lundi 31 décembre 2007

La position du Bouddhisme par rapport au racisme - Première partie





Ci après des extraits de : Le Bouddhisme et la question raciale par G. P. Malalasekera et K.N. Jayatilleke.

Ce texte a été publié par l’UNESCO



Présentation:
  • Les auteurs:
*K.N. Jayatilleke. est chargé de cours de philosophie à l’Université de Ceylan
il est l’auteur de nombreux articles et publications,

*
G. P. Malalasekera est doyen de la Faculté des études orientales et professeur de civilisation palie et bouddhiste à l’Université de Ceylan.
Il est l’auteur de plusieurs livres, notamment : Bouddhisme au Sri Lanka et Bouddhisme à Ceylan.
Il a également publié un «
Dictionnaire des noms propres Pali »
Les textes traduits dans "Les 28 Bouddhas" sont tirés principalement du dictionnaire des noms propres pali de G.P. Malalasekera.

  • Le texte:
Cette étude a pour objet (...) de montrer la contribution propre du bouddhisme à la compréhension et à la solution du problème racial.

Le premier chapitre, dont je n'ai pas copié d'extraits, donne un aperçu succinct des problèmes de la race et du racisme, et de la forme sous laquelle ils se sont posés en Inde avant le bouddhisme.

Le deuxième chapitre; objet du présent message; étudie la position du bouddhisme à l’égard des races, des préjugés raciaux et des problèmes connexes.

Le chapitre trois, fera l’objet d’un prochain message qui sera intitulé : "L’attitude du bouddhisme à l’égard du problème racial- Deuxième Partie"

Pour information, ce troisième chapitre contient un bref exposé historique des tentatives faites par le bouddhisme pour éliminer les barrières des races et des castes, et pour réconcilier les hommes, et rend compte des résultats qui ont pu être obtenus dans cette voie, par la douceur, la persuasion et l’exemple, sans jamais recourir à la force armée. ( objet de ce message) étudie la position du bouddhisme à l’égard des races, des préjugés raciaux et des problèmes connexes.



Extraits du Chapitre II :
LA CONCEPTION BOUDDHIQUE DE L’HOMME ET L’ATTITUDE DU BOUDDHISME A L’ÉGARD DU RACISME ET DES CASTES


L’homme n’est que l’un des êtres doués de sensibilité qui peuplent l’univers.

Pour l’École bouddhiste Theraväda, comme pour l’école Mahäyäna, l’homme n’est que l’un des êtres doués de sensibilité qui peuplent l’univers.(...)

Si l’on considère l’immensité de l’espace cosmique et le nombre infini des mondes, dont les mondes humains ne forment qu’une très petite partie, les questions raciales semblent vraiment insignifiantes.(...)

Réprimandant certains moines qui s’estimaient supérieurs aux autres parce qu’ils étaient plus réputés et plus riches, le Bouddha les comparait à des vers de terre nés et nourris dans le fumier, et qui s’estimeraient de ce fait supérieurs.

L’homme doit acquérir l’humilité

Dans une telle perspective cosmique, l’homme qui rampe à la surface de la terre en essayant d’y subsister doit au moins acquérir l’humilité.(...)

Au cours de notre évolution samsarique nous naissons des centaines de fois sous la forme d’animaux et nous n’atteignons que très rarement à l’existence humaine.

Dans l’ordre cosmique, la naissance sous la forme d’un être humain est un évènement rare. Les hommes ont donc le devoir de tirer le meilleur parti possible de cette précieuse existence humaine.

Ils ont la capacité de découvrir par eux mêmes les vérités les plus profondes concernant le cosmos.

Une personne y est parvenue : c’est le Bouddha, qui est à la fois le meilleur des hommes et le plus évolué de tous les êtres doués de sensibilité.(...)

(...)Ceux qui atteignent à ces sommets ne sont ni des prodiges de la nature ni les heureux élus de quelque divinité : Ce sont des hommes qui ont travaillé, au cours de nombreuses existences, à développer leur nature intellectuelle, morale et spirituelle. Ce qu’ils ont réalisé est à la portée de chacun. Et non seulement les hommes, mais tous les êtres doués de sensibilité - si inférieurs soient-ils - peuvent devenir des bouddhas car la nature d’un bouddha (bouddha-bhava) est toujours présente en eux, dit le Mahäyäna.(...)

Nul n’a le droit de mépriser ses semblables

Ne serait-ce que pour cette raison, nul n’a le droit de mépriser ses semblables car toutes les créatures sont soumises aux lois de l’existence et possèdent, au fond, la même nature et les mêmes possibilités, bien qu’elles se trouvent à des stades différents de développement et ne se développent pas toujours au même rythme.

(...) En prenant conscience à la fois de notre condition commune et des possibilités qui sont en nous, nous comprenons que chacun a le devoir d’aider ses semblables et que nul n’a de raison légitime de les mépriser.


1- L'unité Biologique de l'humanité et la réfutation du racisme


Pour montrer la valeur et la dignité de l’existence humaine, le bouddhisme met spécialement l’accent sur les occasions et les possibilités de perfectionnement qui s’offrent à l’homme.

L’humanité ne forme qu’une seule espèce.

Il souligne aussi l’unité de l’espèce humaine, qu’il différencie des règnes animal et végétal : dans les règnes animal et végétal, on peut distinguer diverses espèces, mais l’humanité ne forme qu’une seule espèce.

Ce point de vue se trouve confirmé de façon éclatante par les découvertes de la biologie moderne.

Le Bouddhisme s’oppose nettement à certaines théories du XVIII et du XIX siècle, d’après lesquelles les races humaines comme les espèces animales pourraient être classées en supérieures et inférieures et mine les fondements mêmes des doctrines racistes qui divisent les êtres humains en groupes plus ou moins isolés et considèrent que les diverses caractéristiques humaines sont entièrement déterminées par des facteurs génétiques.

Le passage ci-dessous est une critique de la théorie brahmanique des castes ; il montre incidemment que les brahmanes revendiquaient la supériorité pour des motifs d’ordre génétique.

« Nous avons une controverse au sujet des différences dues à la naissance, ô Gautama ! Bharadvaja dit qu’on est brahmane de naissance, et moi je -dis qu’on l’est par ses actes ; saclie cela, ô toi qui vois tout. »

« Nous sommes incapables de nous convaincre l’un l’autre ; aussi sommes-nous venus à toi, dont on célèbre la parfaite sagesse. - Je vais t’expliquer dans l‘ordre, ô Vasettha, dit Bhagavat, la répartition exacte des êtres vivants selon les espèces, car ces espèces sont innombrables. »

« Tu connais les herbes et les arbres ; bien qu’ils ne le manifestent pas, ils portent des signes distinctifs selon les espèces et leurs espèces sont innombrables. »

« Tu connais les vers, les papillons et les fourmis ; ils portent des signes distinctifs selon les espèces, et leurs espèces sont innombrables. »

« Tu connais les quadrupèdes, petits et grands ; ils portent des signes distinctifs selon les espèces, et leurs espèces sont innombrables ».

« Tu connais les serpents qui rampent sur la terre ; ils portent des signes distinctifs selon les espèces, et leurs espèces sont innombrables ».

(...)

« Chez ces espèces, les signes distinctifs de l’espèce abondent ; mais il n’y a pas de signes qui distinguent les espèces chez les hommes. Ni dans la chevelure, la tête, les oreilles, les yeux, la bouche, le nez, les lèvres ou le front. Ni dans le cou, les épaules, le ventre, le dos, les hanches, la poitrine, les organes génitaux féminins ou les relations sexuelles. Ni dans les mains, les pieds, les paumes, les ongles, les mollets, les cuisses, la couleur ou la voix, il n’existe de signes qui permettent de distinguer parmi les hommes des espèces ».

« Il existe des différences entre les autres êtres qui possèdent un corps mais, entre les hommes, les différences sont purement nominales ».

(...)

Ainsi donc, selon le Bouddha, on ne peut classer les hommes en différents genres ou espèces, comme on le fait pour les herbes, les arbres, les vers, les papillons, les poissons, les quadrupèdes, les oiseaux, etc.

Sur ce point, Gautama est d’accord avec la biologie moderne qui envisage que les Anthropidae sont représentés par un seul genre et par une seule espèce : l’homme.

Cette conclusion est d’autant plus remarquable que Gautama n’a pas été induit en erreur par l’accident de la couleur.

Le Bouddha montre ensuite que les distinctions faites entre les hommes ne répondent pas à des différences biologiques fondamentales, mais à des classifications conventionnelles.

Les distinctions fondées sur la couleur de la peau (uanna), la nature des cheveux (kesa), la forme de la tête (sisa) ou la forme du nez (nasa) n’ont rien d’absolu. On rejoint presque ainsi la position de la science moderne.(...)

Le bouddhisme s’accorde donc avec les enseignements de la biologie moderne, qui ont ruiné les doctrines racistes et démontré l’unité biologique de l’espèce humaine.

Lorsque le bouddhisme nous invite à traiter tous les hommes et toutes les femmes, quelle que soit leur race ou leur caste, comme s’ils étaient notre père, notre mène, notre frère ou notre soeur, comme les membres d‘une même famille, il proclame une vérité profonde et non un simple précepte moral.

(...)

Il existait cependant, à l’époque du Bouddha, des philosophies racistes et celles-ci sont critiquées dans les textes bouddhiques

Le Bouddha nie l’existence de types humains fixes, génétiquement déterminés. Il admet le libre arbitre et la capacité de l’homme à devenir moral ou immoral, heureux ou malheureux, à se transformer ou à dégénérer.


2- La dignité et l'égalité des hommes : Critique du Système des Castes


Le bouddhisme combat les préjugés et les discriminations de caste:

On voit que le bouddhisme admet l’unité biologique de l’espèce humaine et se refuse à reconnaître l’existence de groupes raciaux génétiquement différents.

Le bouddhisme combat les préjugés et les discriminations de caste en les ignorant dans la pratique et en ruinant leurs fondements théoriques à l’aide d’arguments rationnels.

Ci après ; les arguments scientifiques, moraux et religieux invoqués par le bouddhisme contre la théorie brahmanique des castes.

Arguments biologiques.

L’argument biologique essentiel est qu’il n’existe pas d’espèces humaines, comme il existe des espèces animales et végétales, et que l’humanité ne forme qu’une seule espèce.

L’Ambattha Sutta (Sermon sur Ambattha) montre que la notion de pureté de caste, si chère au coeur des brahmanes, n’est qu’un mythe.

Ambattha, un jeune brahmane, était si fier de sa haute naissance qu’il négligeait les règles de la courtoisie en parlant au Bouddha, qui n’était pas brahmane.

Le Bouddha lui répond en mettant en doute la pureté de ses origines : « Si l’on remontait à tes ancêtres paternels et maternels, lui dit-il, on s’apercevrait que l’un d’eux était l’enfant d’un jeune esclave sakya »


Arguments sociologiques.

Pour combattre les théories brahmanistes, on peut aussi rechercher la nature et les origines véritables de la société et des castes.

Dans la conception hindouiste, statique, de la société, le système traditionnel des quatre castes (prêtres, soldats et administrateurs, marchands et agriculteurs, serviteurs) est considéré non seulement comme absolu, fondamental et nécessaire à la société, mais encore comme voulu et institué par Dieu (Brahma).

Le bouddhisme primitif propose, au contraire, une conception dynamique, évolutive de la société. Le système des quatre castes n’est pas absolu.

Les textes bouddhiques insistent sur le fait que les brahmanes ne naissent pas autrement que les autres hommes. (...)

Le bouddhisme considère les castes comme des catégories professionnelles, d’origine historique, et attribue la persistance des préjugés et des discriminations de caste à l’influence des prêtres brahmanes.(...)

La théorie des castes, que les brahmanes essaient d’imposer à la société pour justifier et perpétuer les préjugés et les discriminations fondés sur la religion, est qualifiée à maintes reprises par les textes bouddhiques de pur instrument de propagande.(...)

Le bouddhisme défend contre le brahmanisme la cause de l’égalité sociale des hommes, en se fondant sur la structure effective de la société à cette époque.(...)

Contrairement aux brahmanes, qui cherchaient à faire de la religion un monopole, les bouddhistes forment une société idéale où tous les hommes, quelle que soit leur condition sociale ou leur naissance, sont libres d’entrer dans les ordres religieux et peuvent prétendre de ce fait aux mêmes honneurs.(...)

D'après le bouddhisme, tous les hommes, sans distinction de caste ou de race, ont des droits égaux et méritent de bénéficier de possibilités égales de développement, car ils appartiennent tous à la société humaine.(...)

La condition sociale de chacun est déterminée non par la caste ou la race, mais par la fortune - qui permet d’avoir des serviteurs de toute origine.
Tous doivent être égaux devant la loi.
Les aptitudes ne sont pas déterminées par la naissance. La valeur morale de chacun doit être reconnue par la société, sans distinction de caste. Tous les hommes doivent bénéficier de possibilités égales de développement moral et spirituel puisque tous sont susceptibles d‘un tel développement.

C’est en ces termes que le bouddhisme proclame l’égalité de tous les hommes en tant que membres de la société humaine.(...)


Les arguments ethniques et religieux.

Comme nous l’avons vu, le bouddhisme invoque les faits historiques pour contester aux brahmanes toute prérogative spéciale en matière de religion. Il démontre que les brahmanes ne sont pas, comme ils le prétendent, les enfants élus de Dieu et les seuls susceptibles d’être sauvés - car les gens de toutes castes, s’ils en trouvent la possibilité, peuvent atteindre à la perfection spirituelle et faire leur salut.(...)

Tous les hommes sont égaux au regard de la loi morale. Ils sont jugés en fonction du bien et du mal qu’ils ont fait, et non d’après leur condition sociale ou leur naissance.(...)



3- L'Unité spirituelle de l'humanité


Au point de vue biologique, l’humanité forme une seule espece. Membres d’une même société, tous les hommes méritent d’avoir les mêmes droits et les mêmes possibilités, et en particulier celles de développement moral et spirituel.(...)

Tous les hommes, quelle que soit leur race, sont voués à la maladie, à la décrépitude et à la mort

Ce qui unit les hommes, c’est le sentiment de leur destin commun et de leur condition commune. Tous les hommes, quelle que soit leur race, sont voués à la maladie, à la décrépitude et à la mort ; et ils sont tous soumis aux mêmes désirs : désir de satisfactions sensuelles, désir de vie ou d’immoralité personnelle, désir de domination ou de mort.

Sans cesse, ils aspirent à la sécurité et au bonheur, mais, en cherchant à satisfaire leurs désirs, ils ne font que s’agiter dans une inquiétude perpétuelle.

Le Bouddha a dit : « C’est au plus profond de nous-mêmes que se trouve le but final de tous nos efforts ; c’est en nous que nous découvrirons la paix et le bonheur éternels qui nous permettront de réaliser nos plus hautes aspirations. »

Tous les hommes, quelle que soit leur caste ou leur race, doivent et peuvent se sauver eux-mêmes.(...)

Lorsqu’on veut établir des distinctions entre les hommes, ce qui compte ce n’est pas la forme des membres, la couleur de la peau, l’origine ou la condition sociale, mais la position de chacun par rapport à son but - qui est aussi le but commun de l’humanité et la source du vrai bonheur et de la parfaite santé mentale.

Pour le bouddhisme, les êtres humains ne sont supérieurs ou inférieurs que selon leur degré de perfection morale et spirituelle, indépendamment de toute considération de race ou de caste. Et celle distinction même n’a rien de rigide, puisque chacun change constamment et a le pouvoir de devenir meilleur ou pire.

L’une des caractéristiques de ces êtres supérieurs est qu’ils ne revendiquent aucune supériorité morale ou spirituelle et qu’ils n’ont aucune prétention personnelle. Certes, ils ont conscience de leur supériorité, mais ils n’en font pas étalage, car il est dit que ceux qui ont réalisé leur salut cessent de se considérer eux-mêmes comme étant« supérieurs ».

Les êtres moralement et spirituellement inférieurs, au contraire, se ferment toute possibilité d’éveil spirituel et de progrès moral en revendiquant une supériorité illusoire et en créant ainsi, pour leur propre malheur, et celui des autres, des divisions artificielles entre les hommes.

Les hommes ne sont supérieurs ou inférieurs qu’en raison de leur valeur morale et spirituelle ; mais cette classification elle-même est sujette à modifications, les hommes pouvant changer et changeant en fait.

Nous n’avons donc le droit de mépriser personne. Le criminel le plus endurci - comme le voleur paria Angulimala qui fut converti par le Bouddha - peut avoir de profondes qualités naturelles, et subir en peu de temps une complète transformation spirituelle.

(...)


* A suivre: La deuxième partie de cette étude, ICI


3 commentaires:

hulk.smash a dit…

uipp

Anonyme a dit…

En réalité il y a confusion entre deux termes : "espèce" et "race"

Il n'y a évidemment qu'une seule espèce humaine par contre, il y a bien plusieurs races (également appelées "phénotype" dans le jargon scientifique).

Ce sont de pures différences non hiérarchisables

Unknown a dit…

Le bouddha n'admet pas du tout le libre arbitre.

Il admet totalement l'idée d'une hiérarchie entre les humains.

notamment selon leur moralité.

Cet article raconte n'importe quoi. Il se conforme à une idée fantasmatique et arrangeante du bouddhisme