vendredi 4 janvier 2008

Puja : Célébrer l'Éveil du Bouddha


Par ces pratiques et les vertus obtenues, que mes proches soient heureux. Que la pluie tombe en saison ! Que les récoltes soient abondantes ! Que la prospérité se répande ! Que les gouvernants soient justes ! Que les accablés soient consolés ! Que les effrayés soient rassurés ! Que les affligés soient réconfortés ! Que tous les êtres soient heureux !



* PUJA : Dans le bouddhisme théravada, Un puja est un rituel exprimant de la gratitude envers le Bouddha, le dhamma et le sangha.
puja est une offrande, une avancée, une activation de l’espritNous célébrons ainsi l’Eveil du Bouddha. C’est un geste de louange et de reconnaissance.
Lire : ICI


OFFRANDE D’AJAHN CHAH (PUJA)

Pali/français

1 Formule préliminaire


Namo Tassa Bhagavato Arahato Sammâ Sambuddhassa


Hommage au Bienheureux, au Libéré, au pleinement Éveillé (3 fois)


2- Prise de refuge


Buddham saranam gacchâmi

Dhamman saranam gacchâmi

Sangham saranam gacchâmi


Je prends refuge auprès de l’Éveillé.

Je prends refuge auprès de sa Doctrine

Je prends refuge auprès de sa Communauté. (3 fois)


3. Hommage aux trois joyaux


Le Bienheureux est :

Le Libéré,

Le pleinement Éclairé,

Le Parfait en connaissance et conduite,

Le Sublime,

Le Connaisseur du monde,

L’incomparable Guide des égarés,

L’Éducateur des dieux et des humains,

L’Éveillé

Et le Béni.

Hommage aux éveillés du passé, présent et futur !

Pour moi, il n’y a pas d’autre refuge.


J’ai confiance dans les paroles vraies de l’Éveillé.

Que le succès et la bonne fortune m’accompagnent.

Je baisse la tête et me prosterne devant l’Éveillé.

Que l’on me pardonne si j’ai trahi sa mémoire.


La Doctrine est :

Bien exposée par le Bienheureux,

Reconnaissable par ses fruits,

Applicable ici et maintenant,

À vérifier par soi-même,

Conduisant à la Réalisation,

Et vécu par les sages.

Hommage aux Doctrines du passé, présent et futur !

Pour moi, il n’y a pas d’autre refuge.


J’ai confiance dans les paroles vraies de la Doctrine.

Que le succès et la bonne fortune m’accompagnent.

Je baisse la tête et me prosterne devant la Doctrine.

Que l’on me pardonne si je l’ai contredite


La Communauté des disciples du Bienheureux :

Pratique le bon chemin

Pratique le droit chemin

Pratique le chemin véritable

Pratique le chemin bienséant

Elle est composée :

D’hommes et de femmes

De religieux et de laïcs.

Elle est formée par quiconque chemine vers l’extinction :

De l’égocentrisme, la confusion et la bigoterie,

De l’avidité, l’aversion et l’aveuglement,

De l’appétence et la malveillance,

De l’arrogance, l’angoisse, l’ignorance, le désir de l’ici-bas et l’au-delà.

La Communauté des disciples du Bienheureux est :

Digne des dons,

Digne de l’hospitalité,

Digne des offrandes,

Digne de respect.

C’est le plus grand champ de mérite pour le monde.

Hommage aux Communautés du passé, présent et futur !

Pour moi, il n’y a pas d’autre refuge.


J’ai confiance dans les paroles vraies de la Communauté.

Que le succès et la bonne fortune m’accompagnent.

Je baisse la tête et me prosterne devant la Communauté.

Qu’elle me pardonne si je l’ai offensée.


4. Prise des cinq préceptes


Pânâtipatâ veramani sikkhâpadam samâdiyâmi.

Adinn’âdânâ veramani sikkhâpadam samâdiyâmi.

Kâmesu micchâ-câra veramani sikkhâpadam samâdiyâmi.

Musâvâdâ veramani sikkhâpadam samâdiyâmi.

Surâmerayamajjapamâdatthânâ veramani sikkhâpadam samâdiyâmi.


Conscient des souffrances causées

Par la violence et la mort,

Je m’engage

À ne pas agresser ni tuer,

Mais à aimer et protéger

Tous les êtres vivants.


Conscient des souffrances causées

Par l’injustice et la pauvreté,

Je m’engage

À ne pas voler ni thésauriser,

Mais à défendre les exploités,

Et partager avec les nécessiteux.


Conscient des souffrances causées

Par le viol ou l’infidélité,

Je m’engage

À ne pas m’imposer ni désunir un couple,

Mais à pratiquer une sexualité

Consensuelle, fidèle et épanouie.


Conscient des souffrances causées

Par la confusion et la discorde.

Je m’engage

À ne pas mentir ni injurier.

Mais à parler sagement

Et écouter attentivement.


Conscient des souffrances causées

Par la dépendance et la maladie,

Je m’engage à ne pas consommer

De produits superflus ou nocifs,

Mais à protéger ma santé

Mentale et physique.


5. Prise des trois préceptes supplémentaires


Vikâlabhojanâ veramani sikkhâpadam samâdiyâmi.

Nacca gîta vâdita visûka dassana mâlâ gandha vilepana dhârana mandana vibbhûsanattânâ veramani sikkhâpadam samâdiyâmi.

Uccâsayanâ mahâsayanâ veramani sikkhâpadam samâdi- yâmi.


[Ces trois préceptes supplémentaires sont reçus par certains laïcs,

lors des fêtes de pleines lunes ou lors d’événements spéciaux (comme une retraite) ]

Conscient du besoin de me vivifier

En recevant les trois préceptes supplémentaires,

Je m’engage aujourd’hui à éviter

La nourriture solide après midi,

Les postures engendrant la somnolence,

Les vêtements et distractions frivoles ,

Mais à être détaché, éveillé et concentré,

Afin de renouveler ma pratique spirituelle.


6. Confession


Kâyena vâcâ cittena pamâdena mayâ katam accayam khama me bhante bhûripañña tathâgata.

Kâyena vâcâ cittena pamâdena mayâ katam accayam khama me dhamma sanditthika akâlika.

Kâyena vâcâ cittena pamâdena mayâ katam accayam khama me sangha supatipañña anuttara.

Immina puññakammena mâ me bâla-samâgamo satam samâgama hotu yâva nibbâna-pattiyâ.


Si par négligence,

J’ai commis une erreur par le corps, la parole ou l’esprit,

Que l’on pardonne cette offense

À la mémoire de l’Éveillé, le Parfait d’immense sagesse.


Si par négligence,

J’ai commis une erreur par le corps, la parole ou l’esprit,

Que l’on pardonne cette offense

À la Doctrine visible et immédiatement efficace.


Si par négligence,

J’ai commis une erreur par le corps, la parole ou l’esprit,

Que l’on pardonne cette offense

À la Communauté de conduite pure et inégalée.


Par les vertus de cette confession,

Puissé-je éviter les insensés

Et m’associer aux sages

Jusqu’à l’atteinte de la Libération.


7. Offrandes


Vandâmi cetiyam sabbam sabbathânesu patitthitam sâririka dhâtu mahâ bodhi buddharûpam sakalam sâda


Hommage à tous les monuments,

Aux saintes reliques,

À l’Arbre de l’llumination

Et à toutes les représentations de l’Éveillé.


Hommage à l’Arbre pippala

A l’ombre duquel

Le Maître a vaincu tous les adversaires

Et réalisé l’omniscience.


Hommage à tous les grands arbres,

Les arbres sertis des gemmes de l’illumination

Que le Maître des mondes a contemplé.

En honorant les trois joyaux

J’ai accumulé d’abondantes vertus

Que je consacre à l’abolition des obstacles.


Ghânasarappadittena dîpena tamodansinâ tilokadîpam sambûddham pujayâmi tamonudam.


En hommage au Bouddha, j’offre cette lumière.

À l’Éclairé je donne cette humble bougie.

Il a dissipé les ténèbres et chimères

Pour que brille en chacun la lampe de Bodhi.


Gandha sambhâra yuttena dhûpen’âham sugandhinâ pûjaye pûjaneyyantam pûjabhajanam uttamam


En hommage au Bouddha, je dédie cet encens

Dont les douces effluves embaument la maison,

Mais une vie parfaite est un musc odorant

Qui parfume le monde en toutes directions.


Vanna gandha gunopetam etam kusuma santatim pûjayâmi munindassa siripâda saroruhe - pûjemi buddham kusumena’nena puññena metena ca hotu mokkham puppham milâyâti yathâ idam me kâyo tathâ yâti vinâsabhavam


En hommage au Bouddha j’offre ces quelques fleurs.

Aujourd’hui elles sont fraîches, délicates et jolies

Mais elles sont éphémères et faneront sur l’heure.

Comme ces fleurs, mon corps déclinera aussi.


Sugandham sîtalam kappam pasannam madhram subham pânîyam’h etam Bhagavâ patiganhâtum’h uttamam


En hommage au Bouddha, j’offre l’eau cristalline.

Elle est pure, douce, et parfaite comme Lui,

Vitale et transparente comme sa Doctrine.

Je dédie donc cette coupe au Maître Béni.


Adivâsêthu no bhante gilânapaccayam imam anukampam upâdâya patiganhátum’h uttamam


En hommage au Bouddha, j’offre ce remède.

Je loue le thérapeute plein de compassion

Il nous a révélé la panacée qui aide

À guérir la haine, l’ignorance, l’obsession.


Imâya dhammânudhamma patipattiyâ buddham pûjemi

Imâya dhammânudhamma patipattiyâ dhammam pûjemi

Imâya dhammânudhamma patipattiyâ sangham pûjemi


Par cette pratique conforme à la Doctrine, je vénère l’Éveillé.

Par cette pratique conforme à la Doctrine, je vénère la Doctrine.

Par cette pratique conforme à la Doctrine, je vénère la Communauté.



8. Énoncé de la production codépendante


L’ignorance produit les fabrications

Les fabrications produisent la conscience

La conscience produit les phénomènes mentaux et physiques

Les phénomènes mentaux et physiques produisent les six sphères des sens

Les six sphères des sens produisent le contact

Le contact produit la sensation

La sensation produit le désir

Le désir produit l’attachement

L’attachement produit le devenir

Le devenir produit la naissance

La naissance produit

La déclin,

La mort,

Les lamentations,

Les peines,

Les douleurs,

Les chagrins,

Le désespoir.

C’est ainsi que les souffrances s’amoncellent.


La fin de l’ignorance éteint les fabrications

La fin des fabrications éteint la conscience

La fin de la conscience éteint les phénomènes mentaux et physiques

La fin des phénomènes mentaux et physiques éteint les six sphères des sens

La fin des six sphères des sens éteint le contact

La fin du contact éteint la sensation

La fin de la sensation éteint le désir

La fin désir éteint l’attachement

La fin de l’attachement éteint le devenir

La fin du devenir éteint la naissance

La fin de la naissance éteint

Le déclin,

La mort,

Les lamentations,

Les peines,

Les douleurs,

Les chagrins,

Le désespoir.

C’est ainsi que les souffrances disparaissent.



9. Invocation de la protection des facteurs d’éveil


Les facteurs d’éveil sont

L’attention,

L’investigation,

L’énergie

L’intérêt joyeux

La tranquillité,

La concentration,

L’équanimité.


Le Parfait omniscient a bien exposé ces sept facteurs qui,

Lorsqu’ils sont cultivés et pratiqués,

Mènent aux connaissances supérieures,

À la Libération et l’Illumination.

Par ces paroles de vérités,

Puissé-je garder la santé.


Le Maître ayant vu deux disciples souffrir d’une maladie,

Il récita les sept facteurs d’illumination.

Se réjouissant, ils recouvrèrent immédiatement la santé.

Par ces paroles de vérités,

puissé-je garder la santé.


Un disciple ayant vu le Maître souffrir d’une maladie

Il récita les sept facteurs d’illumination.

Se réjouissant, il recouvra imméditement la santé.

Par ces paroles de vérités,

puissé-je garder la santé.


De même que ces trois grands sages recouvrèrent la santé,

La Doctrine libère les pratiquants.

Par ces paroles de vérités,

puissé-je garder la santé.


10. Transmission des vertus accumulées


Par ces pratiques et les vertus obtenues,

Que mon Maître aux qualités sublimes,

Mes parents et mes proches,

Mes éducateurs et ceux qui m’aident,

Le soleil et la lune,

Les personnes de qualité,

Brahma, Mara et Indra,

Les déités protectrices,

Les démons et les humains,

Que tous les êtres soient heureux.

Que tous accèdent au triple bonheur.


Par ces pratiques et les vertus obtenues,

Puissé-je briser rapidement et facilement

L’attachement, le désir

Et tous les états d’esprits inférieurs

Jusqu’à la Libération.

Que l’existence cyclique prenne fin.

Par l’atteinte d’un esprit droit et attentif,

Modéré, énergique et résolu.

Tu seras vaincue, Reine des Illusions !


Par l’Éveillé, noble Seigneur de la lumière

Par la sainte et sublime Doctrine,

Par la Communauté protectrice,

Par les trois joyaux,

Tu seras vaincue, Reine des Illusions !


Divinités et autres puissances

Du ciel et de la terre,

Réjouissez-vous de ces mérites accumulés

Et protégez toujours la Doctrine


Afin que mes proches soient heureux. [3x]

Que la pluie tombe en saison !

Que les récoltes soient abondantes !

Que la prospérité se répande !

Que les gouvernants soient justes !

Que les accablés soient consolés !

Que les effrayés soient rassurés !

Que les affligés soient réconfortés !

Que tous les êtres soient heureux !


11. les cinq contemplations


Jarâ dhammon’hi jaram anatito’ti abhinham paccavekkhitab- bam.

Il est dans ma nature,

De décliner et de vieillir.

Je ne puis surmonter

Le déclin et la vieillesse.


Byâdhi dhammon’hi byâdhim anitoti’ti abhinham paccavekkhi- tabbam.

Il est dans ma nature,

De tomber malade.

Je ne puis surmonter

La maladie.


Marana dhammon’hi maranam anitoti’ti abhinham paccavek- khitabbam

Il est dans ma nature,

De tomber malade.

Je ne puis surmonter

La maladie.


Marana dhammon’hi maranam anitoti’ti abhinham paccavek- khitabbam

Il est dans ma nature,

De mourir.

Je ne puis surmonter

La mort.


Sabbe’hi me piyehi manâpehi nânâbhavo vinâbhâvo’ti abhinham paccavekkhitabbam.

Tout ce que j’aime

Changera

Et un jour

J’en serai séparé.


Kammassako’hi kammadâyâdo kammayoni kammabandhu kammapatisarano yam kammam karissâni kalyânam vâ pâpakam vâ tassa dâyâdo bhavissâni’ti abhinham paccavekkhi- tabbam

Je suis le détenteur de mes actes,

Leur héritier.

Je nais de mes actes,

J’y suis relié,

Et suis soutenu par eux.

Quels que soient mes actes,

Adroits ou maladroits,

J’en serai l’héritier.


12. Metta : L’amour bienveillant


Que tous les êtres

Soient remplis de joie et de paix.

Que tous les êtres,

Partout,

Les forts et les faibles,

Les illustres et les insignifiants,

Les puissants et les misérables,

Les grands et les petits,

Les subtils et les grossiers ;


Que tous les êtres,

Partout,

En vue ou dans l’ombre,

Proches ou éloignés,

Nés ou à naître :

Que tous les êtres

Soient remplis d’une joie durable.


Qu’aucun être,

Nulle part

N’en déçoive un autre,

N’en méprise un autre.


Qu’aucun être

Sous l’emprise de la colère ou du ressentiment

Ne souhaite jamais le malheur d’un autre.

Tout comme une mère

Fait de sa vie un rempart

Pour protéger de la souffrance

Son enfant,

Son unique enfant,

Qu’un amour sans borne

Pour toutes les créatures

Grandisse en moi.


Que mon amour

S’épanche et sillonne l’univers,

Dans toute sa hauteur,

Sa profondeur

Et sa grandeur ;

Un amour sans limites,

Sans haine,

Et sans hostilité.


Puis, debout ou marchant,

Assis ou couché,

Tant que je suis éveillé,

Puissé-je tendre vers cela

En fixant mon esprit sur une pointe.

Ainsi, ma vie apportera le paradis sur la terre.




Sources : anussati et
alexandrebrassard
Traduction de alexandre brassard

mercredi 2 janvier 2008

Ariyavasa sutta, commenté par Sayadaw Mahasi





Enseignement de Sayadaw Mahasi , Traduit par Vipassanasanha



Pour en savoir plus, cliquer sur les mots surlignés en bleu, (vous tomberez sur un autre message de ce blog)



Un sutta est un enseignement du Bouddha.

Dans le sutta Ariyavasa, le Bouddha dit :

« Oh moines, les Ariyavasa dhammas, c’est-à-dire la demeure des Saints est de 10 sortes. Les Saints ont vécu dans ces lieux auparavant, ils y vivent toujours et y demeureront dans le futur ».

Ariya signifie une personne Sainte, qui a atteint au moins un des quatre stades de sagesse de la voie sainte ; avasa signifie domicile, demeure ; ainsi Ariyavasa veut dire la demeure des personnes Saintes.

Le sutta Ariyavasa s’adresse aux moines et aux laïcs:
Il y a deux sortes de personnes : le sutta-bhikkhu et le vinaya-bhikkhu.
Le sutta-bhikkhu est toute personne qui met en pratique les enseignements du Bouddha (le Dhamma) pour se libérer du cycle des naissances (samsara). Il n’est pas nécessairement membre d’une Sangha, il peut être deva ou une personne laïque.

La pratique du Dhamma permet au méditant de purifier ses impuretés.
Par la pratique de la moralité, le méditant s’efforce de ne pas créer d’impuretés comme l’avidité, la haine, etc… qui conduisent à tuer, voler et à commettre de mauvaises actions.

Le méditant qui développe la concentration surmonte les accès d’avidité et de haine, etc… qui demeurent dans notre inconscient.
Finalement le méditant éradique les impuretés par le développement de la connaissance expérimentale et de la sagesse. Chaque moment d’attention équivaut à la destruction graduelle des impuretés latentes. C’est comme couper un morceau de bois avec une petite hache, chaque coup de hache aidant à se débarrasser des indésirables morceaux de bois.

A chaque fois que le méditant focalise son attention sur un phénomène physique ou mental
apparaissant d’un contact des sens avec un objet extérieur, les impuretés s’affaiblissent et
deviennent inopérantes. Un tel méditant est un sutta-bhikkhu.

Le vinaya-bhikkhu, quant à lui, est un moine qui mène une vie basée sur les règles monastiques.

Bhikkhu est un terme qui s’applique à tout être humain, homme, femme, brahmâ, deva, qui
met en pratique le Dhamma : les enseignements du Bouddha.
(Remarque: Aujourd'hui lorsque l'on parle d'un Bhikkhu on parle d'un moine et non plus d'un laïc)

Le Bouddha a prêché l’Ariyavasa sutta pour que nous puissions vivre dans la demeure des Saints, en sécurité et protégé des dangers du samsara, la ronde des naissances successives.


Les périls du samsara sont encore plus terrifiants que ceux qui guettent une personne ne
vivant pas dans une maison bien protégée. Ils nous suivent d’une existence à l’autre. On peut
se retrouver dans les mondes inférieurs comme un peta ou un animal et souffrir pendant de
nombreuses années, ou bien renaître en tant que pauvre et misérable homme ayant à faire
face à beaucoup d’épreuves, à la vieillesse, à la maladie et à la mort. Ce sont les dangers du
samsara qui guettent continuellement ceux qui ne vivent pas dans la demeure des Saints et
qui ne pratiquent pas l’Ariyavasa dhamma.


Il y a dix Ariyavasa dhammas:

1- Le premier est l’éradication des cinq empêchements.
2- Le second est le contrôle des six sens.
3-Le troisième est la présence du garde qu’est l’attention.
4-Le quatrième est que le méditant qui vit dans la demeure des Saints doit avoir quatre
soutiens.
5-Le cinquième est que le méditant doit avoir renoncé à toutes fausses doctrines.
6- Le sixième appelle le méditant à abandonner toute quête. La quête de quelque chose signifie un manque d’auto-satisfaction, alors que l’abandon de toute quête est un signe de non-attachement et d’auto-réalisation.
7-Le septième est que l’esprit du méditant n’est pas confus mais pur et clair.
8-Le huitième est la possession de la tranquillité du corps.
9 et 10- Les neuvième et dixième ariyavasa dhammas sont un esprit totalement libéré et la connaissance qu’on est totalement libéré des impuretés.
Ces deux dhammas sont liés. Une fois que l’esprit est totalement libéré, s’ensuit la conscience d’une telle libération.


Nous commencerons par le troisième dhamma : l’attention, qui est la clé pour comprendre l’Ariyavasa sutta:

L’attention est essentielle pour la pratique de l’Ariyavasa dhamma.
L’Arahat est attentif juste avant de s’endormir et dès qu’il se réveille. Il est toujours attentif
quoi qu’il fasse, dise ou pense.

L’attention ne se développe pas soudainement seulement après avoir atteint le stade d’Arahat. Elle se développe petit à petit en faisant des efforts et en pratiquant. Elle est déjà bien établie au stade d’Anagami avant que le méditant devienne un Arahat et cela est dû à l’entraînement au stade de Sakadagami. A ce stade également le méditant possède l’attention car il l’a développée au stade de Sotapanna.

Un Sotapanna est un méditant au premier stade de la Noble Voie.
Il n’est pas encore libre de l’avidité, de la haine, de l’ignorance et de l’orgueil, mais ces tendances malsaines ne sont pas assez fortes pour le conduire à tuer, voler, etc… Il est attentif et l’attention le garde.

Le Bouddha dit « Un Sotapanna évite de commettre des mauvaises actions qui le conduiraient dans les mondes inférieurs. Donc il ne renaît pas longtemps ».
Ainsi vous devriez avoir foi envers le Bouddha et méditer sérieusement.

Lorsque vous aurez fait des progrès en méditation, vous comprendrez ce que signifie l’attention.
A la vue d’un objet désirable, vous avez de l’avidité pour cet objet et si quelqu’un vous offense, vous vous mettez en colère car vous n’êtes pas encore libéré de ces émotions malsaines. L’attention est bien utile et aide à les maîtriser. Ces émotions malsaines perdent de l’ampleur et s’estompent. Elles ne sont pas sans contrôle comme chez la plupart des gens. Ces émotions malsaines ne sont pas suffisamment fortes pour permettre au Sotapanna d’être capable de faire du mal.

D’où l’importance de l’attention dans l’entraînement spirituel du méditant sur la Noble Voie.

La pratique de l’attention doit commencer quand le méditant vit dans le monde
. La pratique de l’observation de tous les phénomènes physiques et mentaux naissant des six sens se nomme Satipatthana (les quatre fondements de l’attention).

Satipatthana signifie pleine conscience des évènements physiques et mentaux qui apparaissent. Cela peut être facilement pratiqué aussi. Nous enseignons cette méthode simplement comme l’a fait le Seigneur Bouddha : « Sachez que vous marchez quand vous marchez ».

C’est une instruction simple du Bouddha dans le Satipatthana sutta. Cela ne présente aucune
difficulté de dire que l’on doit savoir que l’on marche. L’instruction est si simple que chacun
peut la mettre en pratique.

Il y a des gens qui disent que le méditant devrait éviter de dire «Je marche » mentalement car
cela implique une sorte de croyance en l’ego.

Il y a trois différentes croyances en l’ego ou le soi.
1- La première est la croyance en soi d’une âme.
2-La seconde est la croyance basée sur la fierté et l’orgueil,
3- la troisième est le soi en tant que terme conventionnel pour parler de la première personne au singulier afin de la différencier d’autres personnes.
Le soi ou « je » n’a pas de rapport avec l’illusion ou l’orgueil. C’est un terme habituellement utilisé même pour parler du Bouddha et des Arahats.

Ainsi nous donnons l’instruction aux méditants de noter mentalement tous les phénomènes
dans les termes conventionnels, par exemple de noter « marcher » dès qu’ils commencent à
marcher. Mais quand la concentration se développe, tous ces usages conventionnels disparaissent et ne reste que la réalité de chaque chose apparaissant et disparaissant sans cesse.

Les gens qui n’ont jamais médité peuvent avoir des doutes, mais cela est dû à leur manque
d’expérience. Moi aussi j’étais sceptique à un moment donné. Je n’aimais pas la méthode du
Satipatthana car elle ne faisait pas mention de nama-rupa, anicca, anatta, etc… Mais le professeur qui enseignait la méthode était un moine élevé, j’ai donc décidé de faire un essai.
Au début je fis peu de progrès parce que j’avais toujours un doute qui subsistait au sujet de la
méthode qui, selon moi, n’avait rien à voir avec la réalité ultime.

Ce n’est seulement plus tard, après avoir suivi la méthode sérieusement que sa signification
m’est apparue. J’ai réalisé ensuite que c’est la meilleure méthode de méditation puisqu’elle
demande de l’attention pour que chaque chose soit connue. Par conséquent, le Bouddha
décrit la méthode de Satipatthana comme l’unique voie.

Au début, le méditant observe surtout au niveau matériel et note « marcher » « se pencher »,
etc… Puis, comme sa concentration se développe, il devient conscient de tous les phénomènes physiques et mentaux apparaissant aux six sens. Finalement il est uniquement attentif à l’incessante disparition des objets des sens et de la conscience. Ainsi, il ne trouve rien de permanent, plaisant et satisfaisant, rien qui ne soit valable pour la croyance en ego.

(...)

Le méditant qui garde son esprit fermement occupé de cette manière peut en temps utile devenir conscient de tous les évènements physiques et mentaux qui apparaissent lorsqu’il voit, entend, etc… Il pratique donc en accord avec le sutta Ariyavasa qui met l’accent sur le
besoin de contrôle et d’attention.

(...) Notre principale préoccupation est d’accéder à la connaissance de la Vérité qui n’est accessible que par une approche expérimentale. Au travers de ses expériences, le méditant voit la distinction entre l’esprit et la matière et il réalise l’impermanence de toute chose. L’expérience peut être complétée par une explication du professeur. La réelle connaissance n’a rien à voir avec les notions préconçues, elle est basée sur l’expérience personnelle.

La connaissance expérimentale acquise par le méditant est claire et distincte. Il ne voit rien d’autre que la disparition de chaque chose. Cela est appelé bhanga-insight qu’il n’apprend pas d’écritures ou d’un professeur, mais par expérience. S’il continue à méditer, il devient de plus en plus attentif jusqu’à ce que son attention devienne parfaite à la dernière étape de la Noble Voie.

L’attention est extrêmement importante. Elle conduit à développer la concentration et à affiner l’intelligence. Cela signifie être vigilant et vivre dans le domicile des Ariyas, ce qui nous protège des dangers des existences du samsara. Afin de vivre dans la demeure des Ariyas vous devez en être digne en termes de foi, volonté et effort.

Il est impossible de faire quoi que ce soit sans foi ou conviction.
Vous ne pratiquerez l’attention que si vous croyez que cela vous aidera à développer la connaissance de la vérité. Cependant la foi elle-même ne le fera pas. Vous avez besoin également d’une forte volonté et d’un effort tenace pour atteindre Nibbana. Posséder ces qualités est essentiel pour réussir dans la pratique de l’attention. La sécurité est la demeure des Ariyas.

L’attention, même pour quelques instants assure la protection contre les dangers du samsara, tel qu’illustré dans l’histoire de Tambadathika.

Tambadathika était en train de boire un verre de lait quand apparu thera Sariputta qui venait apparemment chercher de la nourriture. Du fait de sa forte foi Tambadathika lui offrit immédiatement son verre de lait. Après l’avoir bu le thera donna un discours sur la tournée d’aumônes, la moralité, la méditation et la Noble Voie. Tambadathika ne pouvait pas bien suivre le discours parce qu’il fut pris de remords en se souvenant de mauvaises actions qu’il avait commises dans le passé. Il fit part au thera de son mécontentement.

Questionné par le thera, Tambadathika dit qu’il n’avait pas commis ces mauvaises actions de lui-même, mais qu’il suivit les ordres du roi. Sariputta répondit « dans ce cas, ces méfaits sont-ils les vôtres ? ». Cette question était intelligemment posée pour soulager sa conscience. Ainsi, son angoisse commença à s’estomper, il fut capable de penser au sermon du thera et finit par atteindre le stade de connaissance nommé anulomañana. Les commentaires du Dhammapada l’identifient au plus haut stade d’équanimité. Il est dit que les bodhisattas pratiquent la méditation jusqu’à ce qu’ils atteignent anulomañana. Cela signifie l’achèvement total de la Voie et des ses résultats (phala).

Le développement spirituel ne s’arrête pas à l’atteinte d’anulomañana. De plus, un bodhisatta
peut atteindre le but de la Voie uniquement dans sa dernière vie, lorsqu’il est sur le point de devenir un Bouddha. Il ne peut pas l’atteindre dans ses vies précédentes. Donc, l’attribution d’anulomañana aux bodhisattas est le stade avancé de l’équanimité et il en fut ainsi pour Tambadathika.

Tambadathika devint attentif du fait de son expérience spirituelle. Bien avant cela, il fut tué par une vache. Sa mort devint un sujet de conversation pour les moines. Ils furent très surpris quand le Bouddha leur dit que l’homme avait repris naissance au paradis Tusita, car en dépit de mauvaises actions commises dans le passé, son attention durant les derniers moments de sa mort l’avait protégé des dangers des mondes inférieurs.

L’attention, face à la souffrance ou la mort, est très importante car elle aide à diminuer la douleur et assure une bonne renaissance. Le méditant qui cherche à la développer a besoin de quatre supports. Premièrement il a besoin de vêtements, de nourriture, de médicaments et de logement. Il en a besoin, non par avidité pour le plaisir, mais parce que ce sont les besoins fondamentaux de la vie. Rejeter ces nécessités fondamentales est l’ascétisme qui avait été pratiqué par certaines personnes en Inde il y a longtemps. En fait le bodhisatta lui-même y a eu recours, mais ensuite il l’abandonna en réalisant que cela n’était pas fondé. La voie du Bouddha est la voie du milieu, entre l’ascétisme et l’attachement aux plaisirs des sens.

Le second support du méditant est la détermination de son esprit quand il observe les douleurs physiques et mentales. Il est prêt à faire face aux épreuves et même à la mort, pour atteindre la connaissance de la Voie. La méditation n’altère pas la santé ; au contraire elle est bénéfique (...)

Le méditant doit supporter la douleur autant qu’il peut. « La patience mène à Nibbana » dit un proverbe birman. Si un méditant n’arrête pas de gigoter impatiemment lorsqu’une sensation déplaisante apparaît, il ne pourra pas se concentrer et sans concentration il ne peut pas accéder à la connaissance de la Voie. La patience et la détermination sont donc des supports pour le méditant.

Le troisième support pour le méditant est l’évitement. Il devrait éviter toutes sortes de dangers. Il ne doit pas prendre de risques inutiles en allant dans des endroits inappropriés. Il ne doit pas se surestimer et être téméraire. Il doit être tout spécialement sur ses gardes, notamment dans ses relations proches avec le sexe opposé. En bref, il doit éviter tout ce qui lui ferait probablement du mal physiquement ou moralement.

Le quatrième support du méditant est le rejet de pensées malsaines qui ont tendance à le rendre malicieux et agressif. Il est difficile de vaincre ces mauvaises pensées, car en général
nous aimons penser à ces choses ainsi qu’aux personnes que l’on aime ou hait.

Le méditant doit observer ces pensées et les rejeter. Il n’est pas facile pour certains de le faire parce qu’avant d’avoir méditer ils avaient l’habitude de laisser leur esprit vagabonder librement. Regarder chaque pensée est bien sûr pour eux un fardeau, mais en fait il suffit de deux ou trois jours d’efforts pour prendre l’habitude d’observer.
(...)

Les cinq empêchements:

C’est par l’attention continuelle que le méditant s’efforce d’éradiquer les cinq empêchements
(nivaranas) : plaisirs des sens, colère, paresse, agitation et doute.
Cela empêche l’atteinte de Nibbana et leur suppression est le premier ariyavasa dhamma.

Le plaisir des sens est le désir pour des objets des sens plaisants comme les vues, sons, odeurs, etc.. Ici objet des sens signifie non seulement l’objet qui cause directement la sensation plaisante, mais aussi les autres objets qui y sont associés. Ainsi, l’objet des sons fait référence à un homme qui parle, aussi bien qu’à un instrument de musique. L’odeur, en tant qu’objet des sens est représentée par des parfums et les êtres humains qui les utilisent. En bref, tous les objets désirables sont des objets des sens.

L’amour pour des objets plaisants est la cause de conflits entre les gens et les nations. L’homme moderne aime déjà excessivement les plaisirs des sens et pour lui c’est le summum de la vie, quelque chose à être recherché le plus possible sans considération morale.

Selon le Bouddha, le désir sensuel est comme une créance qui garde l’homme esclave. Comme un débiteur doit être asservi par son créditeur, ainsi l’est l’homme envers l’objet de son désir sensuel. Si c’est un objet inanimé, il doit le manipuler avec soin et le mettre sous clé. Si c’est une femme qui attise son désir sensuel, il doit éviter de faire ou dire quoi que ce soit qui pourrait lui déplaire.

Ne pas avoir de désir signifie être libre d’inquiétude ou d’angoisse au sujet de tout objet désiré ou être humain. La meilleure façon d’éradiquer le désir est de l’observer constamment. Vous devriez focaliser votre attention sur le désir avec persévérance et une forte volonté ; cela le fait généralement disparaître et vous êtes assuré d’une place dans la demeure des Saints.

Ceux qui sont en dehors de la demeure des Saints restent attachés aux objets des sens et parfois cet attachement est un désastre pour eux après leur mort.
Du temps du Bouddha un moine était tellement attaché à sa robe, qu’à sa mort il devint un pou à l’intérieur de sa robe. Une telle histoire peut provoquer la moquerie des personnes sceptiques qui disent qu’une graine de tamarin ne peut produire rien d’autre qu’un tamarin, de même qu’un homme ne peut pas renaître dans une autre forme d’existence. Ces arguments ne sont pas en accord avec l’enseignement du Bouddha.

En fait il n’y a pas d’être et la vie signifie seulement un processus de conscience et de matière. Ces deux consciences sont un facteur déterminant. Donc, selon la doctrine de l’origine interdépendante, à cause de l’ignorance les formations karmiques apparaissent, qui à leur tour conduisent à la conscience, et ainsi de suite. Quand il y a une nouvelle vie, ce n’est pas le corps de l’existence précédente ou son potentiel, mais la force de la conscience qui naît.

De plus, il n’y a pas non plus de conscience grande ou petite. L’esprit d’une personne ordinaire ne diffère pas de celle d’un animal. Il peut descendre dans les plans inférieurs comme quelqu’un qui devient fou ou victime de la rage. En bref, il n’est pas impossible pour quelqu’un d’aller dans les plans inférieurs d’existence après sa mort.

L’esprit pur d’une personne mourante remplie de foi, de bienveillance, etc… assure une bonne renaissance, tandis qu’un esprit impur rempli d’avidité, de haine, etc… mène aux mondes inférieurs.

(...) La conscience n’a pas de substance et donc la distance n’a pas d’importance. La mort signifie la disparition du dernier moment de conscience et l’apparition d’une nouvelle conscience. Pour une personne mourante le dernier moment de conscience est crucial, car s’il est mauvais, il conduit dans un monde inférieur malgré un comportement moral pur.

C’est pourquoi le Bouddha recommande aux moines d’avoir une bonne attitude envers la nourriture, les robes et le logement. Ils ne doivent les utiliser que pour leurs besoins et éviter les plaisirs des sens.
Il est aussi nécessaire de penser à l’impermanence et à l’absence de soi vis à vis des plaisirs des sens afin de vaincre l’attachement à leur égard. Mais la meilleure chose à faire est d’observer l’apparition des désirs et de les rejeter. Cette instruction est importante aussi pour les personnes laïques qui ont divers attachements et sont soucieux des dangers après leur mort. Ils peuvent être libres de tels dangers grâce à la pratique de l’Ariyavasa dhamma. Tout d’abord ils doivent avoir la foi et une bonne connaissance des enseignements du Bouddha. Toutefois une investigation personnelle par la pratique est nécessaire.

La plupart des moines qui étaient avec le Bouddha ont atteint divers stades d’éveil parce qu’ils pratiquaient la médiation Satipatthana avec ardeur. Ils n’étaient jamais inattentifs. Leur calme et leurs bonnes manières impressionnaient même les autres méditants qui ne suivaient pas les enseignements du Bouddha.

Un méditant nommé Kandaraka leur rendit un grand hommage pour leur grâce et leur maîtrise. Son compagnon nommé Pessa en fit de même. Il appréciait les enseignements du Bouddha qui changeaient les personnes malhonnêtes et hypocrites, mais il était tellement préoccupé par ses affaires qu’il n’avait pas pu écouter les sermons du Bouddha jusqu’à la fin ou pratiquer son enseignement complètement.

Il y a d’autres raisons pour lesquelles des personnes comme Pessa n’ont pu atteindre un des stades de la Voie Sainte. Ils n’ont pas eu un bon professeur et une bonne connaissance du Dhamma (son enseignement). L’association avec un mauvais ami ou un mauvais professeur est désastreuse, comme ce fut le cas pour le prince Ajatasattu qui tua son père à la demande de son professeur Devadatta.

Un bon professeur, un bon ami et une bonne connaissance du Dhamma permettent de comprendre qu’il est nécessaire d’être attentif pour éradiquer les impuretés (kilesa).

Nous devons observer et noter toute sensation qui naît du contact avec le monde extérieur. Nous devons noter les sensations de notre corps quand le corps, les mains, etc… font n’importe quel mouvement. Nous devons également être conscients de notre processus mental. En étant conscient de tous les évènements mentaux nous pouvons nous protéger nous-même contre les mauvaises pensées et émotions.

(...) En fait, l'Attention, c’est la clé de voûte de l’enseignement du Bouddha.
Ceci est clairement explicité dans les dernières paroles du Bouddha : « Moines, voici mon dernier conseil : toutes les choses composées sont vouées à la destruction. Travaillez pour votre propre salut en étant attentifs ».

Toutes les choses composées sont impermanentes. Beaucoup de gens ne prennent pas ce fait au sérieux. Au contraire, ils croient en leur identité et que leur ego est permanent. En général l’homme croit qu’il peut vivre longtemps avec sa vitalité et son corps.

La libération de l’existence, qui est conditionnée, impermanente et insatisfaisante, signifie Nibbana, et le moyen d’y parvenir réside dans les dernières paroles du Bouddha : « Pratiquez jusqu’à obtenir une attention continue ».

Les commentaires décrivent ce conseil comme l’essence de l’enseignement du Bouddha. C’est en réalité la clé de voûte du sutta Ariyavasa qui souligne la prime importance de l’attention. Par la pratique de l’attention le méditant atteint le premier stade de la Noble Voie : Sotapanna et il devient libre pour une grande part du désir qui mène aux mondes inférieurs.

Le second obstacle sur la voie est la malveillance : vyapada. C’est comme une maladie qui créé l’aversion et rend la personne malade et apathique. La malveillance nous rend irritable, de mauvaise humeur et suspicieux. Nous n’avons même pas confiance en nos amis. Une personne qui a de la malveillance en elle doit se considérer comme souffrant d’une maladie car les effets en sont désastreux.

Certaines personnes paraissent être bienveillantes tant que tout va bien, mais si quelque chose de désagréable survient, elles perdent leur bonne humeur. La malveillance est la cause de la discorde, des querelles et du mécontentement des gens. Nous avons tendance à avoir de la malveillance envers les membres de notre famille, nos collègues, nos voisins et pourtant ce sont les gens sur lesquels nous pouvons compter en cas de problèmes.

Afin d’instaurer l’unité, l’harmonie et la compréhension mutuelle, nous devons nous garder de la maladie qu’est la malveillance. Si la maladie nous infecte, elle doit être rapidement traitée. Quand vous êtes en colère, notez mentalement votre colère et débarrassez-vous en. Vous ne devriez pas la laisser infecter vos paroles et votre comportement.

Le troisième obstacle sur la voie est la somnolence ou la paresse.

Un homme paresseux ne cherche pas à comprendre le Dhamma ou à le pratiquer et il manque l’opportunité de faire les progrès spirituels que les méditants font quand ils méditent énergiquement.

Le quatrième obstacle est l’agitation et l’inquiétude : uddhacca kukkucca. Ici l’agitation signifie que l’esprit vagabonde, tandis que l’inquiétude signifie les remords pour les fautes commises. Ces deux états mentaux doivent être éliminés car ils sont un obstacle au progrès sur la voie spirituelle.

Le dernier obstacle est le doute : vicikiccha. C’est douter du Bouddha, du Dhamma et de la Sangha. En général une personne qui a beaucoup de doutes hésite tellement qu’elle n’accomplit rien. Le contraire du doute est la foi, la confiance qui pousse le méditant à suivre les instructions de son professeur en accord avec le Bouddha et le Dhamma.

Le méditant peut observer chacun des cinq agrégats, c’est-à-dire les cinq groupes des éléments physiques et mentaux compris dans l’être humain. Mais il vaut mieux observer la montée et la descente de l’abdomen qui indiquent l’élément de mouvement. Les trois autres éléments sont la dureté, la chaleur ou le froid, et l’eau.

Nous devons commencer la méditation par ce qui est évident et facile. C’est pourquoi le
Bouddha a enseigné la méditation sur les quatre postures du corps. Il demandait à ses disciples d’être attentifs quoi qu’ils fassent. C’est un conseil si simple que certaines personnes ne le prennent pas au sérieux, mais ceci est dû à leur manque d’expérience. Le manque d’expérience conduit au doute qui est un des cinq obstacles. Les obstacles empêchent les bonnes pensées de se manifester. Les bonnes pensées et les mauvaises pensées n’apparaissent pas en même temps. Vous avez de bonnes pensées quand vous êtes attentifs et de mauvaises pensées quand vous n’êtes pas attentifs.

Le manque d’attention est en grande partie dû aux obstacles et les méditants sont en général perturbés par le doute, l’inquiétude, le désir, etc…

Il y a des gens qui ne veulent pas méditer car ils comptent sur leurs offrandes, l’observation des préceptes moraux et la récitation de prières pour la pureté de leur esprit, mais ils sont vite désillusionnés quand ils se mettent à méditer car ils sont harassés par des pensées impures.
( remarque : tous ces éléments sont nécessaires et complémentaires : observation des préceptes moraux, dévotion, foi et méditation)

Une personne qui n’est pas attentive ne peut pas avoir une moralité pure car elle n’est jamais réellement consciente du caractère de ses pensées. Les désirs des sens, la haine, la malveillance, etc… leur échappent. C’est seulement par la méditation que nous pouvons savoir si l’esprit est pur ou non, s’il est libre de la colère, de l’avidité, etc…

L’introspection répétée aide à purifier l’esprit de ses impuretés. Le méditant devient conscient des sensations douloureuses qui ont tendance à déprimer l’esprit et entraînent l’irritation. Comme le méditant observe les tensions, les douleurs… il réalise la nature des sensations douloureuses et il en est de même des sensations agréables et neutres. C’est la caractéristique de l’esprit ou de la conscience de connaître l’objet des sens qui lui correspond car il y a différentes sortes de conscience, chacune dépendant du contact (voir, entendre…) avec les différents objets des sens (sons, odeurs…).

L’apparition et la disparition sont le signe de l’impermanence. Si une chose n’apparaît pas, elle ne peut être impermanente et si une chose apparaît et existe pour toujours elle ne peut pas être impermanente non plus. Toute chose a un commencement et une fin.

La compréhension de la loi de l’impermanence conduit le méditant à réaliser la compréhension de la souffrance (dukkha) et du non soi (anatta). Ces trois caractéristiques de l’existence sont interdépendantes et quand on voit anatta, on est près de Nibbana. Mais « voir » anatta ne signifie pas l’acceptation intellectuelle, mais la compréhension par la méditation.

Après avoir compris l’impermanence par l’introspection, le méditant cesse de réfléchir et note plutôt les phénomènes physiques et mentaux et sa compréhension s’approfondit. Il peut voir notamment le début et la fin de chaque phénomène. Il voit des lumières et expérimente la joie, la sérénité, un accroissement de la foi et un état de conscience élevé. Cependant, le méditant ne doit pas confondre ces expériences avec la paix de Nibbana. Il doit les noter et les dépasser.

Alors qu’il continue à méditer, il parvient à voir les disparitions incessantes des choses.
Quand il observe un objet, il ne pense plus à sa forme, à sa dimension ou à sa qualité.
- Il voit chaque chose, l’objet, son esprit, etc… disparaître sans cesse. Ceci est appelé bangañana.
- Parce qu’il voit chaque chose disparaître, il est pris de peur, c’est bhayañana.
- La peur conduit à reconnaître les mauvais aspects de l’existence conditionnée : adinavañana. - Ainsi, le méditant se dégoûte de la vie : nibbidañana.
- Parce qu’il est désillusionné, il veut être libre : muncitukamayatañana.
- Et pour cela, il doit avoir recours à l’observation : patisankañana.
- Cela conduit à la pleine compréhension des trois caractéristiques de l’existence: anicca, dukkha et anatta : sankharupekkhañana.
- Par cette compréhension, le méditant atteint l’équanimité vis-à-vis des six sens que le Bouddha décrit comme suit :

« Oh moines, le moine qui a vu un objet visible de ses yeux n’est ni content ni mécontent. Son esprit est équilibré, nullement affecté par l’attachement ou par l’aversion, parce qu’il a l’attention juste ».

Le méditant est imperturbable face aux objets des sens et ceci est dû à sont attention juste et à la compréhension de la nature de l’existence conditionnée avec ses caractéristiques d’impermanence, de souffrance et de non soi.

« Ayant vu l’objet, le moine le reconnaît avec la compréhension juste ».

La compréhension juste ne cause jamais le plaisir ou le déplaisir. Le méditant est complètement équanime dans son contact avec le monde extérieur, c’est la caractéristique de l’Arahat, et il est possible au méditant de la posséder. Il peut l’obtenir quand il atteint tous les stades successifs de la voie par des efforts ardents.


A propos de l'Attention (sati en pali) lire aussi :




Le bouddhisme "engagé" est une pratique




Bouddha était le premier bouddhiste engagé.
Il s’est engagé en prenant position contre les castes et en s’adressant aux hommes et aux femmes des conditions les plus humbles.
Il s’est engagé en accueillant au sein du sangha les femmes, les indigents, les exclus et les criminels repentis.
Il s’est engagé en indiquant qu’elles étaient les devoirs d’un dirigeant politique et en soutenant qu’il n’existait aucune distinction fondée sur la naissance.
Il s’est engagé en prônant la compassion active et l’amour universelle. Il s’est engagé en enseignant durant 40 ans pour le bien de tous les êtres, sans distinction de sexe, de caste ou de couleur.
Pratiquer le dhamma c'est un engagement envers soi même et envers les autres.
Être Bouddhiste, c’est être bouddhiste engagé.
Kathy





Si le Bouddha nous rencontrait aujourd’hui, nous les occidentaux encore ignorants de la voie et du noble octuple sentier, je crois qu’il nous amènerait tout d’abord à regarder notre vie et qu’ils nous appellerait, comme il l’a fait jadis, à pratiquer tout simplement une voie droite et juste...


En fait, participer à tout le système de consommation c’est déjà, risquer à chaque instant, de violer les trois premiers préceptes ! Quant au quatrième, s’abstenir de paroles mensongères ou incorrectes, c’est particulièrement difficile dans un monde fondé sur la communication publicitaire et la propagande politique...



Le bouddhisme « engagé » est une pratique


Pour beaucoup, le bouddhisme est avant tout une pratique de la méditation. Cette pratique varie selon les traditions bouddhistes mais elle demeure une recherche de calme et de sérénité...

Pourtant l’enseignement du Bouddha n’est pas un enseignement sur la méditation, c’est un enseignement sur la vie. Le Bouddha accueille la souffrance de son temps et celle de tous les êtres.

En premier il y a dukkha... quoique l’on fasse, quoique que l’on pense, il y a toujours la souffrance, une souffrance latente presqu’invisible ou une souffrance criante, déchirante, il y a aussi la souffrance muette de ceux qui meurent en silence de faim de soif et d’abandon...

Ce que nous dit le Bouddha c’est : il y a dukkha..

Il nous dit encore : il y a la cessation de dukkha...

Si le Bouddha nous rencontrait aujourd’hui, nous les occidentaux encore ignorants de la voie et du noble octuple sentier, je crois qu’il nous amènerait tout d’abord à regarder notre vie et qu’ils nous appellerait, comme il l’a fait jadis, à pratiquer tout simplement une voie droite et juste... (Lire: Conseil aux laics: VELUDVAREYYA SUTTA: ICI )



Sila : pratiquer la vertu


Avant toute chose celui qui a rencontré le Bouddha au travers de ses enseignements s’applique à respecter les préceptes et l’octuple sentier.. ; il s’interroge sur le respect de la vie, la parole juste, l’absence de vol et de mensonge. Il s’applique cette pratique à lui même et s’efforce de persuader les autres de la pratiquer... Nous savons tous, par expérience qu’une conduite juste et honnête est le début de la libération et, comme dit le proverbe, on peut se regarder dans la glace...

Celui qui ne peut plus se regarder dans la glace, qui ne peut plus se regarder lui même, celui là ne peut pas s’engager sur la voie de la méditation, ne peut plus être un refuge pour lui même, ne peut plus trouver la vérité en lui même... Il est un errant au milieu de la souffrance et il ne peut plus que tirer profit de la souffrance des autres pour tenter de masquer sa propre souffrance.


Dans la pratique il y a deux niveaux. Le premier est la fondation c’est à dire le développement des préceptes, de la vertu ou la moralité dans le but de contribuer au bonheur, au confort et à l’harmonie entre les gens. Le second niveau (plus intense) où on ne s’occupe pas de son confort personnel, est la pratique du Bouddha Dhamma, menée uniquement par la vigilance et la libération du coeur.

Cette libération est la source de la sagesse, de la compassion et de la véritable source de l’enseignent du Bouddha. Comprendre ces deux niveaux constitue la base d’une pratique authentique.

Vertu et moralité sont la mère et le père du Dhamma qui grandit en nous et ils nous apportent nourriture et conseil.

La vertu est le fondement d’un monde harmonieux, dans lequel les gens ne vivront non pas tel des animaux, mais en véritables êtres humains. Ajahn Chah
(Lire : La vertu ICI )


Si nous nous appliquons avec sérieux, à l’écoute des préceptes nous découvrons combien l’enseignement du Bouddha est « révolutionnaire » et surtout combien il est une parole pour aujourd’hui...

  • Le respect de tout ce qui vit :

Nous mesurons aujourd’hui où nous a conduit ce manque de respect, malheureusement nous ne sommes pas toujours capables d’appliquer aux humains ce que nous tentons d’appliquer aux animaux... Pour l’heure nous avons tendances à trouver qu’il y a trop d’humains sur terre en oubliant que c’est tout simplement parce qu’il n’y a ni partage, ni équilibre...

  • Ne pas voler :

Les ressources d’un autre pays, par exemple... ou tout simplement le travail de l’autre en ne le payant pas à sa juste valeur...

  • Ne pas mentir :

Mais ne pas être non plus complice du mensonge qui est devenu aujourd’hui, pour beaucoup de gens une manière naturelle de fonctionner... se renseigner, étudier et ne pas se faire l’écho de propos mensonger ou calomnieux.

  • Un moyen d’existence juste :
Pouvons-nous considérer que la spéculation soit un moyen d’existence juste, que la recherche du profit à tout prix soit un moyen d’existence juste...

La mise en œuvre des enseignements du Bouddha nous conduit forcément à nous engager socialement pour une société plus juste et le bien de tous les êtres...




La pratique


Quand on parle de pratique on entend méditation... c’est devenu synonyme... Le bouddhiste qui ne médite pas est un bouddhiste non pratiquant.. On parle même de pratique intensive pour parler de retraite où l’on médite à longueur de journée...

Mais alors le bouddhiste qui travaille jour et nuit à la justice et la vérité n’aurait pas, lui, une pratique intensive ???

Le Bouddha nous enseigne la voie du milieu, une voie droite et juste..la pratique de la méditation est là pour nous aider à demeurer dans cette voie droite... Pour nous aider à sans cesse réajuster nos objectifs en considérant la réalité des choses : c’est à dire le dhamma...

Croire pouvoir atteindre nibbanna sans pratiquer la voie de la vertu, sans solidarité avec le vivant, est vraiment une voie de l’illusion. Les moines birmans l’ont bien compris qui se sont levés de leur coussins de méditation pour marcher au nom de tout le peuple...

Certains disent : les moines ne doivent pas faire de politique, cela reviendrait à dire les moine ne doivent pas être bouddhistes, ne doivent pas suivre les enseignements du Bouddha... Mais les moines sont la conscience du monde, les « spécialistes du dhamma », les éveilleurs de l’humanité... Ils doivent parler et agir quand c’est nécessaire, quand le monde « dérape ».



"Voit-on un tel indicateur de trésors l’homme avisé montrer les fautes, dénoncer les manquements, auquel cas il faut partager la compagnie d’un tel sage. Pour qui la partager ce sera mieux, non pis.

"Il exorte et enseigne, tout en prévenant la malhonnêteté : amis des bons hostile à ceux qui ne le sont pas !

Dhammapada versets 76 & 77




La vue juste


Pourtant le disciple du Bouddha n’est pas un militant comme les autres.

Il s’efforce d’avoir une action dénuée de toute haine,violence, rancœur, jalousie, ignorance, médisance et calomnie... de toute recherche de reconnaissance, de remerciements, de l’acquisition de quelque mérite que ce soit

Il ne confond pas compassion et émotion, sensation et vérité... Il s’efforce d’agir avec équanimité...

Il sait que le dhamma est le plus grand de tous les dons, et que nourrir les affamés, redonner leur dignités aux démunis n’est pas le but ultime de la libération... Ce ne sont que les prémices... des prémices nécessaires.

Le bouddhisme « engagé » est une pratique... une pratique difficile où il faut sans cesse réajuster notre opinion, sans cesse travailler sur nos sensations et nos émotions afin que notre action ne soit pas déterminée par elles mais par la vue juste...

En ce sens l’engagement bouddhiste nourrit la pratique de la méditation et la méditation nourrit la pratique de l’engagement...

le dhamma est vivant et il n’y a pas d’un coté le coussin et de l’autre le monde...

Il y a le dhamma et c’est tout... la compassion sans passion... pour le bien de tous les êtres.



Source : Edito du site : Karuna








Le Bouddha et le Criminel (angulimala sutta)



Certains domptent avec un bâton Avec des crochets, et des fouets Mais c’est sans arme, contondante ou blanche Que je fus dompté par l’Ainsi-Venu



J’ai entendu qu’à une occasion, le Béni du Ciel demeurait près de Savatthidans le parc Jeta, au monastère d’Anathapindika.
Et à cette époque, dans le royaume du roi Pasenadi il y avait un bandit du nom d’Angulimala: brutal, aux mains couvertes de sang, adonné à l’assassinat, incapable de pitié envers les êtres vivants.
Il transformait les villages en non-villages, les villes en non-villes, vidait les campagnes de leurs habitants. A la suite de ses meurtres répétés, il portait une guirlande (mala) de doigts (anguli).
Alors, le Béni du Ciel, tôt le matin, ayant mis ses robes et portant sa robe de dessus et son bol, se rendit à Savatthi demander l’aumône. En rentrant de Savatthi après sa tournée, il rangea son logement. Portant ses robes et son bol, il s’avança sur la route où demeurait Angulimala. Les vachers, les bergers et les fermiers qui le voyaient prendre ce chemin lui dirent:

Ne prenez pas ce chemin, ô contemplatif, car Angulimala est là: brutal, aux mains couvertes de sang, adonné à l’assassinat, incapable de pitié envers les êtres vivants. Il transforme les villages en non-villages, les villes en non-villes, vide les campagnes de leurs habitants. Il porte un collier fait des doigts de ses victimes. Des groupes de dix, vingt, trente et même quarante hommes ont pris cette route et même eux sont tombés aux mains d’Angulimala.”

Ayant entendu cela, le Béni du Ciel garda le silence et poursuivit sa route.

Une second fois… Une troisième fois, ils lui répétèrent,
“Ne prenez pas ce chemin, ô contemplatif (...)Des groupes de dix, vingt, trente et même quarante hommes ont pris cette route et même eux sont tombés aux mains d’Angulimala.

Ayant entendu cela, le Béni du Ciel garda le silence et poursuivit sa route.

Angulimala vit alors venir le Béni du Ciel de loin, et en le voyant, il se dit:

Remarquable! Etonnant! Comme ça se trouve! Des groupes de dix, vingt, trente et même quarante hommes ont pris cette route et même eux sont tombés en mes mains, et pourtant voilà que ce contemplatif vient m’attaquer, seul et sans même un compagnon. Pourquoi ne pas le tuer?

Alors Angulimala, prenant son épée et son bouclier, ceignant son arc et son carquois, se mit en chasse du Béni du Ciel.

Ce dernier accomplit alors une telle prouesse psychique qu’Angulimala, quoiqu’il courrut de toutes ses forces, n’arrivait pas à le rejoindre, alors qu’il ne marchait pourtant qu’à pas normal.

La pensée vint à l’esprit d’Angulimala:

Remarquable! Etonnant! Par le passé, j’ai chassé et saisi même un éléphant en pleine course, un cheval en pleine course, un chariot en pleine course, un cerf en pleine course. Mais aujourd’hui, tout en courant de toutes mes forces, je n’arrive pas à rattrapper un contemplatif qui marche au pas normal.

Alors, il s’arrêta et héla le Béni du Ciel: “Stop, contemplatif! Arrêtez-vous!

Le bouddha : “Je me suis arrêté, Angulimala. Toi arrête-toi.”

La pensée vint alors à l’esprit d’Angulimala:
Ces contemplatifs Sakyens disent la vérité, sont des défenseurs de la vérité, et voilà pourtant que ce contemplatif, tout en marchant, me dit:’ Je me suis arrêté, Angulimala. Toi arrête-toi.’ Pourquoi ne l’interrogerais-je pas?

Angulimala le bandit adressa donc ces versets au Béni du Ciel:

Tout en marchant, contemplatif, Tu dis: ‘Je me suis arrêté’. Mais quand je me suis arrêté, Tu dis que ce n’est pas le cas. Je t’en demande le sens: Comment te serais-tu arrêté? Comment donc, pas moi?

(Le bouddha)
Je me suis arrêté, Angulimala, Une fois pour toutes, Ayant rejeté la violence Envers tous les êtres. Toi, pourtant, Tu es sans limites avec les êtres. C’est ainsi que je me suis arrêté Et pas toi.

(Angulimala:)
Enfin, un visionnaire très vénéré Juste pour moi Est venu dans la forêt. J’ai entendu tes vers En accord avec le Dharma. J’irai par les chemins Ayant abandonné le mal”.

Ce que disant, le bandit jeta son épée et ses armes de la falaise
dans un précipice dans un gouffre.
Il rendit alors hommage
Aux pieds de l’Ainsi-Venu
Et sur le champ demanda admission.
L’Eveillé
le grand visionnaire compatissant
L’enseignant du monde, avec tous ses dévas
lui dit alors:

Viens, bhikkhu”.

Ce qui, en soi,
Fut pour lui l’entrée dans l’ordre.



Or, à cette époque, une grande foule de gens, hurlant et bruyants, se rassemblèrent aux portes du palais intérieur du roi Pasenadi du Kosala, [en criant] :

Il y a un bandit dans votre royaume, sire, du nom d’Angulimala: brutal, aux mains couvertes de sang, adonné à l’assassinat, incapable de pitié envers les êtres vivants. Il transforme les villages en non-villages, les villes en non-villes, vide les campagnes de leurs habitants. Il porte un collier fait des doigts de ses victimes. Le roi doit l’éradiquer!

Alors, le roi Pasenadi Kosala, avec une cavalerie d’environ 500 cavaliers, sortit de Savatthi et entra dans le monastère.
Avançant aussi loin que les chariots le pouvaient, il descendit et s’avança à pied vers le Béni du Ciel. En arrivant, il s’assit d’un côté. Une fois qu’il fut assis, le Béni du Ciel lui demanda:

Qu’y a-t-il, grand roi? Est-ce que le roi Seniya Bimbisara du Magadha vous a provoqué, ou sont-ce les Licchavis de Vesali ou quelqu’autre roi hostile?

Non, Seigneur. Le roi Seniya Bimbisara du Magadha ne m’a pas provoqué, pas plus que les Licchavis de Vesali, ni aucun autre roi hostile. Il y a un bandit dans mon royaume, Seigneur, du nom d’Angulimala: brutal, aux mains couvertes de sang, adonné à l’assassinat, incapable de pitié envers les êtres vivants. Il transforme les villages en non-villages, les villes en non-villes, vide les campagnes de leurs habitants. Il porte un collier fait des doigts de ses victimes. Je vais l’éradiquer.”

Grand roi, supposons que vous voyiez Angulimala avec ses cheveux et sa barbe rasés, portant la robe ocre, ayant quitté la vie domestique pour la vie sans domicile, se refusant désormais à tuer des êtres vivants, de prendre ce qui n’est pas donné, de dire des mensonges, vivant la vie sainte avec un seul repas par jour, vertueux et de bon caractère: que lui feriez-vous?

Nous nous inclinerions devant lui, Seigneur, ou nous lèverions pour le saluer, ou lui offririons un siège, ou des robes, de la nourriture, un logement ou des fournitures médicinales pour guérir les maladies; ou nous lui offririons une garde légale, une protection, une défense. mais comment un personnage aussi mauvais et sans vertu pourrait-il faire preuve d’une telle vertu et d’une telle retenue?

A ce moment-là, le bikkhu Angulimala était assis non loin du Béni du Ciel.
Ce dernier, le montrant de son bras droit, dit au roi Pasenadi Kosala: “Voilà, ô grand roi, Angulimala.

Le roi Pasenadi Kosala fut alors apeuré, terrifié, ses cheveux se dressèrent sur sa tête. Alors, le Béni du Ciel, sentant la peur et l’épouvante du roi, lui dit: “N’ayez pas peur, grand roi. N’ayez pas peur. Il ne représente aucun danger pour vous.”

Alors, la peur du roi, sa terreur, sa chair de poule cessèrent. Il s’approcha du bikkhu Angulimala et dit: :

Etes-vous vraiment Angulimala, vénérable?
“Oui, ô grand roi.”

Quel est le clan de votre père? Quel est celui de votre mère?
“Mon père est un Gagga, ô grand roi, et ma mère une Mantani.”

Alors, puisse maître Gagga Mantaniputta se plaire [ici].
Je serai responsable pour vos robes, votre nourriture, votre logement, et vos fournitures médicinales en cas de maladie.”

Or, il se trouve qu’à l’époque, le vénérable Angulimala habitait au désert, demandait l’aumône, portait un jeu de triples robes faites de tissu de rebut. Il dit donc au roi Pasenadi Kosala: “Inutile, ô grand roi. Ma triple robe est complète.”

Le roi Pasenadi Kosala alla donc voir le Béni du Ciel, s’inclina devant lui et s’assit d’un côté. Et, une fois assis, il lui dit:
Remarquable, Seigneur. Etonnant de voir comment le Béni du Ciel a pu dompter l’indompté, pacifier l’impacifié, et amené à la libération ceux qui n’étaient pas libérés. Ce que nous n’aurions pu dompter par des armes tranchantes ou contondantes, le Béni du Ciel l’a dompté sans armes ni contondantes ni tranchantes. Maintenant, Seigneur, il nous faut partir. Nombreux sont nos devoirs, nombreuses nos responsabilités.

Faites donc, ô grand roi, comme il vous paraît qu’il est temps de faire.”

Alors, le roi Pasenadi Kosala se leva, s’inclina et — le maintenant sur sa droite — il prit congé.

Puis, le vén. Angulimala, tôt le matin, ayant mis ses robes et portant son bol, se rendit demander l’aumône à Savatthi.
Comme il allait de maison en maison pour demander l’aumône, il vit une femme qui souffrait d’un accouchement par le siège. ce que voyant, il pensa: “Que les êtres vivants sont tourmentés! Qu’ils sont donc tourmentés!

Puis, ayant fait sa tournée dans Savatthi et revenant au monastère après son repas, il alla voir le Béni du Ciel et lui dit: “A l’instant, ô Béni du Ciel, j’ai vu une femme qui souffrait d’un accouchement par le siège, et je me suis dit : “Que les êtres vivants sont tourmentés! Qu’ils sont donc tourmentés!”

(le bouddha) “En ce cas, Angulimala, va voir cette femme, et en arrivant, dis lui: “Ma soeur, depuis ma naissance, je ne me rappelle pas avoir tué intentionnellement un être vivant. Que cette vérité t’apporte du bien-être, et du bien-être pour ton bébé”.

(Angulimala) “Mais, Seigneur, ne serait-ce pas pour moi un mensonge? Car j’ai, intentionnellement, tué bien des êtres vivants!”.

(le Bouddha) “Alors, en ce cas, Angulimala, va voir cette femme et dis lui: “Ma soeur, depuis que je suis né dans la noble naissance, je ne me rappelle pas avoir intentionnellement tué un être vivant. Que cette vérité t’apporte du bien-être, et du bien-être pour ton bébé”.

Répondant alors au béni du Ciel: “Il en sera comme vous le dites, Seigneur,”
Angulimala alla voir cette femme et lui dit :Ma soeur, depuis que je suis né dans la noble naissance, je ne me rappelle pas avoir intentionnellement tué un être vivant. Que cette vérité t’apporte du bien-être, et du bien-être pour ton bébé”. Et ainsi en fut-il.

Alors, le vén. Angulimala, demeurant seul, reclus, attentif, vigilant, ardent et résolu, en un rien de temps atteint et demeura dans le but de la vie sainte pour laquelle les hommes de clan quittent à bon droit la vie domestique pour vivre sans domicile fixe, sachant et réalisant pour eux-mêmes dans l’ici et maintenant, que: “La naissance est finie, la vie sainte est remplie, la tâche est accomplie. Il ne reste rien pour moi en ce monde.” C’est ainsi que le vén. Angulimala devint l’un des arahants.

Alors, le vén. Angulimala, tôt le matin, ayant mis ses robes et portant son bol, se rendit demander l’aumône à Savatthi.
Alors, ce jour-là, une motte de terre jetée par quelqu’un l’atteignit sur son corps, une pierre jetée par quelqu’un d’autre aussi, et un tesson jeté par une troisième le toucha encore.
Le vén. Angulimala — la tête ouverte et dégoulinante de sang, et sa robe de dessus mise en pièces — se rendit alors auprès du Béni du Ciel. ce dernier le vit venir de loin et lui dit: “Tiens bon, brahmane! Tiens bon! Le fruit du kamma qui t’aurait fait brûler en enfer pendant de longues années, de longues centaines d’années, voire de longs milliers d’années, tu le vis maintenant dans l’ici et maintenant!

Alors, le vén. Angulimala, s’étant isolé en réclusion, ressentit le bonheur de la libération. Il s’exclama alors:

Celui qui fut jadis insensible ,
Mais ne l’est plus
Illumine le monde
Comme la lune dégagée d’un nuage.

Ses actes mauvais
Sont remplacés par des actes appropriés:
Il illumine le monde
Comme la lune dégagée d’un nuage.

Tout jeune moine
Qui se voue
A la demande du bouddha
Illumine le monde
Comme la lune dégagée d’un nuage.

Que même mes ennemis
Entendent parler du Dharma.
Que même mes ennemis
Se vouent
A la requête du Bouddha.
Que même mes ennemis
S’associent à ceux-là
Qui, paisibles, bons,
En entraînent d’autres à accepter le Dharma.
Que même mes ennemis
Entendent le Dharma encore et encore
De ceux qui conseillent l’endurance la patience
Qui louent la non-opposition
Et puissent-ils les suivre.

Car sûrement il ne me ferait aucun mal,
Ni personne d’autre;
Il atteindrait la paix suprême,
Protégerait le faible et le ferme.

Les irrigateurs guident l’eau.
Les flécheurs façonnent la tige de la flèche.
Les charpentiers façonnent le bois.
Les sages se contrôlent eux-mêmes.

Certains domptent avec un bâton
Avec des crochets, et des fouets
Mais c’est sans arme, contondante ou blanche
Que je fus dompté par l’Ainsi-Venu.

“Qui ne fait pas le mal” est mon nom.
Mais j’ai été un faiseur de mal.
Me voici en accord avec mon nom,
Car je ne fais de mal à personne.

Un bandit
j’ai été
Connu sous le nom d’Angulimala.
Emporté par un torrent puissant
J’ai pris refuge dans le Bouddha.

Les mains pleines de sang
j’ai eues,
Connu sous le nom d’Angulimala.
Voyez que j’ai pris refuge!
Déracinée est [l’envie insatiable],
Le guide du devenir.

Ayant eu le type de kamma
Qui mènerait à plus d’une
Mauvaise destination,
Touché par le fruit de [ce] kamma,
Désendetté, je mange ma nourriture

Ils sont accrocs à l’insouciance
– des sots, obtus —
Alors que qui est sage
Chérit la vigilance
Comme sa plus grande richesse.

Ne donnez pas lieu à l’insouciance
ni à l’intimité
avec le plaisir sensuel –
Car une personne vigilante,
Absorbée en jhâna,
Atteint une béatitude sans bornes.

Ceci est bien venu et n’est pas reparti,
Ce ne fut pas mal pensé pour moi.
De toutes les qualités bien analysées,
j’ai obtenu
les meilleures.

Ceci est bien venu et n’est pas reparti,
Ce ne fut pas mal pensé pour moi.
Les trois connaissances
ont été atteintes;
La requête du Bouddha
a été satisfaite.




source : Angulimala Sutta

mardi 1 janvier 2008

La position du Bouddhisme par rapport au racisme - Deuxième partie




  • Pour rappel, la présentation des auteurs et le début de cette étude ayant pour objet (...) de montrer la contribution propre du bouddhisme à la compréhension et à la solution du problème racial, se trouve ICI


Ce troisième et dernier chapitre de "Le Bouddhisme et la question raciale" par G. P. Malalasekera et K.N. Jayatilleke, contient un bref exposé historique des tentatives faites par le bouddhisme pour éliminer les barrières des races et des castes, et pour réconcilier les hommes, et rend compte des résultats qui ont pu être obtenus dans cette voie, par la douceur, la persuasion et l’exemple, sans jamais recourir à la force armée.



Extraits du chapitre III:
LA POLITIQUE DU BOUDDHISME A L’ÉGARD DU PROBLEME DU RACISME ET DES CASTES


Comme on l’a vu dans le chapitre précédent,
le bouddhisme a toujours proclamé l‘unité de l’humanité et nié que la naissance puisse ou doive constituer un obstacle au développement personnel et spirituel
.

Les distinctions de race et de caste sont sans doute commodes, mais trompeuses, et n’ont en tout cas rien d’absolu.

D’après le bouddhisme, les différences de caste correspondent seulement à des différences de profession ; or, il semble qu’à l’époque on était encore relativement libre de choisir sa profession, voire d’en changer. Les préjugés et les discriminations de caste n’étaient pas encore définitivement établis ; les brahmanes s’occupaient précisément de formuler les sanctions religieuses et juridiques nécessaires pour assurer la perpétuation du système existant.

Dans cette conjoncture, nous voyons que le Bouddha et ses disciples ne tiennent aucun compte de la naissance pour l’admission dans l’Ordre monastique et s’efforcent au contraire, par la persuasion et l’exemple, d’éliminer les préjugés et discriminations de caste suscités par les brahmanes.

« Le Bouddha ignore entièrement et absolument aussi bien les privilèges que les incapacités qui s’attachent à la naissance, à la profession ou à la condition sociale ; et il ne tient compte d’aucun des interdits ou des prescriptions arbitraires de caractère »

Des gens de toutes castes étaient admis dans l’Ordre monastique, et ils devaient même changer de nom et de titre pour éviter de rappeler leur rang et- leur naissance.


On raconte, par exemple, que des moines, pénétrés de l’importance de leur rang, voulurent monopoliser des logements au détriment d’Anciens de l’Ordre.

Le Bouddha leur demanda :

- Dites-moi, frères, qui mérite le meilleur logement, la meilleure eau, le meilleur riz ? - Quelques-uns répondirent : Celui qui était noble avant d’entrer dans la communauté
- D’autres : Celui qui était à l’origine un brahmane, ou un homme riche ».

Et le Bouddha leur dit : « Dans la religion que j’enseigne, la préséance en matière de logement, et en toute matière analogue, n‘appartient pas à celui qui était noble, ou brahmane, ou riche avant d’entrer dans l’Ordre. »


Parmi les membres les plus éminents de l’Ordre monastique, on compte des représentants des « basses » castes:
Upali - le plus compétent après le Bouddha pour tout ce qui touche aux règles de l’Ordre; avait exercé le métier de barbier, l’un des plus méprisés de ceux qui étaient réservés aux « basses » castes.
Les nonnes Punna et Punnika avaient été esclaves.(...)


Comment le Bouddha s’adressait-il aux hommes et aux femmes des conditions les plus humbles, pour leur faire prendre conscience du patrimoine spirituel dont sont riches tous les êtres humains, même s’ils sont méprisés par certains qui les jugent voués aux travaux serviles ?

A ce propos, le mieux est de citer les paroles de quelqu’un qui a accèdé à cette conscience, non par la grâce, mais par son effort : personnel.

Voici les vers, que Sunita le balayeur, a composé pour raconter sa vie et son élévation spirituelle :

Humble est le clan ou je suis né, Infimes étaient mes ressources, misérable mon sort, vile ma tâche : je balayais les fleurs fanées.
Nul ne se souciait de moi, j’étais méprisé, insulté ; J’humiliai mon esprit et courbai la tête Vénérant une belle légende populaire.
C’est alors que je vis venir l’illuminé, Entouré et suivi de son escorte de bhikkhus (moines), illustre héros pénétrant dans la grande cité de Magadha.
Je déposai mes corbeilles et mon joug, et je vins là où je pouvais faire ma soumission ;
Et pour moi, dans sa grande bonté, Le Chef des hommes fit halte.
Prosterné à ses pieds, me tenant là, Je priai le Maître de m’autoriser à entrer dans l’Ordre Et à le suivre, lui, le Maître de toutes les créatures.
Et lui, dont la tendre miséricorde veille sur le monde entier, Me répondit : "Viens, bhikkhu" dit-il, Me conférant ainsi l’ordination.

Et seul, retiré dans les profondeurs des forets, Animé d’un zèle inlassable, j’appliquai les paroles du Maître, Les conseils du Conquérant.
Et voici que, pendant la première veille de la nuit, surgirent de lointains souvenirs de la chaîne des vies passées.
Et pendant la veille du milieu de la nuit, l’oeil des cieux, La vision céleste se clarifia.
Et pendant la dernière veille de la nuit, je fis éclater Les ténèbres de l’ignorance.
Puis, comme la nuit faisait place à l’aurore Et que se levait le soleil, vinrent Indra et Brahma, Me rendant hommage, les mains jointes :

« Gloire à toi, noble fils des hommes ! Gloire à toi, ô le plus haut parmi les hommes ! Toutes les ivresses sont mortes pour toi ; Et tu es digne, noble Seigneur, de recevoir des dons. »
Et le Maître, me voyant entouré et suivi D’une escorte de dieux, un sourire se jouait sur ses lèvres, Me dit ces mots : « Grâce à la discipline d’une vie simple, à l’austérité, A la maîtrise de soi, l’homme devient saint ; C’est là la sainteté suprême ! »



En enseignant aux moines et aux nonnes de l’Ordre à réaliser le plein épanouissement de leurs facultés spirituelles, non seulement on ne faisait pas appel aux sentiments de caste ou de race, mais on considérait ces sentiments comme des obstacles à la vision spirituelle et à la vie morale.


Dans l’Ordre bouddhiste, il n’existait aucune distinction fondée sur la naissance. Les moines et les nonnes se rendaient chez des gens de toutes castes, pour prêcher ou prendre leurs repas - non sans s’exposer à des désagréments.

Il arriva au Bouddha d’être injurié par des brahmanes auxquels il demandait un repas, et lorsqu’on voulait savoir quelle était sa race ou sa caste, il répondait invariablement :
« Ne m’interrogez pas sur ma naissance »

Il lui arriva de parcourir des villages de brahmanes sans obtenir la moindre parcelle de nourriture.

Ses disciples l’imitaient, ignorant les distinctions et les pratiques de caste dans leurs rapports avec leurs semblables.

Ananda - l’un des plus proches disciples du Bouddha et son porte-parole lors du 1er Concile - est le héros de l’histoire suivante:

Ce jour-là, le vénérable Ananda s’habilla de bonne heure et, prenant son bol et son manteau, il pénétra dans la grande cité de Stravasti pour y demander l‘aumône. Ayant fait sa tournée et terminé son repas, il s’approcha d’un puits. Or, une jeune fille malanga (paria), nommée Prakrti, se trouvait au puits pour tirer de l’eau.
Et le vénérable Ananda dit à la jeune fille : « Donne moi de l’eau, ma soeur, car j’ai soif. »
Elle répondit : « Je suis une matanga, ô révérend Ananda ».
« Ma soeur, je ne t‘ai pas questionnée sur ta famille ou ta caste ; je t’ai demandé, s’il te restait de l‘eau, de m’en donner car j’ai soif ».
Alors elle donna de l’eau à Ananda.


Non seulement les moines et les nonnes, mais aussi les laïques, doivent pratiquer la compassion. Les stances ci-après, que récitent fréquemment, aujourd‘hui encore, les bouddhistes laïques, donnent une idée de ces sentiments :

Que tous les êtres vivants,
faibles ou forts, Longs ou grands, moyens, petits, courts ou gros,
Visibles ou invisibles, vivant près ou vivant loin, Nés ou à naître,
Que toutes les créatures soient heureuses.
Que nul ne trompe, que nul ne méprise qui que ce soit, où que ce soit,
Que nul ne souhaite du mal à qui que ce soit, par colère ou ressentiment.
De même qu’une mère, au risque de sa vie, veille sur son seul enfant,
De même que chacun cultive un esprit d’infinie bienveillance à l’égard de tous les êtres.

Il est impossible d’éprouver des sentiments de ce genre si l’on a des préjugés ou des haines d’ordre racial. Les disciples laïques sont invités à ne jamais s’enorgueillir de leur naissance, à renoncer à toute vanité de race ou de caste.


Dans un sermon où sont énumérées les caractéristiques de l’homme qui progresse et de celui qui dégénère, la vanité est considérée comme l’une des causes de la déchéance : « L’homme fier de sa naissance, de sa fortune ou de sa famille qui méprise son semblable est dégénéré »



Parmi les métiers "interdits" aux bouddhistes figure le commerce des esclaves, « le trafic des êtres humains » celui-ci n’étant pas compatible avec « le mode de vie juste » que doit suivre chaque bouddhiste.

Chacun doit respecter la dignité humaine des serviteurs vivant à son foyer:
« ne pas les accabler de travail, leur donner de bons repas et de bons gages, les soigner quand ils sont malades, partager avec eux les aliments et les friandises, leur donner assez de congés et de loisirs ».


Ainsi, le bouddhisme améliore le sort d’une classe de gens dont les textes brahmaniques disent qu’ils sont nés ou créés pour servir, qu’ils peuvent être chassés ou tués à volonté.

(...)

Dès l’origine, le bouddhisme a eu ses « missionnaires », chargés d’apporter à toute l’humanité un message de vérité et d‘amour :

« Allez, dit le Bouddha à ses disciples, je suis délivré de toutes les chaînes, humaines et divines. Et vous aussi vous êtes délivrés de toutes les chaînes humaines et divines. Allez, parcourez le monde pour le profit de la multitude, pour le bien-être de la multitude, par compassion pour l’univers, pour le bien, pour le profit et pour le bien-être des dieux et des hommes... »

Et ils devaient aller ainsi, pour tenter de comprendre .... toutes sortes de peuples et de tribus, sans se soucier des périls du voyage ou du danger de leur mission, armés des seules armes de la vérité et de l’amour. Ils devaient pratiquer la compassion.(...)


(...) D’après les livres bouddhiques, les brahmanes appelaient le Bouddha « Gautama le reclus, qui proclame le salut possible pour toutes les castes. »(...)

Cependant, (certains auteurs) qui n’ont étudié qu’une partie des Jatakas et négligé la majorité des textes du Canon- déclarent : « C’est une erreur de considérer le Bouddha comme un réformateur social et le bouddhisme comme une révolte contre le régime des castes. » Ils admettent toutefois que « l’influence générale du Bouddha s’est exercée dans le sens du libéralisme. »


On peut donc admettre que le mouvement bouddhiste a, pour le moins, contribué dans une grande mesure à l’assouplissement du système des castes


Au cours des deux mille cinq cents ans de son histoire, le bouddhisme s’est répandu dans de nombreux pays, peuplés de races diverses, mais son rayonnement a été dans l’ensemble limité à l’Orient. C’est peut-être à son influence prolongée que les races de l’Asie doivent d’être si étroitement unies par l’esprit et, dans la meusre OU cet esprit se caractérise par la non-violence et la tolérance - si audacieuse que soit une telle généralisation - cette influence s’étend à l’univers entier. L‘unité dont il s’agit n’est certes pas une unité stricte de doctrine, car le bouddhisme n’a jamais cherché à imposer une orthodoxie ou a refréner la liberté de pensée.


« L’absence d’agressivité est l’un des traits les plus remarquables du bouddhisme Il y a chez le bouddhiste une sorte de douceur à laquelle tout le monde doit être sensible, me semble-t-il. Mais cette douceur et cette absence d’agressivité ne sont pas de la faiblesse. Elles ne sont pas inspirées par la peur. La non-agressivité du bouddhiste dissimule une réserve de force. C’est la douceur de l’homme fort qui refuse de se frayer brutalement un chemin dans la foule, ou celle de l’homme réfléchi qui est convaincu que l’enjeu n’en vaut pas la peine. Parce qu’ils sont doux, parce que les exhortations du Fondateur sont toujours présentes à leur mémoire, et parce qu’ils subissent l’influence de sa personnalité et veulent suivre son exemple, les bouddhistes n’ont jamais cessé, dans tous les pays où ils ont vécu, de prêcher et de pratiquer et de pratiquer (l’amour) universelle et la sympathie pour tous les êtres doués de sensibilité. »

(...)