que tout est sujet au changement ? Pouvez-vous dire que c’est ‘vous’, que c’est ‘à vous’ ou que c’est qui vous êtes ? » Et les moines répondent : « Non, Vénérable. Nous ne pouvons pas dire cela. »

Dans la dernière séquence du sutta, le Bouddha interroge à nouveau ses moines, cette fois à propos de la forme physique : son aspect dans le passé, dans le présent et dans l’avenir; ses aspects grossiers et ses aspects plus subtils, le fait qu’elle soit proche ou éloignée, appartenant à quelqu’un d’autre ou à soi. Quand on contemple ainsi avec la Compréhension Juste ou la Vue Juste, on voit que cela ne peut pas appartenir à « soi », ne peut pas être possédé.

Le Bouddha fait appel ici à une forme plus conventionnelle de compréhension juste ou de vision juste des choses. Il utilise des concepts, le concept des cinq khandha — le corps, les sensations, les perceptions, les formations mentales et la conscience sensorielle — en relation avec la « propriété », la permanence ou l’impermanence, et un sentiment de soi ou de non-soi.

Il est vrai qu’il est important de comprendre le concept parce que nous pouvons, dans un premier temps, l’accepter par foi, par confiance, il s’agit d’une « vision juste conventionnelle ».


Parvenir à la compréhension juste grâce à la pratique de la méditation

C’est quand on l’aura redécouvert par soi-même, grâce à la pratique méditative, que l’on parviendra à une véritable Compréhension Juste : la réalisation du non-soi de ces différents aspects des cinq khandha.

Mais les cinq disciples du Bouddha ont eu cette pleine réalisation directement, simplement en
entendant les paroles du Bouddha. Ainsi la compréhension juste conventionnelle a mené à une
Compréhension Juste dite « supra-mondaine », pénétrante, immédiate. On dit que le coeur des cinq disciples s’affranchit aussitôt de toute passion, qu’il était totalement libéré, et qu’ensuite a émergé la claire prise de conscience du fait : « Le coeur est totalement libéré. »

Ce discours du Bouddha peut vous paraître un peu « technique » et il est vrai que l’accepter tel quel implique un élément de foi ou de confiance, parce que le concept d’anattā n’est pas quelque chose que nous pouvons accepter d’emblée.

Heureusement, dans le Bouddhisme on ne vous demande jamais d’accepter quoi que ce soit par foi aveugle. On vous propose plutôt de vous poser des questions, tout comme le Bouddha a posé des questions à ses disciples.

Au départ, vous aurez une forme de compréhension intellectuelle qu’il faudra ensuite soumettre à l’investigation approfondie de la méditation.(...)


- Vous pouvez lire ou télécharger cet enseignement en entier : lerefuge